En vingt ans, le programme L’Oréal-Unesco « For Women in Science » (FWIS) a déjà récompensé plus de 3000 chercheuses. Et pour que la jolie clique de scientifiques s’agrandisse, la Fondation fait aujourd’hui appel aux mecs… Rencontre avec sa directrice générale, Alexandra Palt.
L’origine de l’initiative « Men for Women in Science » ?
« Cette année, le programme L’Oréal-Unesco Pour les Femmes et la Science fête ses vingt ans, c’était l’occasion de faire un bilan. On a démarré petit, c’était un prix pour récompenser quatre chercheuses, aujourd’hui, c’est devenu un vrai programme international qui implique 117 pays différents et 50 partenaires scientifiques. Mais si l’impact de notre programme est indiscutable, on s’est rendu compte que les chiffres bougeaient trop lentement avec les années. Actuellement, les femmes ne sont encore que 11 % à occuper des postes à responsabilité dans le secteur scientifique en Europe. Il fallait que l’on réfléchisse à une stratégie différente pour que la situation évolue et on a eu l’idée d’impliquer les hommes. Ce sont eux qui occupent la plupart du temps les jobs de pouvoir. S’ils s’engagent à soutenir les filles, ils peuvent contribuer à accélérer le changement. »
Des mesures concrètes ?
« L’engagement des hommes prend plusieurs formes. Ils peuvent par exemple vérifier qu’il y ait autant de candidatures féminines que masculines lorsqu’un concours est organisé pour un poste ou une bourse. Ils peuvent aussi recommander des candidates pour l’un ou l’autre prix et s’assurer que leur collègue soit bien citée dans les publications scientifiques. Beaucoup de femmes n’ont pas été reconnues pour leurs travaux dans le passé. Notre but, c’est d’accélérer le changement vers une science plus inclusive, plus féminisée et plus efficace en créant une coalition d’alliés masculins. Tous les chercheurs sont d’ailleurs invités à signer notre charte d’engagement pour permettre aux femmes d’exprimer pleinement leur potentiel. »
La réaction des hommes ?
« Très positive. On a instauré un système de mentors pour que les jeunes boursières puissent progresser beaucoup plus vite dans l’organisation où elles se trouvent. On a envoyé des mails pour chercher des hommes qui seraient intéressés et on a été agréablement surpris. En quarante-huit heures, on avait tous nos mentors ! En science, l’équilibre hommes-femmes est une préoccupation partagée vu que les répercussions sur l’innovation sont majeures. On a rencontré beaucoup d’hommes engagés, qui estiment qu’une présence féminine dans leur équipe est évidente et surtout enrichissante. La diversité amène davantage de créativité. Beaucoup de chercheurs agissent déjà pour l’égalité mais ils n’en parlent pas forcément. Le but de notre programme, c’est aussi de rendre leurs actions plus visibles. »
Une avancée positive ?
« 25 hommes scientifiques de premier plan se sont déjà engagés pour l’initiative Men for Women in Science. On retrouve le mathématicien Cédric Villani par exemple, Gilles Bœuf, Professeur à l’Université de la Sorbonne ou encore Etienne Klein, Directeur de recherche au CEA (Commissariat à l’Énergie atomique et aux Énergies alternatives). »