Ils apparaissent à chaque nouvelle saison: les “new faces”. Ces mannequins inconnus au bataillon jusqu’ici et dont les longues jambes débarquent soudainement sur le catwalk. A quoi ressemble leur vie lors des Fashion Weeks ?
Ces mannequins dits les “nouveaux visages” seront rapidement repérés par la presse internationale et qualifiés de “nouvelle sensation” de la mode, avant d’aller poser aux côtés de Gigi Hadid and Co. Ils sont partout, beaux comme des coeurs et propulsés au rang de star du jour au lendemain. Un véritable conte de fée? Oui, mais comme toujours, il y a un revers à la médaille…
Jessie Van Osselt de Just Jess Models dévoile la dure réalité derrière les paillettes.
1. C’est quoi des “new faces” ?
Des mannequins sans expérience, tout simplement. Des filles qui commencent leur carrière et virevoltent de petit job en petit job pour étoffer leur book, booker des shootings et faire un maximum de défilés. Une fois qu’elles ont un peu de matos, elles peuvent entrer dans le circuit et rejoindre les filles qui travaillent déjà dans le milieu. Pour les plus ambitieuses, les semaines de la mode sont un passage obligé car elles constituent une carte de visite et le ticket d’entrée pour les campagnes de mode, les lookbooks et les éditos. Une bonne saison signifie des propositions intéressantes pour les mois suivants. Un peu comme une audition réussie. Et les mannequins confirmées ne font pas exception: chaque nouvelle saison est une nouvelle occasion de se vendre et de rester dans le coup. Pour beaucoup, ces semaines sont en fait la partie qu’elles aiment le moins dans leur job.
2. Tous les nouveaux visages sont-ils aux semaines de la mode ?
Non, seuls des profils très spécifiques y arrivent. Qui dit catwalk dit conditions hyper strictes: taille minimum, mensurations au poil, exigences draconiennes. Certains mannequins très demandés peuvent contourner ces règles mais, à moins de s’appeler Kate Moss ou d’être déjà une célébrité, il faut correspondre au profil recherché.
3. Que se passe-t-il après avoir réussi a défiler aux fashion weeks ?
Déjà, il faut se préparer à quelques journées très, très remplies! Au début, on dit oui à tout et on fait en sorte d’être partout, d’être vue un maximum. Tout cela ne semble pas bien méchant, mais sachez qu’un passage de 10 min sur le catwalk demande des heures de préparation en backstage, des castings et d’essayages dans tous les sens qui ont souvent lieu le soir (pas le temps durant la journée). La plupart du temps, si vous êtes prise, vous ne serez prévenue que tard la veille et c’est parti pour revoir toute votre organisation du lendemain. Une journée classique pendant les semaines de la mode ? Des défilés, des castings non-stop et des essayages jusqu’à pas d’heure pour des tenues que vous porterez peut-être le lendemain. Ou peut-être pas.
4. Il y a une hiérarchie, même entre les mannequins ?
Les petites nouvelles commencent tout en bas de l’échelle, évidemment. Au programme pour elles: les plages horaires les plus ingrates et la dernière place dans la file pour les casting et les essayages. Les mannequins en vogue et les célébrités passent en premier, les mannequins chevronnées ensuite. Et puis seulement les “new faces”. Ne soyez pas étonnée de ne passer qu’à 3h du mat’, ça arrive tout le temps aux nouvelles, et vous avez intérêt à être fraîche et en forme le lendemain pour recommencer. Autre difficulté: les débutantes sont celles que l’on place en fonction de toutes les autres, ce sont souvent des décisions de dernière minute ou des remplacements béquilles et vous devez vous adaptez illico. Sinon, pas de boulot. Pour faire court: c’est DUR. Pour Jessie, le secret c’est de ne jamais arrêter de rire. Et rappelez-vous que quand vous êtes debout à des heures pas possible, chaque personne autour de vous l’est aussi… Etre désagréable et fermée ne vous apportera qu’une mauvaise réputation car, si l’apparence est importante, c’est votre personnalité qui peut faire la différence entre une carrière qui décolle ou qui se plante. En plus, la bonne humeur, c’est contagieux! Alors soyez sympa, on vous le rendra bien. Enfin, dans de telles conditions, n’oubliez jamais d’emporter de quoi manger et boire sur le pouce: vous ne savez jamais pour combien de temps vous êtes là ou si vous allez avoir une pause. Gardez toujours de l’énergie!
5. Et si la chance est au rendez-vous ?
Chaque saison, de nouveaux visages prometteurs sont repérés par une marque et bookés en exclu pour celle-ci. En gros, ceux-là ne bosseront plus que pour cette seule marque cette saison. Tout à coup, on va voir leurs visages partout! C’est ce qui est arrivé à Ine Neefs, qui a fait ses débuts chez Jill Sander. Un booking exclusif représente votre ticket d’entrée officiel dans le monde de la mode, où vous avez toutes les chances de rester si vous la jouez finement. Vous pourrez enfin passer de nouveau visage à visage qu’on s’arrache.
6. Mais rien n’est certain …
Personne ne peut jurer du succès d’un mannequin, pas même les agents et les bookeurs pros. Le monde de la mode est versatile, on peut être in une saison et out la suivante. Du coup, Jessie encourage les débutantes à ne pas baisser les bras trop vite: ok, si vous ne trouvez rien nulle part vos chances sont moins bonnes, mais les choses vont si vite que vous serez peut-être la prochaine sensation. Il faut parfois attendre 3 ou 4 saisons avant de devenir une des stars des semaines des Fashion Weeks.
7. Est-ce vrai que les mannequins paient tout elles-mêmes ?
Surprenant, non ? Et pourtant, c’est vous qui payez votre logement, vos transports et tous les coûts liés à vos prestations, que vous ne “récupérerez” qu’au moment de toucher votre salaire. Pas en une fois, mais chaque boulot que vous faites est un retour sur investissement en quelque sorte. Les grosses agences de mannequins possèdent des appartements dans les villes où se tiennent les semaines de la mode et les filles peuvent y rester pour pas grand chose. C’est pratique, mais pas obligatoire: chacune fait ce qu’elle veut (si vous avez des amis en ville, rien ne vous empêche de loger chez eux, par exemple). Vous l’avez compris, être présente aux semaines de la mode, c’est un investissement qui, si on ne réussit pas, est assez conséquent.
8. Sont-elles payées en vêtements ?
Cela peut arriver pour les nouvelles mannequins, qui ne sont alors pas payées mais “défrayées” à coup de fringues. Les marques considèrent qu’avoir travaillé pour elles est un vrai plus pour votre carrière. Pas génial comme méthode, mais pas inhabituel dans ce milieu. Dans ce cas là, à vous de voir si cela vaut le coup. Est-ce que tel ou tel show aura tel ou tel impact sur mon CV? Il y a des agences qui ne fonctionnent que comme ça, d’où l’intérêt d’avoir un agent qui connait les ficelles du métier et peut vous aiguiller dans un sens ou dans l’autre et empêcher que vous vous fassiez avoir.
9. Peuvent-elles se faire accompagner par un proche ?
Oui, toujours. Ami(e), parent, agent: vous pouvez emmener qui vous voulez avec vous dans la jungle des semaines de la mode – toujours à vos frais, évidemment. Cette personne peut vous aider à gérer votre planning, négocier l’une ou l’autre chose, organiser les trajets. En général, elle pourra vous accompagner backstage. Les mineurs, elles, sont obligées d’être accompagnées, leur +1 pourra donc d’office les suivre en coulisses.
10. New York est-il le meilleur endroit pour débuter ?
Les mentalités et les ambiances sont très différentes d’une ville à l’autre, mais tout le monde s’accorde à dire que la Grosse Pomme est la moins intimidante. L’ambiance y est plutôt familiale et les noubeaix mannequins, un peu perdues, ne sont pas vues là-bas comme des boulets. En plus, c’est la première des quatre fashion weeks, les gens sont encore assez détendus et plein d’énergie. A cet égard, Paris est la grande méchante ville où s’agitent beaucoup de gens de la mode, pressés et fatigués. Mauvais point pour New York cependant: on n’entre pas aux USA sans visa de travail, or vous n’obtiendrez celui-ci qu’en ayant déjà plusieurs shows bookés ou d’éditos où votre nom apparait. En gros, un véritable cercle vicieux. Vous pouvez toujours demander un pass auprès d’agences de mannequins, mais cela reste hyper compliqué pour les petites nouvelles. La deuxième ville la plus sympa pour une semaine de la mode, c’est Londres. L’ambiance un peu arty est apaisante, on s’y sent moins paumée. Milan est plutôt hard car c’est la fashion week la plus courte. Donc on se grouille, on enchaîne les défilés… C’est un rythme de fou pour les mannequins sur place.
On a éveillé votre curiosité? Pour en savoir un peu plus, voilà tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur les Fashion Weeks.
On s’est aussi faufilées dans les coulisses de la Fashion Week de New York.
Traduction: Charlotte Cooremans