Hommage au grand couturier français, aux iconiques robes en bandes élastiquées qui disaient toute son admiration des femmes, et qui nous a quittés cent fois trop tôt le 6 octobre.
Cher, très cher Hervé Léger-Leroux,
J’avais eu récemment l’immense bonheur de deviser avec vous des grandes grâces et des menues turpitudes de la mode. Vous m’aviez dit : « ce n’est pas la mode que j’aime, ce sont les vêtements ». Votre intégrité était d’une autre époque, quand ce n’était pas encore le marketing qui remplissait les vitrines des boutiques. Je vous avais rencontré il y a peu, mais d’une certaine façon, nous nous connaissions depuis longtemps. Nos échanges étaient tissés de confiance, vous aviez la générosité de partager votre mémoire du métier. Les sensibles ont toujours dû construire deux fois plus solidement que les autres pour tenir debout. Vous aviez bâti un empire, inventé un style, aimé les femmes bien mieux que la plupart des designers contemporains. Vous vénériez la féminité, sans jamais tenter de la contraindre ou de la gommer. Vous aviez consacré votre vie à l’élégance, vous qui citiez volontiers Alain Resnais qui vous avait confié un jour : « Paris est en train de devenir un gigantesque camping ». La mode, vous y aviez plusieurs fois laissé votre nom, mais jamais votre courage. Avec mon âme frère, qu’on appelle Monsieur, vous nous croyiez mariés. Poétiquement parlant, vous n’aviez pas tort. Vous compreniez les liens du coeur, vous qui n’avez jamais quitté votre grande sœur. Vos robes en bandages panseront un peu notre chagrin, mais sans vous, de fait, Paris dînera de plus en plus souvent au barbecue.