Les acheteurs de livres sont à 75 % des femmes. Est-ce à dire que les hommes ne s’enfilent que les pages business des quotidiens ? Cupidon nous en préserve !
Entretien avec Alex Roussel, le bourreau (des récits) des cœurs.
Pourquoi un garçon se met-il à écrire des romances ?
A.R : Quand j’avais 14-15 ans, j’étais en vacances avec mes parents, à court de lecture. Une amie nous a rejoints, avec dans sa valise une vingtaine de romans Harlequin. Aux abois, je les ai tous lus en trois jours. Ça m’est resté en tête. Des années plus tard, j’ai vu la petite annonce d’une éditrice qui cherchait des auteurs de romans sentimentaux. Être un homme était un plus, pour varier les tons. J’ai postulé, ça a démarré comme ça. Après ma brève boulimie de Harlequin fondateurs, je n’en ai plus jamais ouvert un seul, à part ceux de mes copines qui écrivent dans ce registre.
Vos sources d’inspiration ?
A.R : Mon entourage, ma vie, les séries télé (je suis sériphage!), les films… Ça m’instruit sur l’air émotionnel du temps. Les gens me racontent facilement leur vie. Je prends des notes dans ma tête, puis j’interprète. J’ai été libraire, je travaille dans l’édition, j’ai fait des études de lettres : tout ça ensemble, mêlé à mes propres passions, ça forme des histoires. Les romans d’amour, c’est du raccommodage.
Est-ce que ce métier a changé vos propres expériences amoureuses ?
A.R : Ça m’a rendu plus théâtral ! Ça a amplifié ma tendance à « tragédifier », comme dans un roman, où l’on pousse le curseur pour rendre la situation plus intense. Mais je m’en rends compte et je corrige !
Comment attire-t-on les hommes vers la littérature sentimentale ?
A.R : En mettant en scène des personnages ancrés dans le réel, qui font rêver sans être des éphèbes inaccessibles. Je m’applique à rendre mon écriture intéressante et pertinente, et cela permet aux hommes de rentrer dans la tête des femmes. Tous mes amis masculins me partagent leur désarroi de ne pas comprendre les réactions féminines. Lire un roman sentimental, c’est comme regarder un bon soap : un délicieux plaisir coupable.