En 1998, Katie Holmes crevait les écrans (et les cœurs) en tant que girl next door dans la série «Dawson». Au cours des vingt années qui ont suivi, elle s’est métamorphosée à l’écran comme dans la vie. Une énigme aujourd’hui décryptée, avec son accord…

Katie Holmes

T-shirt Fendi, gants de la styliste, bijoux de Katie Holmes.

Sur cette photo paparazzée, un cardigan beige en cachemire affole la Toile. Le cardigan et le soutien-gorge assortis, surtout. Une tenue qui annonçait au monde entier : « Katie Holmes is back. »
Voilà à quoi ressemble la vie de Katie Holmes aujourd’hui. Le moindre détail la concernant peut entraîner un millier de titres racoleurs… et un million d’interprétations. Un cardigan. Un cardigan beige. Quel vêtement ennuyeux. Et pourtant, nous en sommes là. Il a suffi d’un soutien-gorge en cachemire – qui, soit dit en passant, coûte la bagatelle de 500 dollars et s’est retrouvé en rupture de stock en quelques heures – pour que Katie Holmes redevienne la femme dont on veut tous scruter la vie. Précisément parce que c’est la chose qu’elle ne nous a jamais laissés faire.

Il n’en a pas toujours été ainsi. En 1998, à l’époque où elle incarnait la jeune Joey Potter dans « Dawson », les choses étaient un peu moins compliquées. Katie Holmes était une fille simple, juste normale. Ses partenaires à l’écran – Joshua Jackson ou Chris Klein – apparaissaient eux aussi comme des personnalités faciles à cerner. Jusqu’à ce qu’elle épouse le type le plus étrange d’Hollywood : Tom Cruise. Et après son divorce ? Elle s’est juste éclipsée. Elle n’a pas fait la tournée des talk-shows pour tout balancer. Elle ne s’est pas fait jeter des bars en titubant. Elle n’a pas assisté à tous les galas en quête de visibilité. Elle n’a certainement pas documenté sa vie sur Instagram. Au lieu de ça, elle a géré tranquillement ses affaires, travaillant d’arrache-pied pendant dix ans, lançant sa griffe avec Jeanne Yang, son amie styliste, et élevant seule sa fille Suri.

Katie Holmes

T-shirt Fendi, gants de la styliste, bijoux de Katie Holmes.

Une décennie perdue. Du moins aux yeux du monde. Il y a bien eu cette photo d’elle et de Suri – aujourd’hui âgée de 13 ans – arpentant main dans la main les rues de New York dans des tenues presque identiques. Mais pas grand-chose de plus. Quelques grands événements mondains, juste de quoi nous donner envie d’en savoir plus. On peut rêver… La garde rapprochée de la girl next door veille sur elle.

On se rencontre quelques jours plus tard à Milan, après le défilé Fendi auquel elle a assisté. Je la retrouve, seule, tranquillement assise au bar d’un hôtel, sans garde du corps ni attaché de presse surexcité. Juste Katie Holmes comme on se l’imagine : douce, souriante, buvant un café noir et… vêtue du cardigan en cachemire. Je m’exclame : « Vous portez le cardigan ! » Elle semble surprise. Puis éclate de rire. « Je l’ai enfilé à mon réveil. Il est vraiment confortable. Allez-y, touchez. » Je m’approche timidement et l’effleure. « J’adore cette marque : Kaithe. Je ne porte pas le soutien-gorge assorti aujourd’hui. Je l’ai acheté parce que je le trouvais cool. Le cardigan est so big, je trouve ça cute de ne porter que le soutien-gorge en dessous. » Elle marque une pause. « Je ne m’attendais pas à un tel buzz. » J’émets quelques doutes. La photo a été prise alors qu’elle venait de se séparer de l’acteur Jamie Foxx, avec qui elle était restée six ans. Le cardigan casual sous lequel on devine le soutien-gorge sexy et transgressif semble un peu trop parfaitement anodin pour ne pas être une sorte de signal adressé au monde entier. « Non », insiste Katie Holmes, secouant doucement la tête. « Je l’ai enfilé sans me poser de questions et je suis sortie. »

En réalité, elle a eu vent du tapage sur la Toile quand un ami l’a appelée. « Je me suis dit… OK. » Elle hoche la tête, perplexe. Elle m’avoue ne jamais se googliser. « Je préfère regarder un vieux film, lire un bon bouquin et passer du temps en famille ou avec mes amis. Sur internet, il s’agit d’une version de moi-même élaborée par quelqu’un d’autre. Je ne peux rien y faire. » Quoi qu’il en soit, taper son nom permet d’obtenir littéralement des millions d’occurrences. On y apprend ce qu’elle portait hier, où elle a fait ses courses et à quoi elle ressemble quand elle va au yoga. Chacun de ses faits et gestes est scruté et analysé. Le matin de notre interview, je fais une petite recherche et voici le premier titre qui apparaît : « Katie Holmes sort de chez elle dans un trench camel et hèle un taxi ! »

Katie Holmes

T-shirt Fendi, gants de la styliste, bijoux de Katie Holmes.

Quand je le lui apprends, elle paraît atterrée. « Vraiment ? C’est tellement… » Elle se tait. Et quand elle reprend, elle murmure. « C’est too much. C’est vraiment too much, honnêtement. » Elle cherche ses mots. « Ce genre d’attention est… », soupire-t-elle. « J’essaie de relativiser, de prendre tout ça pour ce que c’est, rien de plus. Je m’efforce d’avoir l’air présentable quand je sors de chez moi. Je suis très réservée et calme, c’est donc intéressant que cette part de ma vie existe. »

Quand elle était enfant – élève brillante à Toledo dans l’Ohio –, la vie aurait difficilement pu être plus « normale » pour Katie Noelle Holmes. Née en décembre 1978 d’une mère femme au foyer, Kathleen, et d’un père avocat, Martin, elle est la cadette de cinq enfants. Étudiante modèle, elle a réussi à intégrer la prestigieuse université de Columbia et son père voulait qu’elle devienne médecin. Mais elle avait d’autres projets. Dotée d’un gène créatif, elle a toujours été davantage attirée par la mode et l’art dramatique, tout en se concentrant sur ses études avant de se faire repérer par un agent. « Dawson » n’était pas sa première proposition de rôle d’envergure. Si l’on en croit un journal local, « The Blade », Katie Holmes était pressentie pour interpréter le premier rôle dans « Buffy contre les vampires » (finalement incarné par Sarah Michelle Gellar), mais elle a décliné l’offre pour terminer ses études.

Et il s’en est fallu de peu pour qu’elle ne figure pas non plus au générique de « Dawson ». Comment en est-elle venue à jouer le rôle de Joey Potter ? L’histoire tient de la légende hollywoodienne. En effet, 
elle a d’abord refusé de se rendre à Los Angeles pour l’audition, tiraillée par un conflit d’agenda avec la pièce de théâtre de son école, « Damn Yankees ». « Je jouais Lola. Je devais même porter un boa à plumes. Je me suis dit qu’il était hors de question de ne pas jouer Lola pour aller à une audition pour une chaîne de télé. Je ne pouvais 
pas laisser tomber mon école… Alors j’ai dit à Kevin (le réalisateur Kevin Williamson) et à The WB (la chaîne de télévision) que j’étais désolée, mais que je ne pouvais pas les rencontrer cette semaine-là, car j’avais d’autres engagements. » Au bout du compte, sa ténacité a payé. Kevin Williamson lui a permis de passer son audition par vidéo interposée. Katie Holmes l’a enregistrée dans sa cave, sa mère prenant pour l’occasion le rôle de Dawson.

Katie Holmes

T-shirt Fendi, gants de la styliste, bijoux de Katie Holmes.

Vingt ans plus tard, elle continue à penser à cette période de sa vie avec enthousiasme. La série a célébré son vingtième anniversaire l’année dernière et le casting (Katie Holmes, son ex Joshua Jackson, James Van Der Beek, Michelle Williams et Busy Philipps) s’est réuni pour un shooting inédit. « C’était vraiment sympa », se souvient-elle. « On est allé dîner. C’est incroyable pour nous de voir que les gens continuent de regarder la série et l’aiment toujours autant. On a été dépassé par son succès, et on est très heureux d’avoir eu la chance d’y contribuer et d’en bénéficier. Ça nous a ouvert tellement de portes. »

Je demande des nouvelles de Suri. À sa naissance, Katie Holmes n’avait que 27 ans. « J’étais heureuse de devenir maman dans la vingtaine » est tout ce qu’elle acceptera de dévoiler. « C’est chouette que nos âges s’accordent… Comment dire ? Chaque âge de Suri a toujours été adapté au mien. D’une certaine manière, nous avons grandi ensemble. » C’est frustrant, parce que Katie Holmes est incroyablement aimable. Il y a de la chaleur dans sa manière de s’exprimer. On a juste envie d’en savoir beaucoup plus, parce qu’on sent qu’il y a tellement plus que ce qu’elle veut bien donner. Après tout, elle a maintenant 40 ans.

Est-ce que cet anniversaire a changé sa façon de voir les choses ? « Pas vraiment, non. » Elle rit. « J’ai réalisé mon premier film, “All We Had”, il y a quelques années et je travaille sur le deuxième. J’attends donc la suite avec impatience. Cela dit, c’est intéressant d’avoir 40 ans, parce que quand on est jeune, on pense qu’on n’atteindra jamais cet âge ! Puis, le jour arrive et on se dit qu’en fait, ce n’est pas si terrible. Je continue à faire tout ce que j’ai toujours fait. Je suis heureuse de la tournure qu’a prise ma carrière et impatiente que les projets à venir se concrétisent. »

Au cours des vingt dernières années, elle a travaillé dur et sans faire de vagues. Mais son éthique professionnelle a été sans cesse éclipsée par sa vie amoureuse et sa garde-robe. Prochainement, elle sera doublement à l’affiche. D’abord dans « The Boy 2 », ensuite dans une adaptation du best-seller « Le secret de Rhonda Byrnes », figure phare dans le domaine du développement personnel. « Le film est assez magique. Je pense qu’il va permettre aux gens de se sentir bien. Et nous avons tous besoin de quelque chose pour nous sentir bien. »

Avec « The Boy 2 », on est aux antipodes : un film d’horreur qui met en scène une mère (jouée par Katie Holmes) terrifiée à l’idée que son fils tombe sous l’emprise de sa poupée. « C’est une métaphore pour les mères », précise l’actrice en toute sincérité. « Nous voulons protéger nos enfants des mauvaises influences, pas vrai ? » Craint- elle les mauvaises influences sur Suri, maintenant qu’elle a 13 ans ? « Comme tous les parents, non ? Oui, bien sûr, je suis inquiète. Nous sommes inondés de haine, de mauvaises nouvelles et de choses absurdes… Un peu partout, l’atmosphère est… effrayante. »

Katie Holmes

T-shirt Fendi, gants de la styliste, bijoux de Katie Holmes.

Le lendemain, nous avons rendez-vous pour le shooting du ELLE. Je l’observe. Est-elle « beige » comme certains semblent le suggérer ? Non. Elle est trop smart pour ça. D’ailleurs, ça demande beaucoup de travail de transformer le beige en art, comme elle l’a fait. Le beige est un « endroit » sûr pour elle, sans pour autant la définir. Le beige, c’est ce que ceux qui ont vraiment du talent montrent d’eux-mêmes. Pour que le monde reste à bonne distance.

Stylisme : Sasa Thomann. Coiffure : Lorenzo Barcella @Aldo Coppola Agency using L’Oréal Professionnel. Maquillage : Arianna Campa @Close-up Milano. Manicure : Annarel Innocente @Close-up Milano. Fashion assistants : Conor Fitzgerald-Bond & Clemmie Brown

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