Sept ans sans calèche, sans robe à un demi-million et sans Union Jack raidis à la bière flottant aux fenêtres fleuries des pubs. Depuis Kate & William, sages et sans histoires, on dépérissait. Heureusement, le tempétueux cadet, Harry, épouse une actrice américaine divorcée. God Save them all.
Nous accomplissons cinq heures de train dans la campagne et sous la pluie, pour arriver à Windsor, mini ville adorable agencée comme Disneyland, avec un château à tours à ma gauche, et une artère commerçante à ma droite. Dans les vitrines, des tasses à l’effigie des heureux fiancés. On est au bon endroit.
Un mariage organisé « à la maison »
Le 19 mai, ceux-là ne paralyseront pas Londres avec leurs épousailles et écrans géants à Hyde Park : Meghan et Harry convoleront en petit comité, à peine huit cent personnes à la chapelle, mais si vous souhaitez vous approchez de la sortie de l’office pour les apercevoir d’un peu plus près qu’à la télé, vous pouvez vous offrir un billet de loterie (bénéfice reversés à des charities, vous pensez bien).
A Windsor, on cultive l’intimité : deux cents personnes vivent et travaillent au château, dont vingt quatre chevaliers-militaires, et « fréquentent » la famille royale au quotidien. Ou presque : la Reine Elizabeth II passe ici ses week-ends, mais son bureau, c’est Buckingham. Oui, c’est plus chic que la cafète de votre comité d’entreprise. Mais c’est moins bien chauffé, et la Reine a plus de responsabilités que vous. Je pénètre dans le château, où même si tout le monde est occupé aux préparatifs, personne ne lâche aucune info : rien ne sort de Windsor. Certes, il y a un donjon, des douves, une salle rouge, une salle verte, une salle blanche et une maison de poupée géante où même le vin dans les mini bouteilles est buvable et millésimé : Meghan a annoncé qu’elle renonçait à sa carrière d’actrice, mais ici, elle est pressentie pour jouer Madame Pervenche dans un remake glamour – et privé – de Cluedo. Car pour devenir princesse, et il est impératif de prévenir toutes les petites filles du monde, c’est n’est pas libérée-délivrée tous les jours. L’actrice, découverte dans Suits, va devoir se tailler un costume sur-mesure dans l’aventure. Cela dit, Diana, Margaret, et beaucoup d’autres avant elles, avaient essuyé les plâtres de la rigueur maritale monarchique. Meghan est américaine, roturière, et divorcée. Je pose plusieurs fois la question autour de moi, à Windsor : tout le monde s’en fiche, le monde a changé. Lorsque en 1938 Édouard VIII, alors Roi du Royaume-Uni, des dominions britanniques et Empereur des Indes, avait abdiqué pour pouvoir épouser Wallis Simpson, c’était moins bien passé. Notons que cette Américaine-là avait déjà divorcé deux fois, était soupçonnée de fréquenter des salons d’espions, et cultivait de solides amitiés avec des dignitaires nazis. Rien à voir avec la douce Meghan Markle, fille métis d’une prof de yoga et d’un directeur de la photo, qui a grandi en Californie, sur le plateau de Mariés Deux Enfants. Couple moderne, Harry et Meghan ont quatre ans d’écart, au profit de la fiancée. Encore un bon signe : autrefois dans la noblesse et la haute bourgeoisie, une épouse un chouilla plus âgée que son mari faisait partie des bonnes pratiques, pour la pérennité des familles (plus d’expérience, plus de bon sens).