Le féminisme intersectionnel, ça parait compliqué de prime abord. Peu connu du grand public, il s’impose peu à peu comme un modèle à suivre. Mais que se cache derrière ce concept ?

Défendre toutes les femmes, qu’elles soient blanches, noires, musulmanes ou encore transgenres. C’est ainsi que l’on peut brièvement résumer le féminisme intersectionnel. Pour bien comprendre ce concept, il faut s’intéresser à un autre mot, encore plus long et compliqué : l’intersectionnalité. L’intersectionnalité, selon la définition donnée par Wikipédia, est une “notion employée en sociologie et en réflexion politique, qui désigne la situation de personnes subissant simultanément plusieurs formes de stratification, domination ou de discrimination dans une société“. En gros, ce mot décrit les différentes oppressions qui peuvent toucher une seule et même personne.

Des origines…

L’idée émerge aux Etats-Unis dans les années 70′, en élévation contre le féminisme unique, orienté autour de la femme blanche éduquée. Le terme apparait pour la première fois en 1989, créé par la juriste afro-américaine Kimberlé Williams Crenshaw. À l’origine, il désignait le croisement entre différentes discriminations subies par les femmes afro-américaines. Si les femmes blanches ne subissent que le sexisme et les hommes noirs ne subissent que le racisme, les femmes noires sont, elles, victimes de ces deux oppressions.

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“L’intersectionnalité est une situation dans laquelle une personne regroupe des caractéristiques raciales, sociales, sexuelles et spirituelles qui lui font cumuler plusieurs handicaps sociaux et en font la victime de différentes formes de discrimination”. Kimberlé Williams Crenshaw

Le concept a ensuite gagné en popularité pour désigner plus globalement la lutte contre toutes les formes de discriminations – racisme, sexisme, homophobie, transphobie, … – qui peuvent toucher les minorités.

…À aujourd’hui

L’intersectionnalité a désormais le vent en poupe. À tel point qu’en 2020, la Commission européenne a adopté une perspective intersectionnelle dans sa nouvelle stratégie pour l’égalité des genres. La plateforme YouTube cumule un tas de vidéos explicatives sur le féminisme intersectionnel et son intérêt. Aux Etats-Unis, l’écrivaine et comédienne Akilah Hughes explique ce que c’est grâce à des parts de pizza.

En Belgique, une série d’associations féministes incarnent ce concept. La nouvelle vague féministe est intersectionnelle. “Toutes prônent un féminisme intersectionnel et décolonial. Toutes sont dans le même état d’esprit : le respect de tous. En gros, peu importe le combat dans lequel elles se sont spécialisées, toutes tiennent le même discours”, selon Elisa Vdk au magazine Vice. Réalisatrice du documentaire Les Nouvelles Guérillères, elle a interviewé une série d’associations féministes belges pour dresser le portrait de leurs combats.

Les différentes formes de féminisme

Comme il existe un tas d’avis, il existe également plusieurs formes de féminisme. La Tribune de Genève dresse d’ailleurs un portrait des ces différentes formes et propose un test pour déterminer son type de féminisme.

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© La Tribune de Genève

Mais puisque les opinions sont diverses, ces différences engendrent également une série de conflits. Le féminisme intersectionnel fait l’objet de nombreux débats. Ses partisanes prônent le respect de la liberté de choix de chacune, l’émergence de liens entre toutes les femmes et la mise en avant des multiples inégalités qui peuvent toucher une même personne. Les féministes universalistes sont, quant à elles, beaucoup plus mitigées quant aux bienfaits de cette notion. Elles reprochent aux féministes intersectionnelles de privilégier la lutte contre le racisme à la lutte contre le sexisme. Les opinions de ces deux formes de féminisme sont en réalité assez divergentes, notamment en ce qui concerne le port du voile et la laïcité. Pour les universalistes, la religion est soumise au patriarcat. Elles s’opposent au voile, le considérant comme un outil de domination de l’homme sur la femme. Les intersectionnelles ne considèrent, quant à elles, pas la religion musulmane comme nécessairement patriarcale.

Il existe également certains mouvements féministes appelés TERF (Trans-exclusionary radical feminist) qui excluent les femmes trans des combats féministes, revendiquant que le genre d’une personne est défini par son sexe. Une pensée en totale opposition avec la vision intersectionnelle.

Si la lutte contre le sexisme apparait dans toutes les formes de féminisme, l’intersectionnalité est celle qui prend en compte toutes les diversités, qu’elles soient physiques ou culturelles.

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