Habitons-nous sans le savoir au-dessus d’une mine inépuisable de trésors ?
C’est la question qui me brûle les lèvres alors que je déambule en compagnie de Derek dans un couloir de sculptures en plâtre. La poussière s’accumule sur des rangées et des rangées de David de Michel-Ange, la moitié d’une Vénus de Milo et autres lions inspirés de la Renaissance. Sous la lumière chevrotante d’une lampe TL, je devine une montagne de fragments en plâtre d’où émerge une partie du visage d’un David : le résultat du déménagement maladroit de la collection de reproductions en plâtre de Léopold II par des prisonniers de guerre allemands chargés de nettoyer les lieux en 1914. Car c’est bien là que nous nous trouvons : dans l’atelier de moulage du souverain belge qui avait décrété au milieu du 19e siècle que tous les musées et académies de Belgique devaient posséder des copies de sculptures mondialement célèbres. Notre roi barbu trouvait aussi insuffisant le nombre de bustes de sa royale personne, comme en témoigne les 50 exemplaires au regard fixe croisés dans l’allée 11. Rien de comparable avec les rayons d’un supermarché !
« Mais pas un chat dans ces lieux pourtant accessibles au public. À juste titre a priori. Ils se cachent derrière de vieilles portes peu avenantes qui n’ont même pas besoin d’un écriteau dissuasif Accès interdit. Pourtant à peine ces portes franchies, on arrive au pays des merveilles. Je ne me qualifierai pas d’explorateur urbain car je ne mets pas les pieds dans des lieux prohibés mais quand rien, pas même un chien de garde, n’empêche l’accès, je n’hésite pas à partir en reconnaissance. Vous ne ferez donc rien de mal ni de dangereux en visitant les adresses répertoriées dans mon bouquin. Curieux de nature, mon attention est toujours en éveil. C’est fou le nombre d’endroits accessibles à tous qui sont déserts. En Belgique, il suffit de se balader et d’observer pour tomber sur quelque chose d’intéressant. Si j’osais, j’ajouterais que j’ai compilé dans mon ouvrage 365 pépites découvertes par le plus grand des hasards et que la Belgique en recèle bien d’autres. Bruxelles et Anvers sont des villes propices à l’exploration, tandis que l’Ardenne séduit par son charme envoûtant. Bruges se prête moins à cet exercice car tout y a déjà été exploité. De nombreux explorateurs jettent leur dévolu sur des métropoles comme Londres ou Paris, mais la Belgique est tout simplement fascinante et étonnante. »