A moins d’avoir la science infuse – et beaucoup de chance – on tâtonne pour apprendre. Echouer, ça arrive. Ce qui importe, ce n’est pas l’échec, c’est ce qu’on en fait.
Ça commence à l’école : du primaire à l’unif, les filles sont globalement plus studieuses que les garçons. Elles sont plus appliquées, font leurs devoirs, tirent la classe vers le haut. Elles obtiennent de meilleures notes, et sont moins dissipées. Pourtant plus tard, 95% des postes à hautes responsabilités sont occupés par des hommes. Que se passe-t-il entre le stade de « premières de la classe » et « CEO en costume trois pièces » ? La pression de la performance, et la capacité – ou non – à transformer un plantage en apprentissage. Les garçons, schématiquement moins perfectionnistes, savant qu’un travail « pas parfait mais presque », ça passe. Les filles ne rendent pas un devoir tant qu’elles ne le considèrent pas comme impeccable. Or, ironiquement formulé, la différence entre 91 % et 99 %, ça s’appelle avoir une vie.
L’échec qui fait « genre » dès l’école
En enquêtant sur la détermination d’un parcours professionnel pour le magazine The Atlantic, les journalistes américaines Katty Kay et Claire Shipman ont observé que ce qui freine les femmes pour accéder aux fonctions de management est moins un problème de compétences, que de confiance en elles. A l’âge adulte, le schéma scolaire se répète : un homme quasi au niveau foncera. Une femme qui n’est pas prête à 100% reculera. Gilly Weinstein est coach en développement professionnel. A cheval sur deux cultures, européenne et américaine, elle développe une perspective sociologique sur la façon d’aborder la notion de réussite, dès l’enfance : « la notion de succès à l’école est culturelle. En France ou en Belgique, on part de zéro sur une copie, et on accumule les points au fur et à mesure des bonnes réponses. Aux États-Unis, on part de 100, puis on enlève des points en fonction des erreurs. On donne d’emblée à l’enfant l’idée qu’il peut réussir. En Europe, l’échec, c’est de ne pas détenir la bonne réponse. La pression est énorme lors des examens de juin et de décembre, mais on oublie dans la bataille de définir le succès. C’est une acception binaire : soit on réussit, soit on se plante. Dans de nombreuses écoles, on ne mesure pas les apprentissages, mais seulement les résultats. »
Et la trame de l’échec peut vous poursuivre toute votre vie : « la façon dont chacun définit son propre succès est influencée par son expérience scolaire. Et peut vous desservir des années plus tard dans le milieu professionnel. »