Je ne suis pas psy mais je passe beaucoup de temps à écouter mes patientes. Un rapport de confiance s’établit et j’essaie de comprendre leurs motivations. On n’imagine pas le nombre de filles qui se forcent à faire l’amour pour faire plaisir à l’autre et pour espérer s’épanouir sexuellement. Elles sont d’ailleurs soulagées quand j’interdis les rapports sexuels pendant un moment. Les hommes ne sont pas des grosses brutes, la plupart d’entre eux sont très attentifs au bien-être de leur copine. Ils sont compréhensifs et acceptent de réaliser les petits exercices à domicile. Mais ils sous-estiment l’intensité de la souffrance. Le problème avec la dyspareunie, c’est qu’un cercle vicieux se met en place. Les femmes qui ont eu mal vont appréhender les prochains rapports, leurs muscles vont alors se contracter, ce qui entraîne des douleurs.

Et la méconnaissance de l’anatomie féminine n’aide pas. C’est important de savoir comment le vagin est fait, ce qu’est un plancher pelvien. Lors des séances de kiné, je leur explique tout ça et je travaille sur le côté mécanique. En collaboration avec un ostéopathe, je pratique la thérapie manuelle : je vais étendre et étirer les muscles grâce à plusieurs techniques. Les patientes sont également suivies par un psy et un sexologue mais aborder le problème sous l’angle “ physique ” les déculpabilise. Si ça ne se passe pas bien au lit, ce n’est pas parce qu’elles sont frigides ou qu’elles ne désirent pas leur mari !

Ce n’est pas un secret, on vit dans une société hypersexualisée. On parle sans arrêt de sexe dans les médias et on a parfois l’impression que l’orgasme s’obtient uniquement par pénétration, en deux minutes chrono. Dans ce contexte-là, ce n’est pas évident de raconter ses problèmes à un pro. Et ce n’est pas un hasard si les cas de dyspareunie sont sous-estimés. Il faut en parler, un rapport sexuel douleureux n’est pas normal et ce n’est pas une fatalité. Quand le plaisir fait mal, des solutions existent. Mais peu de gynécologues sont au courant et il n’y a pas assez de kinés formés à cette problématique. Cela prend du temps de “  se faire la main ”, il faut une certaine expérience avant de pouvoir reconnaître si les muscles du vagin sont trop tendus ou au contraire pas assez. Mais cela me révolte lorsqu’une patiente me raconte tout le chemin qu’elle a fait avant d’atterrir dans mon cabinet. Je rencontre trop de filles à qui l’on a affirmé que leur situation n’était pas très grave. C’est faux. Toutes les femmes méritent d’avoir une sexualité épanouie. »

Témoignage

Claire, 27 ans : « Aujourd’hui, je prends enfin du plaisir ! »

« Pendant des années, j’ai souffert de douleurs chroniques intenses totalement inexpliquées. J’ai été consulter plusieurs spécialistes mais à chaque fois, les réactions étaient très négatives. On m’a dit que le problème venait de moi, que c’était dans ma tête. Les médecins ont tout essayé, j’ai même eu des infiltrations de cortisone mais ça n’a servi à rien. On a finalement découvert que j’avais une maladie gynécologique, l’endométriose, et que la dyspareunie était une de ses conséquences. Impossible pour moi d’avoir des rapports sexuels ! J’étais en couple depuis treize ans et je complexais énormément. Je me repliais sur moi-même et je n’osais pas me confier à mes proches. Je me sentais anormale, j’avais l’impression que toutes les femmes avaient une vie sexuelle incroyable sauf moi.

Je pense que si je n’avais pas rencontré Charlotte Lequeux, je me serais braquée et ma relation de couple se serait peut-être terminée. J’ai de la chance d’avoir un partenaire très compréhensif mais je culpabilisais de ne pas pouvoir faire l’amour avec lui. En pleurs, je lui disais parfois d’aller voir ailleurs. Ca a pris pratiquement un an pour que les douleurs s’estompent, les séances de kiné m’ont énormément aidée. C’est le jour et la nuit, je prends enfin du plaisir alors que je pensais être condamnée à avoir mal. Et un mois après la fin du travail avec Charlotte, je suis tombée enceinte ! Il est essentiel de parler de ce problème et des solutions qui existent. J’espère que cela évitera aux femmes de souffrir pour rien pendant des années. »