L’éthique de l’étiquette : HONEST BY Y/PROJECT

Mis à jour le 19 novembre 2018 par Elisabeth Clauss
L’éthique de l’étiquette : HONEST BY Y/PROJECT

Bruno Pieters a choisi de rompre avec le système de production habituel de la mode, avec sa marque Honest By, fondée sur le respect des processus de production, et sur la transparence. Le plus « Honestement » possible. Glenn Martens dirige la maison parisienne Y/Project qui secoue les codes de la mode contemporaine, invite la Renaissance dans une innovation Couture, transcende les genres et les époques. Ensemble, ils sont les Maîtres Flamands de l'éthique esthétique.

 

Bruno Pieters / Glenn Martens

 

Ils lancent une collection unisexe de 6 pièces basées sur les créations récentes de Y/Project. Chaque pièce est fabriquée en France avec des matériaux et procédés de fabrication durables. Une politique de transparence est appliquée pour chaque élément de design (bouton, doublure, étiquette) directement traçable jusqu’à ses fournisseurs.

Depuis 2014, Glenn Martens dirige le studio de création de Y/Project. Des collections pointues et désirables - Rihanna lui commande ses tenues de concert depuis plusieurs saisons. Il a rencontré Bruno Pieters, son prof, ami et mentor, à l'Académie d'Anvers. Il l'a d'ailleurs fait poser dans sa campagne PE17, avec son entourage proche. A travers Y/Project, il injecte de la lumière, de la couleur et de l'humour dans une mode qui cherche de nouveaux repères.  La maison mêle décalage sociologiques, critères crypto-médiévaux, streetwear, Couture, tous les univers de la mode. « Nous lions plein d'histoires avec un fil rouge absurdité. » Il y a dans ces silhouettes un fabuleux second degré, la force de la distanciation à la belge. Résultat : la presse est hystérique, les clients en nombre exponentiel, et les points de vente se multiplient. Y/Project intrigue et attire, mixe les sexes, les époques et les matières, conscient d'une ère où les barrières se floutent. Glenn Martens s'adresse à une génération Y, et gère son studio comme un chef de famille : « j'y passe mes week-ends, parce que c'est plus grand que chez moi. Sans la moindre concertation, mes collaborateurs me rejoignent, ils s'installent à leur table, boivent une bière, regardent un match. Je crois que chez nous, les gens sont heureux. » Les fans de mode décalée et prescriptrice, aussi.

Quant au cursus de Bruno Pieters, il aurait pu être classique : diplômé de l'académie d'Anvers, après un passage chez Maison Martin Margiela et Christian Lacroix, il entre en 2009 chez Hugo Boss comme directeur artistique de Hugo. Dès lors, il s'embarque dans un rythme soutenu de douze collections annuelles : « J'avais l'impression d'avoir fait le tour de mon métier, et je ne me reconnaissais plus dans l'industrie. » Il prend deux années sabbatiques, part se recentrer en Inde. A Dehli, une affiche change le fil de sa création : « be the change you want to see in the world ». « Avant, je n'étais pas prêt à l'entendre. Mais à ce moment de ma vie, le message est passé. Et au lieu de continuer à me plaindre que la mode est devenue malsaine ou malhonnête, au lieu d'être désabusé d'être devenu un businessman alors que j'avais fait des études pour être créateur, j'ai décidé de faire la mode que je voulais acheter. »

En 2013, Bruno Pieters lance Honest By,  une enseigne 100 % transparente. Il crée des pièces épurées, fidèles à la philosophie anversoise. Sa griffe s'inscrit en opposition au système traditionnel : ici, l'étiquette fait partie des ornements, et affiche sans aucune ambiguïté les sources des matières premières (avec adresse du fournisseur!), les infos de production écologiques (Honest By ne travaille qu'avec GOTS - Global Organic Textile Standard - jusqu'à préciser si un vêtement est « bio » et « vegan », « skin friendly…)

Honest By Y/Project marque en réalité le retour de Glenn Martens au projet Honest By, dont il avait pensé la première collection en 2012. La collection se compose de 6 pièces choisies par Bruno Pieters et reproduites dans des tissus évidemment certifiés par le Global Organic Textile Standard (GOTS). Le trench-coat en gabardine taupe, qui illustre le talent de Martens pour les draperies et les coupes non conventionnelles, présente des épaulettes allongées pour une silhouette géométrique large, une technique reprise dans un col roulé drapé en jersey de coton. On retrouve le caractère utilitaire et pragmatique des pièces Y/Project dans la chemise double, signature de la marque, ici en coton rayé bleu ciel, et dans une jupe en cupro à taille élastique avec jambe de pantalon détachable. Un sweat-shirt en jersey de coton noir se prolonge en une longue robe et un jean en denim bleu est retroussé sur le genou, retenu par des boutons de manchette militaires français du XVIIIe siècle. Ces deux pièces suivent le moda operandi de Y/Project qui incorpore des références historiques à ses pièces urbaines et contemporaines.

Selon Bruno Pieters, “Y/Project est déjà une marque très responsable. Glenn a construit son équipe avec une toute nouvelle génération de personnes, très fidèles, très loyales. Il est capable de prendre le meilleur de ce qui lui est offert et de se l’approprier. Glenn a toujours montré de l’intérêt pour ce que je fais, il est aujourd’hui déjà très conscient des enjeux environnementaux. Pour la collection Printemps-Été 2018 déjà, il n’y avait pas de cuir dans son défilé.” Glenn Martens de son côté déclare “ je suis Honest By depuis son lancement. Pour moi, cette marque de luxe a toujours été l’une des plus novatrices de l’industrie. Beaucoup de jeunes marques prétendent vouloir changer la mode ou secouer l’industrie. Mais seul Honest By a remis en cause l’essentiel en abordant ce qui compte vraiment.” Et la beauté pure en fait partie.

 

Photos : Arnaud Lajeunie