On lui doit la création de la ligne féminine de Kith, le temple du streetwear new-yorkais. Après un passage chez Complex et Supreme, elle est désormais à la tête de sa propre marque, Sporty & Rich qui incarne un art de vivre qui mélange les codes « street » et luxe. Avec plus de 270 000 followers sur Instagram, elle est une des figures du streetwear d’aujourd’hui. Nous lui avons demandé ce qu’elle en pensait.
L’interview d’Emily Oberg
Streetwear, sportswear, quelle est la différence aujourd’hui ?
Il n’y a plus vraiment de différence si ce n’est l’aspect performance. Ils se sont tellement entrelacés qu’ils sont devenus interchangeables. Je dirais que la différence principale, c’est que le sportswear doit être (et est) traditionnellement « technique ». Pour faire du sport, il faut une technologie qui nous permet de performer au mieux. Alors que le streetwear est plus une question de mode que de fonction.
Du coup, quelle est votre propre définition du streetwear ?
Le streetwear est tout ce qui dérive de la culture de la rue. Skateboarding, graffiti, hip-hop, ce sont les fondations du streetwear, c’est ce qui inspire si fortement le style aujourd’hui.
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Pensez-vous qu’il ait perdu sa « street credibility » ?
Je pense que dans une certaine mesure, oui. Toutes les marques pointues et de luxe donnent leur propre version du streetwear, ce n’est pas forcément une question de crédibilité, c’est juste différent. Vous ne devez pas être skateboarder ou rappeur pour apprécier l’esthétique du streetwear : les gens peuvent aimer ce qu’ils veulent. Cela ne doit pas avoir d’importance.
Comment ressentez-vous cette évolution du streetwear de la rue aux catwalks ?
Je trouve ça cool qu’une communauté et un style considérés comme niche et underground deviennent « mainstream » et adorés par les labels de luxe. Personnellement, j’adore mélanger la mode pointue et la mode de la rue. Alors quand les marques de luxe créent leur propre streetwear, c’est en quelque sorte le mix idéal.
Qu’en est-il du streetstyle ? Est-ce encore une source d’inspiration pour vous ?
Oui, je pense que le style viendra toujours du bas vers le haut. Les gens ont des goûts et des idées sur la manière de s’habiller tellement différents que la rue reste le meilleur endroit pour s’inspirer.
Vous avez votre propre marque, Sporty & Rich. Éditions limitées, pièces minimalistes, quel était votre désir avec cette marque ?
Je considère ma marque avant tout comme un magazine. Le label de vêtements est un support qui vient soutenir la publication. C’est très cher à produire, je fais tout moi-même. J’ai donc créé les vêtements pour faire connaître le magazine et m’aider à construire une marque globale.
C’est vrai que Sporty & Rich va au-delà des vêtements, c’est aussi la promotion du sport, d’un style de vie sain, de la richesse du bien-être. Pensez-vous que les marques doivent avoir un sens et refléter un certain art de vivre ?
Je pense que tout doit avoir un sens et un but plus profond, sinon, quel est l’intérêt ? Il y a cet auteur brillant, Simon Sinek, qui insiste sur le « pourquoi » de ce que l’on fait. Selon lui, il faudrait toujours se demander pourquoi on fait les choses afin de donner une signification a tout ce que l’on entreprend. À ce stade, le monde n’a plus besoin de marques de streetwear ou de marques en général, car nous avons déjà trop de tout. Donc si vous commencez un nouveau projet, vous devez avoir un but derrière qui va au-delà de gagner de l’argent ou développer une marque cool (c’est tellement ennuyeux). La presse est en train de mourir depuis quelques années, mais c’est une forme d’art si particulière que je détesterais qu’elle se perde ou qu’elle soit abandonnée, c’est pour ça que j’ai créé Sporty & Rich.