Voyager dans un monde parallèle pour soigner ce qui fait mal, une thérapie qui séduit de plus en plus de Belges. Mais qui sont ses adeptes ?

Victoria est une jeune Bruxelloise de 26 ans issue d’un milieu aisé. Ses passions ? La mode et l’art. En la rencontrant, on ne l’imagine pas forcément branchée voyage chamanique dans une tente perdue en pleine nature. Et pourtant, ses expériences avec le « monde invisible » l’ont bouleversée. Elle raconte.

« Je pars du principe que rien n’est mauvais au préalable, tout m’intéresse. Je n’étais donc pas fermée à la pratique chamanique lorsque j’en ai entendu parler pour la première fois. C’était il y a deux ans. L’une de mes amies proches est née dans une communauté bouddhiste à Bruxelles et grâce à elle, je suis plus ouverte d’esprit. J’ai toujours cru en des énergies, en des âmes non perceptibles. Le véritable déclic s’est produit lorsque je suis allée voir un coach de vie. C’est quelqu’un de très spirituel, il m’a aidée à penser différemment. Via des amis d’amis, j’ai ensuite été invitée à participer à des cérémonies chamaniques. Ces expériences m’ont transformée. Ma première fois, c’était avec l’ayahuasca. Il s’agit d’une liane d’Amazonie que l’on consomme en infusion. Le breuvage est considéré comme une drogue hallucinogène chez nous, il permet de faire travailler l’inconscient. Après avoir bu ce thé, certains problèmes et émotions reviennent à la surface. Le but est de les comprendre et de les résoudre grâce à des visions.

Concrètement, tout le monde se rassemble dans la nature, cela peut être une tente dans un jardin, par exemple. Des peaux de bête, des matelas, des coussins ont été installés dans la pièce. Nous sommes généralement une petite douzaine et des chamans sont également présents, ils vont jouer de la musique toute la nuit. Les participants arrivent à jeun et s’asseyent en cercle. Il est conseillé de prendre un petit seau (l’ayahuasca est purgatif, les nausées sont fréquentes) et de porter des vêtements confortables. Moi, j’avais opté pour une robe mexicaine très fluide. Chacun va ensuite chercher une tasse d’ayahuasca afin de vivre sa propre expérience. La boisson a du mal à passer, le goût est infect. Je n’avais jamais pris de drogue de ma vie. Etonnamment, je n’étais pas stressée, mais confiante et impatiente. Après une demi-heure, une heure, j’ai commencé à ressentir les effets. Il faut apprendre à lâcher prise. J’étais consciente tout au long du processus, j’avais l’impression d’être dans un rêve éveillé. J’ai fermé mes yeux et des images, des souvenirs ont défilé. Autour de moi, j’ai entendu des gens rire, crier, gémir ou pleurer.

Tout le monde est confronté à ses démons intérieurs, les sensations peuvent donc être violentes. Certains font des bad trips, mais le chaman les aide à en sortir rapidement. Lors de ma deuxième cérémonie, mon intention était de me débarrasser des énergies négatives. J’avais un rapport malsain à la nourriture, je passais de la boulimie à l’anorexie. Après avoir bu de l’ayahuasca, j’ai eu des visions répugnantes de morceaux de viande. C’était immonde, mais ça m’a libérée. Du jour au lendemain, je n’ai plus souffert de troubles du comportement alimentaire. Chacun termine sa nuit lorsqu’il en a envie. Les participants peuvent alors partager leur ressenti avec les autres, mais certains ne se souviennent de rien. Le chaman nous aide ensuite à décoder la signification de nos visions. Tout le monde est calme, apaisé. L’énergie est positive et une vague d’amour déferle sur la pièce. Selon moi, c’est le moment le plus beau et le plus fort de la cérémonie. L’instant est magique. L’expérience a été intense, je ne m’étais jamais sentie aussi bien de ma vie. C’est comme si une flamme s’était allumée au fond de moi. Et depuis lors, je travaille mon côté spirituel pour qu’elle ne s’éteigne pas.

Ces cérémonies ont été un élément déclencheur pour moi. Je me suis découvert une passion pour la spiritualité et je me sens très reconnaissante. Aujourd’hui, je n’ai plus envie de combler le vide que je peux ressentir par des fêtes ou de l’alcool. Je n’éprouve plus le besoin de voir du monde en permanence. J’avais l’habitude d’accorder beaucoup d’importance aux apparences et à l’opinion des autres. Ce n’est plus le cas. Je n’organise plus autant de soirées qu’avant. Je suis devenue beaucoup plus solitaire, mais aussi plus altruiste. Et je me sens davantage connectée à la nature. En ce moment, je fais une salutation au soleil tous les matins. Je peux toujours m’extasier devant un beau défilé ou une œuvre d’art, mais je ne veux plus me complaire dans un monde matérialiste et superficiel. Je ne dis pas que je ne ferai plus jamais de shopping, j’aime toujours les belles choses, mais je n’achèterai plus de manière compulsive. Les personnes que je côtoyais il y a deux ans ne me reconnaissent plus. Je souhaite à tout le monde de vivre cette expérience spirituelle au moins une fois dans sa vie. »

La suite de l’article dans le ELLE Belgique d’octobre, en kiosques.