Évidemment, on se réjouit de voir enfin la fonction de Premier ministre se féminiser, avec l’arrivée de Sophie Wilmès à la tête du gouvernement fédéral. Sauf que dans les faits, être une femme en politique, c’est toujours compliqué.

Quiconque a déjà travaillé dans une rédaction un dimanche sait que l’information peut aussi prendre congé. Entre deux parties de balle magique et un tour à la machine à café, le journalisme dominical est fondamentalement de temps long, au milieu d’une actualité morne et aride. Ce 27 octobre est l’exception qui confirme la règle : alors que les négociations sont au point mort, Charles Michel quitte le 16 rue de la loi et un gouvernement en affaires courantes pour laisser sa place à Sophie Wilmès, auparavant ministre MR du budget. Depuis, tout le monde parle de cette nomination, de la presse aux experts politiques des réseaux sociaux, en passant par ceux qui aiment rappeler que la place d’une femme n’est pas en politique.

1. Une première Première ministre

Et pour cause : avant Sophie Wilmès, aucune femme n’avait jamais endossé le costume de Premier ministre. En 2019, elle succède à 51 hommes de pouvoir à la tête du gouvernement fédéral. Il était donc temps.

2. « Une femme de 44 ans »

Mais pour certains, avant d’être Première ministre, Sophie Wilmès est… une maman. C’est ainsi que ses quatre enfants ont par endroit été ajoutés à son palmarès politique. Tout cela assorti des traditionalistes interrogations : Sera-t-elle à la hauteur ? Une bonne mère fait-elle une bonne Première ministre ? Si les questions se posent sur Twitter et en filigrane de quelques articles de presse, pour nous, elle n’a pas lieu d’être. Après tout, les deux bambins de Charles Michel, les trois marmots d’Yves Leterme ou la descendance de quatre enfants de Herman Van Rompuy n’ont jamais intéressé qui que ce soit. Pourquoi serait-ce le cas avec Sophie Wilmès ?

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On a notre petite idée, mais passons. De la même manière, la presse française par exemple, n’a pas manqué de titrer qu’« une femme de 44 ans » était désormais à la tête du pays. À l’image des astronautes Christina Koch and Jessica Meir et de leur récente sortie dans l’espace, les femmes qui accomplissent des exploits n’ont que rarement le droit de voir citer leur nom. Un traitement de l’information sexiste — même s’il est inconscient.

3. Allô maman bobo

Le contexte de la nomination de Sophie Wilmès chatouille un peu également : l’ancienne ministre du budget remplace Charles Michel, Premier ministre « titulaire », après que celui-ci ait annoncé accéder au poste de président de Conseil européen. Sophie Wilmès endosse ainsi ses anciennes responsabilités en affaires courantes pour une « mission d’intérim » — le temps que le nouveau gouvernement soit formé — et sans la majorité de la chambre. Ses anciens camarades partis à l’Europe, elle se retrouve donc à tenir tant bien que mal la baraque, le temps qu’on lui trouve un nouveau chef de maison. On a vu plus gratifiant, même si les circonstances n’enlèvent rien au mérite de la politicienne. On ne peut tout de même pas s’empêcher de penser que ce sont toujours les mêmes qui font le sale boulot.

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