Après l'annulation cataclysmique de l'arrêt Roe v. Wade, une autre loi extrémiste serait presque passée inaperçue. En quoi consiste la nouvelle loi "Don't say gay" qui vient d'entrer en vigueur le 1er juillet en Floride ?
Nouveau retour en arrière
Promulguée en mars dernier, la loi "House Bill 1557" - baptisée "don't say gay" par ses opposants - vient d'entrer en vigueur ce 1er juillet 2022. Désormais, il sera interdit d'enseigner des sujets en lien avec l'orientation sexuelle ou l'identité de genre dans les écoles primaires en Floride. Le texte s'applique de la maternelle jusqu'aux élèves de 8 ou 9 ans. Tout.e enseignant.e qui évoquera ces questions au sein des écoles primaires publiques pourra être poursuivi.e, sous prétexte que le sujet ne serait "pas adapté à l’âge ou au développement" de l'enfant. Une notion bien sûr totalement subjective.
De plus, selon cette nouvelle loi, les enseignants seraient incités à prévenir les parents dans le cas où un.e élève révélerait son homosexualité en classe. Les enseignants et les membres du personnel ne sont plus autorisés à porter des vêtements arborant le drapeau arc-en-ciel et les photos de partenaires de même sexe ne peuvent plus être affichées en classe pour éviter qu'elles soient vues par les élèves.
Le gouverneur républicain de Floride Ron DeSantis avait signé le texte le 28 mars dernier. "Nous allons nous assurer que les parents puissent envoyer leurs enfants à l’école pour qu’ils apprennent, pas pour qu’ils soient endoctrinés", avait-il déclaré avant d'apposer sa signature.
Today, I signed HB 1557, the Parental Rights in Education Act, into law.
It ensures parents can send their kids to kindergarten without gender ideology being injected into instruction and they will be notified and have the right to decline healthcare services offered at schools. pic.twitter.com/OLnW2GLrJl
— Ron DeSantis (@GovRonDeSantis) March 28, 2022
Des réactions en chaîne
Ce nouveau recul des libertés et de la démocratie aux États-Unis avait créé des remous du côté de l’opposition démocrate et les militants pour les droits des personnes LGBTQIA+ qui avaient tenté de bloquer cette loi, sans succès.
L'administration Biden s'était elle aussi opposée au texte : "En signant ce projet de loi, le gouverneur DeSantis a choisi de cibler certains des étudiants et des familles parmi les plus vulnérables de Floride, tout cela sous le couvert des ‘droits des parents’. Ne vous y trompez pas: cela fait partie d’une tendance inquiétante et dangereuse à travers le pays où des législations ciblant les étudiants, les éducateurs et les individus LGBTQI+", avait déploré Miguel Cardona, secrétaire à l’Éducation. Joe Biden avait également exprimé publiquement son soutien à la communauté LGBTQIA+, "en particulier les enfants touchés par cette loi haineuse".
Des manifestations se sont tenues contre la loi ces derniers jours, des enseignants ont déjà annoncé leur démission, et un recours en justice a été déposé par plusieurs associations, comme le collectif LGBT Equality Florida. L’ONG Equality Florida a quant à elle accusé le gouverneur d’avoir "endommagé la réputation de l’État en tant que lieu accueillant et inclusif pour toutes les familles". "Il a fait de nous la risée de tous au niveau national", a ajouté l'organisation. "Pire, il a rendu les écoles moins sûres pour les enfants".
Même le géant Disney a réagi (tardivement) contre cette nouvelle législation après d'importantes manifestations lancées par ses employé.es, instiguant l'entreprise à sortir de son silence et à prendre position. Disney était également pointé du doigt pour avoir financé certains des principaux sponsors de cette proposition de loi.
Une des images fortes de ces protestations vient sans doute de Zander Moricz, 18 ans et président du conseil de sa classe. Alors que le jeune homme était invité à prononcer un discours lors de la remise des diplômes de son école de Floride, son directeur lui aurait interdit d'employer le mot "gay" dans son speech, ou de faire référence à son militantisme en faveur des droits LGBTQIA+. Zander Moricz est le plus jeune plaignant contre la loi "Don’t say gay". Pour exprimer ses idées de manière détournée, l'élève a usé d'une métaphore évoquant les personnes "ayant les cheveux bouclés" pour parler des personnes "gay". Des images qui ont fait le tour du monde.
florida high school class president zander moricz was told by his school that they would cut his microphone if he said “gay” in his grad speech, so he replaced gay with “having curly hair.” i am in awe pic.twitter.com/OqLbar5bwq
— matt (@mattxiv) May 24, 2022
Pas la première loi à entrer en vigueur
Selon la Human Rights Campaign, les législateurs auraient présenté plus de 300 projets de loi visant les Américains LGBTQIA+ rien que cette année. Beaucoup de ceux-ci visent, entre autres, à limiter l'accès des enfants transgenres aux soins médicaux, aux toilettes scolaires et aux équipes sportives. D'autres propositions visent à littérature qui "normalise" les "styles de vie" LGBTQIA+ ou à restreindre les informations dont disposent les élèves sur les questions de sexualité ou de racisme. L'argument des républicains ? Restaurer l'autorité parentale et défendre les élèves contre l'endoctrinement.
Selon LGBTQ Nation, d'autres états que la Floride avaient déjà adopté par le passé des lois similaires à la "House Bill 1557" tels que l'Alabama, l'Arizona, l'Oklahoma, le Tennessee... L'Indiana a proposé une loi obligeant les enseignants à consulter les parents avant de parler à un élève d'orientation sexuelle ou de transidentité. Il a aussi décidé de bannir les élèves transgenres des équipes sportives féminines, comme le Dakota du Sud et l'Utah. Dans l'Ohio, une loi prévoit des vérifications génitales sur les enfants, dès 6 ans...
Pour la Floride, le ministère de l'Éducation de l'État devrait publier plus d'informations sur la nouvelle législation au cours de l'été voire durant l'automne.
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