La série d’exemples montre bien à quel point l’intelligence artificielle a besoin des femmes.
Mais les attirer dans ce domaine est loin d’être easy. On le sait, le secteur de la tech est ultra masculin et l’évolution des mentalités extrêmement lente. « Chaque année, il y a une quinzaine de personnes qui sortent du master en intelligence artificielle chez nous mais les filles sont toujours très peu nombreuses », explique Hugues Bersini, professeur d’informatique à Solvay et Polytech et directeur de l’IRIDIA, le laboratoire d’intelligence artificielle de l’ULB qui a presque 30 ans d’existence. « En informatique, elles représentent environ 10% des étudiants. Comparativement à mon époque, il y a un tout petit peu plus de femmes qui font Polytech mais la proportion reste très faible. Et elles ont plutôt tendance à prendre l’option ‘biomédical’ ».
Et pourtant, historiquement, les filles assuraient le lead en la matière. Le premier algorithme a été créé par une femme, Ada Lovelace, comtesse et programmeuse (rien que ça). Le logiciel de bord de la mission Apollo, qui a envoyé les hommes sur la lune, est l’œuvre de Margaret Hamilton et c’est à Hedy Lamarr que l’on doit les bases du wifi. L’actrice hollywoodienne, surnommée « la plus belle femme du monde », n’était pas qu’une jolie plante. « Le secteur était à l’origine très féminin mais il s’est masculinisé dans les années 80. Les premiers ordinateurs personnels ont commencé à être commercialisés et les hommes se sont emparés de ce marché à haut potentiel financier. Les femmes, elles, ont été gommées de l’histoire », raconte Loubna Azghoud, coordinatrice de Women in Tech, une plateforme qui encourage la mixité dans le domaine des nouvelles technologies.
Pour expliquer le manque de femmes dans la science en général, les mêmes constats reviennent régulièrement.
Dans notre esprit, un programmeur, c’est souvent un geek pas très sexy, avec sa casquette à l’envers et sa part de pizza froide. Les stéréotypes de genres sont bien ancrés et les role models féminins sont plutôt rares, même si Mattel vient de sortir une Barbie « ingénieure en robotique »… L’influence culturelle joue aussi. « En Thaïlande, 53% des chercheurs en Science, Technologie et Innovation sont des femmes. Là-bas, ce n’est pas considéré comme un métier d’hommes. Ce n’est pourtant pas le cas partout en Asie : en Corée du Sud, elles ne sont que 18% et au Japon, 15% », analyse Yves Deville. Le prof de l’UCL milite d’ailleurs pour qu’on intègre un cours d’introduction à l’informatique en secondaires chez nous. Le but ? Développer le regard critique des citoyens face aux nouvelles technologies mais aussi attirer davantage de filles.