Le serveur arrive et là, c’est l'angoisse. Vous savez que vous voulez l’entrée de moules de bouchot et le coquelet en plat, mais pour le vin, c’est le trou noir. Vous devez l’avouer : vous n’y connaissez pas grand chose. Pas d’inquiétude, on a demandé à une sommelière comment commander et goûter du vin au restaurant.
« Et avec ça, qu’est-ce que vous boirez ? » La question tant redoutée a fini par arriver. Dans des mains tremblantes, une carte des vins cryptique, ponctuée de « domaines » et de « cépages » dont on n’a jamais entendu parlé et de régions qui nous font regretter nos cours de géo. Le Luberon, c’est où encore — dans le centre ou le sud de la France ?
« Un client qui connait peu le vin, je le reconnais très vite à son attitude : il est un peu mal à l’aise, il a les yeux rivés sur le menu et il hésite au moment de commander », analyse Barbara Hoornaert, appuyée sur le comptoir en béton de son restaurant Barge. La trentaine à peine entamée, cette sommelière belge est passée par La Grappe d’Or, le Coq au Champs et l’Eau vive, avant d’ouvrir sa propre table avec Grégoire Gillard. Pro, mais aussi bienveillante et attentionnée, elle est une conseillère en vin avisée. Avec Barbara, on n’a pas peur de dire qu’en vin, on n’y connait rien : elle est là pour ça.
Vin blanc ou rouge ?
« La première chose à se demander », explique-t-elle, « c’est si on veut boire du blanc ou du rouge. C’est une affaire de goût et de moment. Certaines personnes ne boivent que du rouge, par exemple, mais c’est aussi intéressant de faire ses choix au fur et à mesure de l’avancée du repas ». Ensuite, il s’agit d’arriver à mettre des mots sur ce qui nous plait, ou ce que l’on recherche — sans doute la partie la plus compliquée de la commande du vin, celle où l’on a souvent peur de se ridiculiser. Mais Barbara Hoornaert rassure tout de suite : si vous ne comprenez pas tous les mots du vin, qui sont parfois techniques, essayez avec des mots plus simples, votre propre vocabulaire. Dans un premier temps, demandez-vous si vous voulez un vin rouge puissant, épicé ou fruité. Et pour le blanc : doux, minéral ou floral ? ».
Et le voilà qui arrive. Pour l’instant, ce n’est qu’une étiquette, mais n’hésitez pas à demander au personnel de salle de vous en dire plus : qui est le vigneron ou la vigneronne ? Dans quelle région sont ses vignes ? Quelles sont les particularités de ce vin ? Voilà qui vous permettra de vous rappeler de ce verre en particulier et, certainement, de mieux apprécier le travail dans sa bouteille.
Ressentir
Honnêtement, qui n’a pas avalé rapidement une petite gorgée et déclaré sans réfléchir « Très bon, merci » ? Barbara conseille plutôt d’utiliser d’abord son nez : « La première chose à faire, c’est de sentir le vin. On l’aère d’abord un peu en faisant le faisant tournoyer, puis on met son nez quasi-entièrement dans le verre. Ça donne déjà pas mal de pistes. Ça peut aider de verbaliser ce que l’on sent, mais ce n’est pas obligatoire. Rien ne sert de se forcer, d’autant que l’odorat n’est pas forcément un sens qu’on utilise beaucoup ».
L’étape suivante, c’est la dégustation. Vous pouvez aspirer le vin avec un peu d’air, comme vous l’avez certainement déjà entendu faire, mais inutile d’en faire des caisses : « Pas besoin de se gargariser avec le vin. Il faut surtout ressentir les choses. C’est comme dans le dessin animé Ratatouille, quand le petit rat goûte et voit toutes ces images se créer dans son esprit. Et bien c’est la même chose : fermez les yeux et essayez de visualiser ce que vous goûtez. On comprend tout de suite mieux des termes comme ‘droit’, ‘sur le fruit’, etc. Mais ce qui importe, ce sont vos sensations, et vous pouvez les exprimer avec vos mots. Chacun a ses propres souvenirs gustatifs, et c’est à eux qu’il faut faire appel quand on déguste un vin. Surtout, il n’y a pas d’erreur et tous les goûts sont dans la nature ».
Et là, ça coince. Ce n’est pas tout à fait à votre goût. Trop acide, trop puissant, trop épicé ou trop de tanins, cette sensation rêche à l’intérieur des joues… « Si vous n’aimez pas le vin servi, c’est important d’essayer de dire pourquoi. Ça m’aide à comprendre où se situe votre curseur de goût, et quoi vous proposer ensuite. Parfois, il m’arrive de faire goûter trois vins avant de tomber sur celui qui conviendra, mais ce n’est pas grave : le but du jeu, c’est de trouver ce qui vous plait vraiment », assure la sommelière. « Un bon sommelier écoute ce que le client a à raconter ».
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