Coup de projecteur sur ces jeunes Belges qui font leur place dans les studios des plus grandes griffes internationales.
Les directeurs artistiques belges (ou ayant étudiés dans les écoles belges) des maisons de prestige, on les connaît : Anthony Vaccarello chez Saint Laurent, Raf Simons chez Dior puis Calvin Klein, Julien Dossena chez Paco Rabanne, Kris Van Assche chez Dior Homme, Glenn Martens chez Y/Project... Mettons un instant en lumière ces fabuleux talents qui font la mode depuis l’ombre des studios de création.
- Madeleine Coisne
Styliste junior imprimés chez Christian Dior Diplômée de l’Académie d’Anvers en 2014
Pourquoi une carrière dans la mode ? Je voulais travailler dans un domaine qui me permette de dessiner. Chez Christian Dior, j’ai la chance de pouvoir développer des projets riches et variés. Mais j’aimerais utiliser mes nouvelles connaissances pour évoluer peut-être un jour dans d’autres domaines : l’architecture d’intérieur, ou le design d’objets.
Quelles valeurs avez-vous retenues de vos études ? Chercher plus loin, penser différemment.
Votre premier job ? J’ai été embauchée chez Christian Dior, en temps que stagiaire, dans le département pour lequel je travaille encore aujourd’hui.
Et aujourd’hui ? Je développe avec mon équipe des graphismes qui répondent
aux inspirations du directeur artistique pour les collections de prêt-à-porter femme et haute couture. Ils peuvent ensuite être interprétés en broderie, en jacquard ou en imprimés.
Votre rêve inavoué ? Aller vivre au Japon
et travailler pour un maître céramiste. Après cinq ans d’apprentissage et de silence à ses côtés, la seule chose qu’il me dira sera « c’est bien ».
Votre patte « belge » ? Je ne crois pas avoir une patte belge. Je ne veux être identifiable par aucun style, ni moderne, ni futuriste, ni belge, ni français… Mon but ultime est de créer quelque chose qui ait une âme.
- Julian Klausner
Assistant styliste sur les lignes 1 et 4 chez Maison Margiela. Diplômé de La Cambre en 2016.
Pourquoi une carrière dans la mode ? J’ai toujours observé les femmes et leurs attitudes changeantes selon les vêtements qu’elles portent. C’est l’idée de transformation qui m’a attiré.
Quelles valeurs avez-vous retenues de vos études ? La rigueur et le lâcher-prise. On nous a appris à développer un geste franc, avec une intention forte.
Votre premier job ? Celui que j’occupe actuellement chez Maison Margiela. Avant, j’ai fait des stages, dont une année chez Kenzo, où j’ai énormément appris. L’année dernière, j’ai fait un stage chez Maison Margiela. Toutes ces expériences m’ont beaucoup enrichi.
Votre rêve inavoué ? Dessiner des costumes pour l’Opéra de Paris.
Votre patte « belge » ? Un certain décalage, une pointe d’humour et un deuxième degré d’interprétation. J’aime l’idée que mon héritage belge m’apporte une certaine dualité, entre fantasme et réalité.
- Nicolas Di Felice
Womenswear senior designer chez Louis Vuitton. Diplômé de La Cambre en 2008.
Pourquoi une carrière dans la mode ? C’était une évidence. Je ne me rappelle plus du moment où je me suis réellement posé la question.
Votre premier job après l’école ? Styliste junior chez Balenciaga, après deux mois de stage. J’y suis resté plus de six ans. À l’époque, la maison était encore assez petite, j’ai eu la chance d’être engagé directement comme styliste au studio précollection et non comme assistant. Je faisais pas mal de propositions en 3D, ce qui leur manquait à ce moment-là, je pense. Ensuite, je suis passé
styliste sur le show. Quand Nicolas Ghesquière a quitté la maison, j’ai fait une saison éclair en tant que head sur la précollection, puis rejoint brièvement Raf Simons chez Dior comme responsable tailleur. Mais je suis vite retourné à mon équipe de cœur chez Vuitton, après seulement une année avenue Montaigne.
Et maintenant ? Je suis en charge de toutes les pièces dites « tailleur » (vestes, manteaux, pantalons, cuir, mais aussi les jupes) sur toutes les collections du prêt-à-porter femme.
Votre rêve inavoué ? Mon rêve très avoué serait de reprendre une petite maison, entouré des gens que j’aime. Mais je ne suis pas pressé, et je ne le ferai que dans de bonnes conditions.
Votre patte « belge » ? Ma patte « cambrienne » est un équilibre entre créativité et technicité. Les étudiants de La Cambre semblent avoir autant d’agilité dans ces deux domaines qui, à mon sens, sont indissociables pour être un bon styliste en maison.
- Anaïs Lalu
Styliste maquettiste chez Balenciaga. Diplômée de La Cambre en 2013.
Pourquoi une carrière dans la mode ? Ce n’était pas une évidence : je savais que je voulais être dans la création, le vêtement est venu petit à petit. Tout a commencé devant un miroir, avec de vieilles robes et une paire de mules à talons en bois en similicuir clouté, reçues à l’occasion d’un jumelage avec la Roumanie en 1991.
Quelles valeurs avez-vous retenues de vos études ? Les multiples lectures des goûts. Je suis arrivée en me rassurant dans le gris chiné, je suis repartie en assumant l’amour du fuchsia juxtaposé au vert bouteille, et l’accomplissement d’un projet personnel conséquent.
Votre premier job ? Assistante stagiaire de monsieur Laurent Edmond chez Balenciaga.
Et aujourd’hui ? Je supervise des stagiaires dans le cadre de leur travail avec les designers en volumes, et j’ai aussi mes pièces dans la collection.
Votre rêve inavoué ? Il est avoué : quand je n’aurai plus la niaque pour bosser en studio, je ferai des cartes postales et des déguisements sur mesure. Mon rêve inavoué, il le restera.
Votre patte « belge » ? J’aime l’absurde, passer des heures à faire un truc qui à l’air d’une simplicité infinie, la pluridisciplinarité en inspirations ou en actions. Vouloir, aimer ou ne serait-ce que savoir faire son vêtement de A à Z.
- Casper Werner
Stagiaire chez Calvin Klein. Diplômé de l’Académie d’Anvers en 2015.
Pourquoi une carrière dans la mode ? C’est une passion d’enfance. À l’époque, je voulais fabriquer des chaussures.
Quelles valeurs avez-vous retenues de vos études ? Ne jamais abandonner, travailler dur même quand la difficulté s’accroît.
Votre premier job ? J’ai fait mon premier stage chez Oscar de la Renta avec Peter Copping, puis chez Marc Jacobs Collection. Je viens de commencer un nouveau stage chez Calvin Klein Collection. La vertu de stages si différents, c’est l’incroyable expérience que j’en retire.
Votre rêve inavoué ?
Devenir le directeur créatif d’une grande maison de mode ou lancer ma propre marque.
Votre patte « belge » ?
La discrétion.
- Oriane Leclercq
Senior Designer PréCollection chez Acne Studios. Diplômée de La Cambre
en 2010.
Pourquoi une carrière dans la mode ? J’étais fascinée à l’idée de faire un métier qui me permette d’être à la fois créative et de m’adresser à des gens dans leur vie de tous les jours. Je trouvais cela incroyable que, par le vêtement, on puisse incarner le personnage que l’on veut.
Quelles valeurs avez-vous retenues de vos études ?
Que l’union fait la force. Et j’ai appris à construire mon œil.
Votre premier job ? Assistant designer chez Lutz Huelle.
Votre rêve inavoué ? Mener parallèlement une carrière musicale.
Votre patte « belge » ? Un humour certain, très belge. Un amour pour le vêtement conceptuel, ainsi qu’une envie constante de décaler les codes, d’étonner et de séduire sans artifices.
Julie Dekegeleer
Styliste junior chez Paco Rabanne. Diplômée de La Cambre
en 2008.
Pourquoi une carrière dans la mode ? Pour le plaisir de construire un vêtement.
Quelles valeurs avez-vous retenus de vos études ? La force de travail.
Votre premier job ? Un stage chez Givenchy. Je suis passée chez Cacharel, Balenciaga, Mugler et finalement Paco Rabanne, où je suis depuis plus de trois ans.
Et aujourd’hui ? En binôme avec un assistant, comme chaque styliste, je travaille pour faire exister au maximum la vision de notre directeur artistique.
Votre patte « belge » ? L’humilité est vraiment, de manière générale, une caractéristique belge. Il y a aussi l’implication extrême, mais qui vient sans doute plus de La Cambre que de la Belgique. Une conscience et une approche technique du vêtement.
Isabelle Aout
Directrice de studio chez Jean-Paul Gaultier. Etudiante à La Cambre
de 1993 à 1998.
Pourquoi une carrière dans la mode ? À 15 ans déjà, je demandais à ma mère de m’apprendre à coudre, je transformais des pièces vintage. Je ne voulais pas vraiment être styliste, mais à l’époque je ne connaissais pas le métier que j’exerce aujourd’hui, qui correspond exactement à ce que je voulais faire.
Quelles valeurs avez-vous retenus de vos études ?
La persévérance .
Votre premier job ? Je n’ai jamais été diplômée ! En 1998, j’ai arrêté cinq mois avant la fin de ma cinquième et dernière année de stylisme, parce que j’ai été recrutée chez Maison Martin Margiela, où je faisais mon stage. J’y suis restée douze ans. J’ai commencé comme stagiaire et, très vite, on m’a proposé le poste de chef de produit. La fonction n’existait pas, il a fallu tout mettre en place, c’était une super expérience. Par la suite, je suis devenue responsable de la ligne Artisanal (la haute couture de MMM) et enfin directrice du studio jusqu’en 2010, fonction que j’occupe aujourd’hui chez Jean Paul Gaultier.
Votre rêve inavoué ? Il va le rester.
Votre patte « belge » ? Je parlerais plutôt d’un « esprit belge ». Je travaille avec beaucoup d’humour et de second degré, tout en restant rigoureuse et professionnelle. Nous faisons un métier où il faut savoir s’amuser. On ne sauve pas des vies… Pour faire passer un message, le plus important, c’est la simplicité, la sincérité, et la distanciation. Là, on peut être entendu.