Contre les coups de soleil, on avait du SPF 50+ Mais contre les coups d'amour, les coups d'je t'aime et les coups au coeur, on n'avait rien pour se protéger. Heureusement, le nouveau livre d'Esther Perel est arrivé.
Psychothérapeute de couple et conférencière, belge quoique expatriée à New York (une infidélité au Plat Pays?) elle a publié en 2007 son best seller « L’intelligence érotique ». Ses TED sont suivis par des millions de spectateurs pendus à la sagesse de ses propos. Dans son nouvel opus, « Je t’aime, je te trompe » (Robert Laffont), elle explore les turpitudes de l'infidélité, subie ou provoquée. Esther déplace la réflexion sur l'amour plutôt que sur le reproche, et rappelle qu'on peut avoir plusieurs histoires d'amour… avec la même personne. La vie amoureuse est loin d'être un long fleuve tranquille, la chaleur de l'été aidant, voyons comment gérer le débordement de ses différents affluents.
Rentrant plus tôt de la plage, vous découvrez qu’il vous trompe. Vous faites quoi ?
Avant d'avoir lu le bouquin : Vous creviez les pneus de sa voiture (puis vous alliez faire les courses en bus et en pleurant parce que vous n'en aviez qu'une pour deux). Vous ne disiez rien, mais vous ajoutiez une cuillerée du contenu de la couche du bébé à son café. Vous appeliez toutes vos copines pour être consolée, y compris les deux qui savaient bien que vous étiez cocue, puisqu'elles avaient déjà profité de la flexibilité morale de votre conjoint. Bref, vous partiez en sucette, et pas au sens propre, sinon vous n'auriez jamais eu de problème.
Maintenant : Grâce à Esther Perel, on descend de la tour parce qu'on réalise qu'il n'existe pas de réaction unique à cette découverte épineuse. « Si c'est la sixième fois, on peut agir de façon plus radicale (incluant le jet de vêtements par la fenêtre, NDLR), si on n'a jamais réussi à exprimer clairement qu'il y avait des limites aux bornes. Mais en tout cas, on n'agit pas sur un coup de tête, on ne prend pas de décision hâtive. Il importe, pour soi, de ne pas mélanger nos sentiments à propos de cette histoire d'amour, et nos sentiments liés à la découverte de l'infidélité ». En d'autres termes, on ne jette pas le bébé avec l'eau du bain. « On ne balance pas 25 ans de vie commune pour une infidélité ! On s'interroge sur la signification de cet événement. Et surtout, on ne passe pas la nuit à fouiller le téléphone de l'autre, ça ne sert à rien. » Il faut être honnête avec soi - ça en fera déjà un des deux - et on fait son examen de conscience : si on repoussait toutes ses tentatives de rapprochement sensuel depuis des mois, il ne faut pas non plus faire la biche effarouchée. Un homme qui se sent rejeté, voire humilié en société (les petites remarques assassines devant les amis, vous voyez?) ça peut pousser à être valorisé ailleurs. « Cela ne signifie pas qu'on est responsable, mais on peut se demander si le contexte qui a mené à l'infidélité ne s'est pas construit à deux ». Inutile cependant de s'auto-flageller, car selon la psy : « parfois, on n'y est vraiment pour rien. Il faut chercher du côté de l'histoire du partenaire, des revanches qu'il avait à prendre sur une enfance castratrice, par exemple. »
Le bon réflexe : Ne pas se jeter sur le « quoi ? », mais sur le « pourquoi ? ». Et, il va de soi, sur un énorme pot de glace.
La trahison est double : la maîtresse, c’est votre meilleure amie !
Avant d'avoir lu le bouquin : Vous flinguiez le brushing californien de l'une, et rappeliez son habituelle impuissance à l'autre. Ou inversement. Vous vous sentiez abandonnée et plus bas que terre (alors que ce sont eux, les vers solitaires). Vous remettiez votre jugement en question et… bon, ok, ça, c'était justifié.
Maintenant : En aucun cas on ne s'enferme dans le silence, l'isolement, le secret ou la honte. On doit retrouver ce qui nous valorise, qui va nous permettre de reconnecter en nous avec ce qu'on avait perdu de vue. Ce qui nous fait sentir qu'on est quelqu'un de bien alors qu'on se sent comme une déjection vintage (on ne peut pas écrire « vielle merde » dans ELLE). C'est le moment de revoir une personne qui pourra tenir notre ego à l'abri dans sa main pendant qu'on s'écroule. « La double trahison, c'est d'autant plus douloureux qu'on a la sensation de perdre plusieurs personnes en même temps. L'essentiel est de trouver des oreilles bienveillantes, qui nous écouteront hurler, pleurer, sans nous assommer de conseils. Dans cette situation, on a besoin d'espace pour vider ses tripes. Et ce ne sera pas forcément quelqu'un de proche : une relation du « deuxième cercle » pourra parfois mieux accueillir sans se projeter. » Et quand tout sera tassé, on ne reverra pas chaque fois notre histoire dans son regard...
Le bon réflexe : Se raccrocher à des personnes et des activités valorisantes, pour vivre autre chose que du rejet. Sortir, danser, boire un verre avec des copines. Même si on n'en a pas envie. Surtout, si on n'en a pas envie.
Il rampe. Vous pardonnez, ou pas ?
Avant d'avoir lu le bouquin : Vous décidiez de passer au dessus et de le reprendre dans le lit conjugal (par trouille, amour, dépendance, sagesse profonde ou manque, allez savoir), mais ayant agoni votre entourage de complaintes pleurnichardes pendant des mois, vous le faisiez en chmet. Lit conjugal que, pour conjurer l'injure, vous aviez imprégné des parfums d'un autre, parce que chacun son tour. Immature, mais savoureux.
Maintenant : Esther Perel tempère (c'est son job de thérapeute, en même temps) : « Au début, on n'a pas besoin de pardonner quoi que ce soit. La question ne se pose pas en ces termes. Pour commencer, il importe que la personne qui vous a blessé exprime remord et culpabilité de vous avoir fait du mal, même si elle n'éprouve pas de culpabilité par rapport à l'infidélité. Ce n'est pas la même chose. Sans reconnaissance de la blessure infligée, il n'y a pas de pardon possible. Ensuite, l'autre doit démontrer son désir profond de vouloir être avec vous ». Il jure qu'il ne recommencera jamais ? Ça ne vaut pas le clou à lui planter dans la carotide. « On doit sentir qu'on compte, qu'on a une valeur à ses yeux. Le pardon pourra se faire dans un contexte global, certainement pas dans une promesse ». Esther Perel souligne qu'il y a des choses « qu'on ne doit, ni ne peut pardonner. Passer l'éponge trop vite, c'est aussi bloquer sa colère et exprimer sa peur d'abandon ». D'autant plus contre productif que certains pourraient interpréter un pardon trop prompt comme une autorisation de remettre le couvert.
Le bon réflexe : Mûrir, et accepter l'idée très adulte qu'on peut ne pas pardonner, et rester ensemble. Si.
C’est vous qui êtes faite choper !
Avant d'avoir lu le livre : La tête sur l'échafaud, vous niiez, même la culotte accrochée au lustre, même la vidéo sur l'intranet de la boîte.
Maintenant : « Avouer dépend des conséquences que l'on risque de devoir assumer ». Il y a des coins du monde où a intérêt à être convaincante quand on dit « j'ai utilisé cette capote pour faire des bombes à eau », lorsque notre mari trouve la preuve déballonnée de nos galipettes au fond de la poubelle. Aux Etats-Unis par exemple, une garde exclusive des enfants peut dépendre de qui s'est fait choper la main au panier. Mais prudence : nier obstinément alors qu'on est encore au lit, les cheveux et l'amant défaits, ça va juste énerver le légitime. Là encore, on ramène la discussion au « pourquoi ? » et non au « quoi ? » « C'est souvent à ce moment-là que pour la première fois, on réalise la portée des conséquences de nos actes sur les émotions du conjoint ». Reste, pour limiter les dégâts, à reconnaître l'évidence des faits, en évitant les explications désordonnées.
Le bon réflexe : Surtout, ne rien promettre (parce que pour le volet « assistance et fidélité », on vient de foirer). Laisser retomber l'émotion, puis expliquer ce qui nous a poussée dans les bras d'un baraqué plus jeune et plus vif (ne pas dire que la faim justifiait les moyens) : « ça fait des années que je te demande de l'attention, de ne pas passer toutes tes soirées dans ton GSM, etc... » Autrement dit, chacun doit revoir sa copie.
En cas de récidive :
Avant d'avoir lu le bouquin : Vous engagiez un homme de main pour faire disparaître le corps.
Maintenant : On se demande, rationnellement, si on peut vivre avec un homme qui suit sa quéquette comme un GPS sur la longue route des errances du désir. Certaines ont fait ce choix. Dans votre cas, mettez en balance ce que vous gagnez à le jeter dehors (avec ses vêtements et par la fenêtre), et ce que vous perdez (le revêtement du trottoir en bas). Si vous n'arrivez pas à choisir, lisez le livre. Ou frappez-le avec. C'est bien aussi.
Le bon réflexe : « En tout cas, ne restez pas dans une relation avilissante. Pour réparer et poursuivre une relation mise à mal, on doit sentir qu'on a le choix, même si on doit réagir à une situation qu'on a ni provoqué, ni pu éviter. » Et puis, restez fidèle à vous-même.