Pour son défilé dévoilé ce samedi, la maison Hermès a décidé de créer des ponts. Trois villes,  trois  ambiances,  toutes réunies sous le thème de la mode en mouvement.  C’est avec  admiration que nous avons pu apprécier le spectacle qui se proposait  à nos yeux, en live.

Hermès,  un défilé en trois actes

Que pouvons-nous faire aujourd’hui avec la simple idée d’un défilé ?” C’est  la  question centrale  qui a motivé la maison française.  Drôle d’époque, assignés à nos canapés, nous continuons à regarder les mannequins défiler. Il fallait mettre un  peu plus de mouvement dans tout ça. Sans s’éloigner de l’idée du podium,  Hermès propose une réinterprétation de ce rituel centenaire: une danse, un rythme, une performance, inspirées de la collection de Nadège Vanhée-Cybulski.

L’idée à l’origine de ce triptyque est assez simple. Elle est née d’une interrogation : comment, en ces temps où nous sommes tous tenus à distance les uns des autres, pouvons-nous continuer à être créatifs et, surtout, comment pouvons-nous être ensemble quand même ? Si nous ne pouvons pas nous déplacer, voyager, alors c’est au défilé de venir à nous… De là est née l’envie de créer quelque chose qui dépasserait la seule performance physique. Puis nous avons eu l’idée de mettre en connexion trois lieux distincts, pour que la collection elle-même se déplace dans trois villes et invente sa propre circulation” explique la directrice artistique.

Madeline Hollander

Madeline Hollander

Acte I:  New York,  la  danse

Le premier acte se déroule à L’Armory Show de New York avec une chorégraphie imaginée par Madeline Hollander. Au coeur du décor, les rideaux dans cet orange lumineux propre à Hermès préfigurent le prologue. Les danseurs les contournent, les franchissent, sans jamais les toucher. Une grâce étonnante se dégage de ce groupe de  femmes déterminées. “C’est davantage un commentaire sur la ville de New York et le mouvement de ses piétons qu’un commentaire sur la mode. J’adore la démarche des gens le matin dans Manhattan, leurs mouvements sont en rythme et parfois même synchronisés les uns avec les autres. Ce fameux 3,2 miles à l’heure (soit un peu plus de 5 km), qui serait le rythme moyen de la marche des New-Yorkais le matin, est une source d’inspiration inépuisable” explique la  chorégraphe. La démarche badass et assurée, la grâce et la  légèreté de ce premier acte nous émeuvent. Derrière l’écran,  des “aaaah” et des “oooh”  d’admiration. Nous sommes ces femmes, nous dansons.

Défilé Hermès

Le défilé, à Paris

Acte II: Paris, le rythme

Au milieu de piles de boîtes à chapeaux, les mannequins marchent avec assurance. On est à Paris, à la Garde Républicaine. Dans une palette de couleurs qui oscillent du chocolat au marron en passant par l’acajou  (Hermès,  reste Hermès), la maison décline son vocabulaire (cuir très fin, plaids, matelassage et clous Médor) en y ajoutant du denim et des pièces techniques issues du cyclisme. Il s’en dégage une impression de confort, de modernité dans une collection qui reste très classique. “Les vêtements sont adaptés aussi bien au soir qu’à la vie pratique, il n’y a plus de contraires ni d’oppositions a priori : les catégories sont fondues dans des jeux de matières et de plis (…) Ce sont des protections en lesquelles retrouver des forces, mais ce sont surtout des armatures qui jamais ne viennent contraindre le mouvement. Quelque chose pour elles, pour conduire le présent à grandes enjambées.

Gu Jiani Hermès

À Shanghai, la danse contemporaine

Acte III: Shanghai, la performance

Pour clôturer ce triptyque, on découvre les danseurs de la chorégraphe Gu Jiani. Des boîtes à déplacer, des espaces à combler,  on est fascinés par les mouvements qui font vivre le vêtement autrement. “En Chine, les boîtes font partie intégrante de notre quotidien. J’ai remarqué que créer une chorégraphie autour de boîtes avait beaucoup intrigué les équipes créatives à Paris, où la boîte prend un sens différent, plus proche du cadeau, de la surprise. Là encore, c’est intéressant de voir ce qui, dans nos pratiques et nos identités respectives, vient surprendre l’autre. Utiliser des boîtes sur scène comme des éléments de construction invite le spectateur à les regarder autrement, comme des murs coulissants, des cloisons avec lesquelles jouer. Les obstacles deviennent des ponts, l’espace se transforme instantanément” explique Gu Jiani.

Ce  voyage qui se déroulait en live sous nos yeux nous laisse sur un sentiment d’achèvement, d’agréable sensation d’un tout  réalisé. Est-ce la cohérence de la collection, l’illusion de connexion entre les continents ou simplement la poésie du spectacle ? Regardez la vidéo dans son ensemble, vous  comprendrez ! “L’idée, c’est de faire entendre une sensualité que la femme se réapproprierait tout à fait. Pendant longtemps, la sensualité des femmes a été décrite, filmée, photographiée, peinte par des hommes. Les deux chorégraphes à qui nous nous sommes adressés sont des femmes. Ce n’est pas un hasard. Nous vivons en direct ce moment où la femme a besoin de retrouver son récit, de s’approprier les termes de sa sensualité, libérée des stéréotypes. C’est un chantier fantastique pour les femmes d’aujourd’hui comme pour la mode” conclut  Nadège Vanhée-Cybulski.