“My Body My Choice”. Gucci a prouvé une nouvelle fois qu’il comptait bien défendre ce mantra durablement à travers un nouveau geste fort.

Ce mardi 9 mai, Gucci a pris un positionnement ferme face à la menace du droit à l’avortement aux États-Unis. La maison de haute couture italienne s’est engagée à payer tous les frais de déplacement à ses employées si le droit à l’avortement était retiré là où elles vivent. “Alors que nous sommes aujourd’hui confrontés à un moment critique de l’histoire, la marque reste inébranlable dans sa conviction que l’accès aux soins de santé reproductive est un droit fondamental”, peut-on lire dans un communiqué. “L’entreprise remboursera désormais les frais de déplacement de toutes les salariées qui ont besoin d’accéder à des soins de santé indisponibles dans leur État d’origine”.

Le droit à l’avortement plus que jamais menacé aux États-Unis

Cette décision survient suite à la publication au mois de mai par le site Politico, d’un brouillon inédit de 98 pages d’une décision de la Cour suprême, revenant sur l’arrêt historique de 1973 de Roe v. Wade, dans lequel elle a reconnu le droit à l’avortement. Si cette conclusion était retenue, elle laisserait la porte ouverte à n’importe quel État de choisir d’interdire ou d’autoriser l’avortement. Il est dès lors plus que probable que l’on assiste à un bannissement de la procédure dans les État du Sud et le centre conservateur et religieux.

Plusieurs entreprises ont pris des mesures similaires avant Gucci. Il y a notamment Levi’s qui est la première marque à avoir pris position la semaine dernière en annonçant un remboursement complet des frais liés à l’avortement à ses employées. Les géants Amazon, Uber, Apple ou Tesla ont également pris position face à cette menace pour le droit des femmes.

Un engagement qui ne date pas d’hier

Cette décision forte s’inscrit dans un engagement de longue date de la marque. En 2013, déjà, la griffe déployait sa campagne Chime for Change à l’échelle internationale pour l’égalité des sexes en soutenant notamment les organismes visant à fournir l’accès à la santé sexuelle et reproductive aux personnes démunies. En 2019, Gucci défendait fièrement le droit à l’avortement dans un défilé très politique entre les murs des musées du Capitole à Rome. Parmi les silhouettes qui défilaient ce jour-là, on pouvait apercevoir un utérus fleuri brodé sur le plissé d’une jupe ou un message capital “My body, my Choice” sur le dos d’un costume en velours. “Les femmes doivent être respectées. Elles doivent se sentir libres de choisir ce qu’elles veulent”, avait déclaré le directeur artistique, Alessandro Michele.

 

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Beaucoup d’autres marques restent frileuses

Gucci s’est positionné. Pendant ce temps, de nombreuses entreprises américaines sont restées silencieuses sur la question, ou ont refusé tout commentaire. Selon le Wall Street Journal qui a posé la question à plusieurs experts en marketing, deux facteurs sont en cause. D’abord la peur de s’aliéner certains consommateurs et groupes d’intérêt, mais aussi le fait que la Cour suprême n’a pas encore statué sur l’affaire. Ainsi, aux États-Unis, l’arrêt Roe v. Wade “implique des croyances religieuses qui peuvent rendre les entreprises plus soucieuses d’offenser les opinions des gens” peut-on lire dans le quotidien américain.

Mais au-delà des consommateurs qui ont un point de vue différent, des conséquences économiques peuvent refroidir certaines entreprises à prendre position. Au mois d’avril, le gouverneur républicain de Floride, Ron DeSantis, a signé un projet de loi retirant à Walt Disney Co. un statut fiscal spécial, une décision qui fait suite à l’opposition publique de la société à un projet de loi de l’État limitant l’enseignement sur le genre et la sexualité en classe.

Pourtant, s’engager sur les questions sociales peut aussi être un choix payant pour les marques selon Chris Miller, responsable mondial de la stratégie d’activisme chez Ben & Jerry’s. “Il va devenir de plus en plus difficile pour elles de rester sur la touche”, déclare-t-il. Les attentes des consommateurs sont en train de changer. Les jeunes générations souhaitent aujourd’hui que les entreprises s’engagent sur les questions sociales. Exprimer ses convictions peut donc s’avérer être une stratégie commerciale extrêmement profitables aux marques, particulièrement à l’ère des réseaux sociaux.

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