C’est qui ce clown des HR qui se prend pour ma mère ?

La question que s’est posée Kim, 29 ans, directrice artistique dans une startup digitale, quand elle a vu arriver d’un très mauvais œil une « Happy Office Manager » dans la boîte. « Nous ne sommes qu’une quinzaine, on a nos habitudes. Il y avait eu un turnover important avec quatre démissions de seniors en six mois, mais je ne voyais pas le problème (le problème c’est que perdre des employés régulièrement coûte cher, non seulement d’un point de vue budgétaire mais aussi d’un point de vue de la réputation et de la performance de la société, NDLR). Je n’ai pas compris pourquoi cette femme – un peu plus âgée que nous, un peu hystéro et trop souriante – venait mettre son nez dans notre fonctionnement. J’ai même complètement boycotté ses initiatives et demandes, histoire qu’elle “ redescende ” un peu. Je ne lui faisais pas confiance et je ne lâchais rien lors de nos entretiens individuels hebdomadaires (15 minutes censées “ mesurer notre niveau de bien-être et développer des solutions concrètes ”, bullshit).  

Puis je suis tombée enceinte… J’étais crevée, je n’arrivais plus à assurer mes horaires (plutôt trashs, environ 50 heures par semaine au lieu des 38 prévues par mon contrat et quasi pas de récup’. Une tradition dans mon secteur d’activité). Et là, j’ai compris à quoi elle servait.  

Elle m’a programmé un planning sur mesure, m’a donné des clés pour réussir à organiser les deux jours de télétravail hebdo qu’elle m’avait accordés. J’avais peur de bosser depuis la maison et de me déconnecter des projets, d’être hors du coup. Alors on a convenu ensemble que je déjeunerais chaque midi par vidéoconférence avec mes collègues présents au bureau, histoire de faire le point et de ne pas me sentir isolée. Et ça a marché.  

Je n’ai jamais été plus productive et motivée ! On a choisi ensemble le gars qui m’a remplacée pendant mon congé de maternité. Elle m’a laissé lui faire signer son CDD. Ça m’a rassurée. J’ai eu l’impression de garder le contrôle et mon retour au bureau s’est super bien passé. On a aussi aménagé mon temps de travail pour que ma vie ne se résume par à une succession de dodo-boulot-crèche-dodo. Du coup, je bosse quatre heures le samedi matin sur mes tâches administratives, tranquille chez moi, mais je suis Out Of Office chaque jour de la semaine à 16 h 30 tapantes. Sans elle, j’aurais claqué la porte, pris un mi-temps alimentaire et paniqué tout le temps… »  

Ça fait un peu rêver… Presque autant que quand Nicolas, 31 ans, employé dans le secteur musical, confie que ses collègues et lui ont droit à cinq « demi-journées gueule de bois » par an.  

« Dans ma team, on aime faire la fête. Il arrive qu’on se tape une méga gueule de bois qui nécessite qu’on ne vienne pas au bureau. Plutôt que de favoriser l’hypocrysie et l’invention d’excuses à deux balles, le happy manager a instauré le “ congé de lendemain de veille ”. Cinq demi-jours annuels qui ne sont ni des congés légaux, ni des récupérations, mais bien des heures “ offertes ”. On peut aussi les utiliser pour rester au lit, traîner, faire des courses. Le truc cool, c’est qu’on ne doit pas justifier la cause de l’absence. On doit juste prévenir à temps et veiller à ne pas pourrir un rendez-vous important. 

Du coup, comme on se sent respectés et en confiance, on fait plus attention, on fait moins les cons… On ne veut pas perdre cet avantage, parce qu’on sait que ce n’est pas un acquis. Si on abuse, c’est fini. »