Myriem Amrani, la vigilante
La lutte contre la radicalisation, elle en parle depuis plus de 10 ans. Dakira, l’association qu’elle a fondée, fait la promo du dialogue interculturel et de l’égalité hommes/femmes. Myriem coordonne aussi les programmes de cohésion sociale à Saint-Gilles.
« Dans le quartier où j’ai grandi, à Bruxelles, la maison de jeunes était un lieu réservé aux garçons. C’était mal vu qu’une fille la fréquente. Cette situation n’était pas seulement préjudiciable pour les filles, les garçons aussi en souffraient. Ils ne savaient pas où rencontrer des copines, ils se plaignaient de ne rien comprendre aux femmes parce qu’à la maison, on n’en parlait pas et qu’à l’école, chacun restait de son côté. Dans ces conditions, j’ai vite développé une conscience féministe !
Être féministe, c’est se battre contre toutes les formes de domination et dans cet esprit, toutes les stratégies sont bonnes. Qu’on décide de tomber le soutien-gorge, comme les Femen, ou de mener son combat en portant le voile, ça n’a pas d’importance, il faut fédérer les énergies. La question du droit des femmes est transculturelle, elle se joue sur des curseurs différents en fonction des pays, des cultures, des traditions familiales. Dans certains pays, les inégalités sont plus flagrantes, des femmes se battent encore pour leur autonomie financière ou leur droit à l’alphabétisation.
Mais ici aussi, j’ai vu des femmes souffrir et je crois que notre société doit faire face à de forts enjeux d’éducation pour expliquer aux jeunes ce que signifie le mot féminisme. Notre projet d’égalité est en recul général. Il suffit de regarder les politiques d’austérité, dont les victimes sont majoritairement des femmes. Qu’il soit devenu politiquement incorrect de ne pas être en faveur de l’égalité des sexes ne signifie pas que les stéréotypes aient disparu. J’ai plutôt l’impression que notre société est schizophrène. Je regrette que la féminité soit souvent réduite à un seul type d’esthétique. Chaque femme exprime sa féminité à sa manière, qu’elle porte des talons hauts ou pas. L’important, c’est de savoir quelle femme on veut être. »