Devenir mère est un choix – un droit – mais cela demande beaucoup de temps (et d’énergie) et concilier la maternité avec une carrière de sportive de haut niveau est un véritable challenge, un équilibre délicat à atteindre. Qu’en est-il des femmes athlètes professionnelles devenues mamans ? Comment concilier grossesse et entraînements intensifs ? Comment revenir à la compétition après un bébé ? Être mère et athlète, mission impossible ?

Il est vivement recommandé de pratiquer régulièrement une activité sportive en début de grossesse. Rien de surprenant puisque de façon générale, le sport est bon pour la santé. Tout au plus, par sécurité, on demandera aux futures mères d’éviter  les sports d’impact (tels que l’équitation et la course à pieds) et de contact (comme la boxe et les autres sport de défense). Oui mais, comment faire quand le sport est en fait votre métier ? Que votre emploi du temps consiste en une succession d’entrainements quotidiens ? Quand le dépassement de soi est votre moto ? Quand votre travail est de voyager et de participer à des compétitions à travers le monde ?  Comment concilier l’envie de devenir mère avec une carrière sportive de haut niveau ? Quelles sont les difficultés rencontrées par ces femmes ?

C’est quoi la vie d’une sportive de haut niveau ?

On se doute que ce genre de carrière demande des sacrifices. De longues et éreintants entrainements, encore et encore, chaque jour qui passe. Des régimes alimentaires particuliers, une hygiène de vie quasi irréprochable. On se doute que ce n’est pas facile, ni mentalement, ni physiquement mais ce qu’on ne s’imagine peut-être pas c’est que pour exceller dans un sport, il faut être prêt à faire de ce sport votre quotidien. Tout dépend de la discipline bien sûr mais, en général, pour la plupart des athlètes, les entrainements ont lieu 6 jours sur 7. Et, pour certains,  ils ont même lieu plusieurs fois par jour, week-ends et jours fériés compris. Un rythme effréné mais nécessaire pour atteindre de tels niveaux de performances. Embrasser une carrière sportive c’est donc faire des choix et aussi de nombreux sacrifices. Le choix de renoncer à certains loisirs, moments de partage entre amis ou en famille mais aussi  de suivre un régime alimentaire strict. Si pizzas, sushis, et burgers font partis de vos péchés mignons hebdomadaires, ce sera l’un des plus gros sacrifices à faire. En plus d’avoir une alimentation saine et équilibré, un autre facteur entre en ligne de compte : les 8 heures de sommeil indispensables à la récupération physique de l’athlète. Vous l’aurez donc compris, être sportif de haut niveau n’est pas un choix de carrière à prendre à la légère car, au delà du plaisir de pratiquer un sport qui vous passionne, la pression est bien présente.

Si aujourd’hui, malgré toutes ces contraintes, des athlètes professionnelles telles Serena Williams, Kim Clijsters, Estelle Yoka Mossely – et tant d’autres encore – semblent combiner aisément leur vie de famille et leur carrière sportive, les choses n’étaient pas aussi simples il y a seulement quelques années de cela.

C’était vraiment pas mieux avant

Dans les années 90, être une athlète de haut niveau et décider de fonder une famille était synonyme de choix cornélien. Concrètement, cela signifiait mettre sa carrière entre parenthèses, voire y mettre un terme après des années de travail acharné. Parce que qui dit plus de performances, dit plus de subventions…

Maryse Erwanje Epee, ancienne détentrice du record de France de saut en hauteur, s’est confiée sur ce sujet à l’antenne de RTL. Elle explique alors que lorsqu’elle tombe enceinte en 1981, elle se retrouve sans contrat pendant un an et donc sans aucune subvention. L’ancienne championne est révoltée par la situation et décide de faire évoluer les choses et de mettre un terme à ces règles discriminantes. Elle demande la mise à disposition d’une gynécologue par la fédération et la création d’une crèche à l’INSEP (Institut National du Sport de l’Expertise et de la Performance en France) afin que les mamans athlètes puissent continuer à s’entrainer tout en étant suivies par un professionnel de la santé et sans devoir s’inquiéter d’un système de garde pour leurs enfants. Ces revendications étaient ses conditions pour son retour au sein de l’INSEP. Sans cela, elle était prête à quitter l’athlétisme. Un coup de gueule qui a porté ses fruits et amélioré la condition des femmes athlètes en France puisque désormais, l’INSEP possède une crèche et a mis à la disposition des athlètes une gynécologue.

Athlète, femme, maman et source d’inspiration

Aujourd’hui, les choses ont changé et c’est tant mieux ! Pour la plupart, les femmes athlètes peuvent s’épanouir tant professionnellement que personnellement. L’équation n’a plus rien d’impossible. Libres à elles de dévoiler leur vie de famille sur les réseaux, de prévoir une grossesse durant leur carrière et cela sans crainte de la mettre en péril. Bien au contraire, les mamans athlètes sont devenues de véritables sources d’inspiration pour le grand public, elles sont la preuve que rien n’est impossible et qu’une grossesse ne doit pas représenter un obstacle dans la vie d’une femme, ni être un frein à sa carrière.

Estelle Yoka Mossely (boxeuse française) fait partie de ces athlètes qui forcent l’admiration. Elle a, jusqu’à ses 7 mois de grossesse (de son deuxième fils, Magomed Yoka), continué les entrainements (adapté à sa condition et donc sans contact physique avec une adversaire). Et, elle s’est servie de son compte Instagram pour partager ses séances de sport adaptées. A travers ses vidéos, elle conseille et motive les femmes enceintes, à pratiquer des exercices, des étirements et des séances de récupération. On la voit, assistée du kiné Aurélien Bulian, prodiguer des conseils sur des exercices adaptés aux femmes enceintes. Une belle évolution des mentalités.

La championne de boxe a accepté de nous dévoiler son quotidien de mère de famille et de sportive de haut niveau et nous explique comment elle fonctionne au quotidien. Maman de 2 jeunes garçons, la première française médaillée olympique, dit avoir pleinement profité de sa première grossesse, en faisant volontairement une pause carrière. 2 ans plus tard, elle est enceinte de son second enfant et cette fois, Estelle prend la décision de ne pas interrompre sa carrière. Elle a toujours refusé de ne pas pouvoir jouir d’une vie de femme “normale” malgré ses grossesses et sa profession quelque peu particulière : “Une grossesse a un impact physique sur le corps d’une femme, mais aussi dans sa vie. Contrairement aux autres professions, il n’existe pas de congé de maternité dans le milieu du sport de haut niveau.”  Les inégalités existent toujours (et pas que dans le milieu sportif d’ailleurs …) et Estelle Yoka Mossely espère voir changer les choses mais elle reconnait que malgré tout les mentalités ont bien évolué depuis 30 ans même s’il y a encore pas mal de chemin à parcourir pour que les femmes athlètes de haut niveau n’aient tout simplement plus à se poser cette terrible question : “Dois-je attendre la fin de ma carrière pour fonder une famille ?”. Ou même y renoncer …

Le conseil d’Estelle pour toutes celles qui aimeraient poursuivre leur carrière sportive tout en devenant maman est de savoir précisément ce qu’elles veulent, d’établir clairement leurs priorités et de se poser les bonnes questions.

Aisling D’hooghe, joueuse belge de hockey sur gazon, a mis au monde début février 2021 un petit garçon prénommé Cali. Elle a, elle aussi, pris la décision que sa passion sportive ne l’empêcherait pas plus qu’une autre carrière professionnelle de devenir maman. La gardienne du club de hockey de Waterloo, et membre de l’équipe nationale depuis 2011, a conscience qu’elle a cette grande chance d’être soutenue par sa famille et son compagnon Guillaume Francois (footballeur à l’USG). Étant tout deux dans le milieu sportif, la gardienne des Ducks n’a pas de craintes concernant la continuation de sa carrière sportive en parallèle de sa vie de jeune maman. Pour le couple, fonder une famille était une évidence, la non -qualification pour les JO de Tokyo pour Aisling a été la bonne occasion pour avoir un enfant et faire une pause carrière. Malgré tout, la maternité n’a pas pour autant fait oublier à la jeune hockeyeuse ses objectifs à savoir retrouver rapidement le chemin des entrainements en vue de participer à la coupe d’Europe qui se déroulera aux Pays-Bas en juin 2021 et la qualification pour les JO de Paris en 2024.

Entrainée depuis 7 ans par son beau père, à la CENS Academy, Amal Amjahid, championne du monde du jiu-jitsu, possède un avis bien tranché sur le sujet. Celle dont un hall des sports portera bientôt son nom pense que “trouver la bonne personne qui vous pousse à réussir” est la clé pour se sentir soutenue dans sa vie personnelle et professionnelle. Partageant la même passion que Karen Antunes  (athlète brésilienne, ceinture noire de jiu-jitsu) et Dern Mackenzie (athlète brésilienne pratiquant le jujitsu et les arts martiaux), Amal est consciente de l’implication que cela demande de devenir mère tout en restant une athlète de haut niveau mais hors de question pour elle de ne pas vivre sa vie comme elle le désire.

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“Karen Antunes  et Dern Mackenzie m’ont fait changer d’avis : je ne veux plus attendre la fin de ma carrière pour fonder une famille”

 

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Les conditions de vie et d’entrainement des sportives de haut niveau ont bel et bien été améliorées ces dernières années mais des points importants sont encore à changer. Comme, par exemple, réaliser des tests de grossesse à l’insu des femmes … C’est malheureusement ce qui est arrivé aux athlètes de l’académie de Handball, à Nantes, d’après le média français L’express. Un véritable scandale !

Pour beaucoup trop de femmes, au sein du milieu sportif, la grossesse reste un sujet sensible. Certaines témoignent même que, par peur de voir leur carrière s’arrêter, elles envisageraient de renoncer à fonder une famille ou d’attendre leur mise à la retraite. Sachant qu’en moyenne, une carrière sportive chez les femmes s’arrête à l’âge de 35 ans. Et si le temps est venu que les choses changent ? Dans le monde sportif mais dans l’univers du travail en général également. En 2021, la gente féminine continue de rencontrer plus de difficultés que les hommes à mener une carrière complète. Elles subissent plus de discriminations que leurs collègues masculins (notamment sur le plan de la rémunération). La grossesse continue d’être vue comme un véritable problème pour certains employeurs qui punissent donc les femmes en leur octroyant des rémunérations plus faibles et en leur offrant un accès plus restreint aux promotions et postes à responsabilités.

Quels changements possibles sont envisageables ?

En Belgique, la Fédération Wallonie-Bruxelles défend « l’accès aux fonctions de direction et d’entrainement, la pratique sportive, la lutte contre la violence sexiste, l’accès aux les médias et la communication ainsi que les politiques et programmes visant l’égalité entre les femmes et les hommes dans le sport ». Chez nos voisins français, FEMIX’SPORTS, seule association française qui se concentre sur “la femme et le sport”,  « a pour objectif de contribuer à une meilleure représentation des femmes dans le sport, d’encourager la mixité et l’équité et d’être un outil d’aide et d’accompagnement pour la promotion du sport féminin en général ».

Des progrès notables mais toujours insuffisants. Trop peu de structures défendent le droit des femmes athlètes à mener leur grossesse sans en subir les conséquences professionnellement. Un changement majeur qui se fait toujours attendre : octroyer des congés de maternité rémunérés pour toutes les athlètes de tout sport confondu. Il est également important de faire la promotion de ces femmes sportives professionnelles qui ont trouver su trouver cet équilibre entre famille et carrière afin de briser le tabou et les peurs. Il est plus que temps de mettre fin aux discriminations envers les femmes, fin aux discriminations au travail, dans la sphère tant professionnelle que privée. Les femmes représentent la moitié de l’humanité. Il est temps de leur offrir les même droits et avantages que les hommes.

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