Réparer un vêtement, c’est exprimer son histoire mais c’est également s’inscrire dans un nouveau mode de consommation. Eva Velazquez a fait de cette résurrection le fondement de ses collections et nous emmène dans les coulisses de sa création.

J’ai toujours été une grande passionnée de fringues. À un moment donné, je ne trouvais plus ce qu’il me fallait sur le marché. J’ai voulu aller plus loin dans ma démarche mode et porter des pièces avec des histoires. Je chine des vêtements ancien et utilitaires, ils ont tous eu une fonction précise” explique la créatrice.

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Des vêtements-archives

La créatrice a développé au fil des années deux lignes complémentaires qui répondent à l’esprit ancien qui façonne son univers et qui s’étend de 1850 à 1930. Des pièces fonctionnelles, aux toiles solides à l’épreuve du temps qu’elle remet en circulation pour enrayer la spirale consumériste, mais aussi parce qu’ils ont encore “une histoire à raconter“. Son amour du vêtement confère une poésie touchante à ses collections.

Ancien Atelier

La ligne Ancien Atelier est composée de vêtements chinés en Europe, en Espagne, et aux Etats-Unis. “Ils me trouvent ! Je les lave, je les restaure grâce à des pièces d’archives que je conserve comme des boutons, des fils, des tissus. J’essaie d’enlever les taches, mais pas toutes car elles font partie de l’histoire du vêtement. Je repasse. Dans cette ligne, il y a également des accessoires, des chapeaux, des bijoux.” Les vêtements sortent de l’anonymat et se déchiffrent. Eva refuse de vendre une pièce dont elle ne peut pas expliquer l’utilité. “J’ai par exemple des chemises appelées matinées car utilisées au saut du lit qui datent du début de 20e siècle, un petit col de prof d’école, c’est ce qui fait leur personnalité.

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La collection 

Eva a eu l’idée de faire appel à une patronniste pour créer une collection sur base de modèles anciens qu’elle avait chinés. Grâces aux étoffes, aux boutons et aux fils qu’elle avait accumulés, elle a pu développer certaines pièces en plusieurs tailles, en différentes matières toujours en suivant la même philosophie que la ligne Atelier. “Pour m’adapter à ce nouveau métier, j’ai pu compter sur mon instinct. La matière, la coupe, la couleur, l’histoire, je dois ressentir le vêtement.” Ses couleurs phares sont le gris, le bleu, le beige, le noir, le kaki, sobres et intemporelles. Les clientes qui ont un coup de coeur pour un modèle peuvent le décliner car la créatrice conserve tous les patrons.

Une démarche responsable

L’essence de la marque Eva Velazquez, c’est le retour à la source même du vêtement dans ce qu’il a de plus noble, de brut. Pour cela elle parcourt des kilomètres à travers le monde à la recherche des perles rares. “Lorsque je trouve une pièce, soit je la mets dans Ancien Atelier soit je la donne à ma patronniste qui l’analyse et la décortique en prenant des notes pour en faire des toiles. Ensuite, je prépare mes tissus, mes boutons, mes fils et des couturières en Belgique commencent la production.” Ses vêtements ne sont pas produits à la chaine, Eva a des clientes fidèles pour lesquelles elle prends le temps d’expliquer chaque histoire. La provenance du modèle, son utilité, l’origine du tissu, du bouton.

Eva et son frère Hugo Velazquez

Eva et son frère Hugo Velazquez

La philosophie de la réparation

Forcément, avec des vêtements anciens, la réparation est l’étape obligée si on veut pouvoir les porter. Pour ce processus capital, la créatrice a su bien s’entourer. “Je ne fais pas les réparations moi-même. Beaucoup de vêtements passent par les mains de ma mère, de mon frère Hugo (qui a sa propre ligne) et de ma couturière.” Les plus grosses réparations ? Les boutons. Elle en a une collection pour les différents types de vêtements : nacre, os, corne, émail, cuir… Eva a donc développé une science du raccommodage et nous apprend la différence entre:

  • Le rapiècement: il s’agit d’ajouter de nouvelles pièces de tissus.
  • Le raccommodage : on recoud les trous, les boutons etc.
  • Le retissage : lorsque la maille est endommagée et qu’il faut la recréer.

Concernant les taches, elle réalise ses produits elle-même et utilise du savon de Marseille. “Il est très important d’être exigeant avec les produits qu’on utilise. Il faut bien choisir sa teinturerie. Je conseille la marque ECNE’S, je l’indique d’ailleurs sur l’étiquette. Il faut toujours bien lire les étiquettes (rires) !

Dans le soin du vêtement, chaque étape est importante:

  • Faire sécher les tissus délicats à plat.
  • Repasser toujours à l’envers
  • Repasser sous un drap blanc
  • Les ranger correctement.

La créatrice est généreuse en conseils précieux qui s’inscrivent, bien au-delà de la passion du vêtement, dans un mode de vie éco-responsable qui pose les bases des gros enjeux de la consommation de demain. Pour découvrir ses collections, rendez-vous dans sa boutique-atelier au 56 rue Franz Merjay à Ixelles ou sur son site www.evavelazquez.be.