SHE WALKS IN BEAUTY, l’exposition rétrospective de l’oeuvre du créateur précoce et surdoué – bien entouré aussi – s’installe au MoMu jusqu’au 18 mars.

Après La Cambre de Bruxelles, il devient directeur artistique de la Maison Rochas à 25 ans, quand la plupart des aspirants designers n’ont pas encore fini leurs études. A 29 ans, il prend la tête de la création de Nina Ricci. Puis Theory à 35 ans, et désormais, à l’approche de la quarantaine – ce qui est impossible à deviner d’ailleurs – il relance sa Maison éponyme.

Olivier Theyskens a toujours développé une relation singulière, intense et sensuelle au vêtement. Un travail lié à la poésie, jusque dans les citations d’auteurs classiques, retranscrites de sa main (il a studieusement fait ses lignes pour la scénographie de l’expo). Olivier Theyskens raconte des histoires de tissu, les voix de Lord Byron et de Baudelaire ponctuent son parcours, sous sa graphie, mais avec leur lyrisme propre.

Cette rétrospective est la dernière avant 2020 : fin mars prochain, le MOMU fermera ses portes pour deux années de rénovation. Dernier occupant des lieux tels qu’on les a connus, Olivier Theyskens a créé un dialogue avec l’espace du musée, installant son expo dans les vestiges des précédentes. Le plancher imparfaitement poncé à dessein laisse apparaître les peintures de scénographies d'”Hermès, les Années Margiela“, de Stephen Jones, des Birds of Paradise. Des auras de mode, qui entourent et propulsent ce jeune prodige-là.

Stany Dederen

L’exposition, présentée chronologiquement – ce qui est rare – déroule les collections d’Olivier Theyskens depuis ses débuts, avec son goût immodéré pour le noir rock’mantique, son aisance à s’approprier les matériaux récupérés : une robe en toile jouy faite en réalité d’un rideau, ou ces draps de lin qui deviennent une jupe, jusqu’à ses périodes de direction artistique chez Rochas, chez Nina Ricci, Chez Theory, puis retour chez lui.

On évolue parmi les dessins du créateur dont le pinceau est vif et précis, on s’émeut d’apprendre que ses trois premières collections n’ont pas été produites, car il ne trouvait pas de fabricants répondant à ses exigences de qualité. Un pari risqué quand on est un jeune qui démarre : les acheteurs séduits puis déçus de ne pouvoir commander auraient pu se lasser. Mais ils ont attendus.

Tout le long de sa carrière est émaillé d’agrafes, grandes, petites, apparentes, qui attachent et empiècent des silhouettes aussi romantiques que  Frankensteiniennes. Des scarifications du vêtement sur le corps, osées par celui qui est arrivé juste après la première génération des créateurs belges et le grand choc des Anversois, plus conceptuels. Il arrive donc en perturbateur, ne se laisse pas cataloguer. Car il joue de l’hybridation des pièces, insuffle du surréalisme dans le prêt-à-porter. Il adapte le corset en cocon-capuche, les guêpières (inventées par Marcel Rochas) deviennent des robes du soir ; Olivier Theyskens casse les crinolines par le traitement technique d’un manteau futuriste. Si ses références historiques sont fortes, elles ne sont jamais littérales. C’est du prêt-à-porter, mais c’est de la Couture. On découvre des dos qui valent toutes les faces A du monde, des profils qui tranchent, c’est sublime, et c’est la revanche sur tout ce qu’Instagram détruit. She Walks in Beauty, suivez-là.

 

(Merci à Lydia Kamitsis, co-curatrice de l’exposition, pour ses inestimables décryptages).

 

En pratique :

SHE WALKS IN BEAUTY
12/10/2017 – 18/03/2018
Nationalestraat 28, 2000 Antwerp, Belgium
T +32 3 470 27 70 | F +32 3 470 27 70 |
info@momu.be
www.momu.be

HEURES D’OUVERTURE
· Mardi-dimanche, 10h-18h, Nocturne le premier jeudi
du mois, 10h-21h, derniers billets à 17.30h.
· Fermé le lundi, 25 & 26 décembre et 1 & 2 janvier.

Stany Dederen