Doigté habile, accessoires polissons, sex-toys électrisants… Et si les hétéros se laissaient envahir par le plaisir prostatique ?
Décryptage avec Charlotte Ledent, sexologue et créatrice d’Eva Luna Love Shop.
Ça y est, c’est fini le tabou sur le plaisir anal chez les hommes hétéros ?
C’est compliqué. Dans notre love shop, nous rencontrons énormément de personnes intéressées. D’ailleurs, il y a une offre exponentielle au niveau des gadgets, sex-toys et autres accessoires par rapport à il y a cinq ou dix ans. De là à dire qu’on en parle facilement en couple… Je pense que ça va dépendre des générations et de l’ouverture d’esprit. Mais clairement, il y a une tendance qui pousse les gens à rechercher toutes les formes de plaisir possibles.
Comment expliquer une certaine libération par rapport à l’anal ?
Ces dernières années, on a fait de nombreuses campagnes médicales liées au dépistage du cancer de la prostate. Sous le couvert de toute cette médiatisation, on a également mis la lumière sur cette zone comme objet de plaisir. Ça a été une découverte pour une partie de la population qui n’en avait aucune idée. Par ailleurs, on sort de plus en plus des stéréotypes du genre : « Hors de question que je fasse ça, je ne suis pas gay. » Aujourd’hui, il y a plein de mecs qui adorent l’anal, que ce soit au travers de jouets anaux/prostatiques ou de jeux avec leur femme.
Un orgasme prostatique est-il différent ?
Même si on ne peut jamais vraiment systématiser un orgasme, on peut déjà dire que ce n’est pas comparable à l’éjaculation. Dans le fonctionnement, il ne suffit pas non plus d’appuyer dessus pour jouir. C’est comme le point G chez la femme, c’est une zone qui s’entraîne. Chez l’homme, c’est un jeu de spasmes entre la zone prostatique et la zone du périnée qu’on stimule simultanément. On peut même imaginer des orgasmes multiples dans le cas où l’on excite la zone prostatique d’un homme en même temps qu’il pénètre son ou sa partenaire.
Vos conseils pour se lancer à la conquête du point P ?
Comme pour toute pénétration anale, que ce soit pour les femmes ou pour les hommes, il faut y aller super doucement. C’est très important car le corps a une mémoire. Si la première expérience est ratée et douloureuse, on va rarement y retourner. Il faut donc d’abord prendre conscience de cette zone comme étant une zone érogène et il faut ensuite beaucoup de patience. On pense à utiliser des lubrifiants à base d’eau spécifiques pour la pénétration anale. On peut même l’appliquer avec une seringue creuse. Ensuite, un anus, ça se prépare, ça se dilate. On peut facilement stimuler la zone externe avec les doigts ou la langue et puis on y va délicatement lors de la pénétration. On commence avec des jouets de taille raisonnable.
Quels clichés devons-nous encore déconstruire ?
Il y a deux types de peurs que je rencontre. La première est liée à la douleur et elle est légitime car oui, on peut se faire mal si on s’y prend mal. On commence donc très gentiment. La seconde crainte est liée à un questionnement de type : « Est-ce normal de vouloir être pénétré quand je suis hétéro ? » Là, j’ai envie de dire que c’est de la déconstruction culturelle et des clichés.