Chaque semaine, sur Pure FM, Juliette Debruxelles décrypte un mot nouveau. Bienvenue dans le Bon Parlage, la séquence hebdomadaire de boostage de ton dictionnaire !
La capsule vidéo est à voir sur https://www.rtbf.be/auvio/detail_snooze-le-bon-parlage
Le mot que nous étudions ce matin convient parfaitement au weekend que nous venons de passer, il s’agit du springing comme l’art de fêter indignement le printemps.
Cette joyeuse saison où les bourgeons bourgeonnent, ou les oiseaux chantonnent, où les sandales s’étalent.
Car oui, ces derniers jours, il nous a déjà été donné d’observer, alors qu’il ne faisait que 12 degrés, quelques pieds nus et pas nets s’agiter au vent frais.
Aaaaah le drame annuel de l’orteil inconnu que l’on impose à notre regard incrédule et choqué.
L’ongle asphyxié de ceux qui se sentent autorisés à faire passer leur confort bien loin devant le frisson de la honte que leur impudeur impose.
Mais tout cela ne serait rien si le springing – ou le fait d’accueillir le printemps – ne s’accompagnait d’autres horreurs.
Le springing, c’est le retour des araignées géantes dans la baignoire.
Des rhinites allergiques qui te font éternuer dans ton casque de scooter.
Des enfants que tu traines derrière toi sous prétexte de prendre l’air et qui finissent inévitablement par marcher dans la crotte du chien, par s’approcher trop près du bord de l’étang et par se vautrer en trottinette sur un coin de trottoir, t’empêchant donc d’être peinard.
C’est ce moment où – si tu es une femme qui a concédé aux diktats de l’épilation – tu n’as plus le droit d’avoir le frifri en friche.
Tes mollets sont secs si ta peau est sèche, nervurés si tu as des varices, mais dans tous les cas constellés de petits points de poils qui te font ressembler – et pas que de près – à un gros poulet.
Oui, gros le poulet, parce que les injonctions qui te poussent à maigrir dès fin février n’ont pas encore eu d’effet sur les 8 kilos de gras du cul que tu as pris depuis la rentrée.
Kilos qui s’accrochent à toi comme une combinaison de plongée, mis sans l’effet gainant…
C’est ça, le printemps….
C’est quand tout le monde, au bureau, à la poste, à la caisse ou sur Facebook commence sa phrase par “y fait beauuuuu”, “hein qu’y fait beau ?”, limite en t’engueulant parce que tu ne te pâme pas dans un demi-orgasme en entendant ça.
Si tu as fait mine de réagir positivement à ce constat, ils ajoutent même : “et on annonce du beau pour toute la semaine !”.
Ça, bonnes gens, c’est le springing.
Et c’est un truc qui ment.
Parce que non, il ne va pas faire “beauuuu” toute la semaine.
La semaine, comme toutes les autres d’avant et toutes celles d’après, finira par une grosse drache et une baisse significative des températures dans la partie sud du pays.
Et toi, tu te seras arraché les poils des jambes à la cire tiède pour de toute façon remettre ton jeans et ta chemisette.
T’auras grillé ton capital soleil en une après-midi de barbecue, à regarder cramer une cote à l’os au bruit métallique des canettes de bière qu’on dégoupille.
T’auras passé ton dimanche à chiller au jardin plutôt à rattraper ton retard de lessive et de repassage.
Du coup, ce matin, t’es rougeaud, encore bourré et tu te les gèles en t-shirt chiffonné et sentant des dessous de bras.
T’en rêvais de ça ?
Le printemps, c’est tous les ans et on n’a pas encore inventé une manière efficace d’appliquer l’autobronzant.
Alors du calme, petit excité de la météo que tu es, car on n’est pas à pâques, ni à la trinité et encore moins en juillet !
Le conseil pontifiant et limite embarrassant du Bon Parlage : profitez de chaque jour comme si c’était le dernier. Aimez, qu’il vente, qu’il pleuve ou qu’il fasse 30 degrés.
La semaine prochaine, nous étudierons un nouveau mot qui ne cassera pas votre joie dans l’œuf et ne finira pas par une petite leçon de vérité, mais dans l’attente articulez, car c’est très bon pour ce que vous avez !