[caption id="attachment_36888" align="aligncenter" width="600"] Kenta Matsushige, collection Grand Prix ©Catwalk Pictures / Etienne Tordoir[/caption]
Le Festival International de Mode et de Photographie d'Hyères, qui fait habituellement référence en matière de découvreur de nouveaux talents, s'est clôturé dimanche sur une note de déception pour les Belges.
Le Festival s'est déroulé cette année dans des conditions météo idéales - il faisait si beau que les participants ont pu s'ébattre tout leur saoul sur la pelouse de la Villa Noailles, et networker compulsivement, l'un des objectifs principaux de cette rencontre annuelle entre acteurs du métier, de haut vol. CEO frayaient avec financiers, chasseurs de têtes avec stylistes, étudiants avec directeurs artistiques de grandes maisons, finalistes des éditions précédentes avec chercheurs de nouveaux noms, et de jolies (fructueuses) collaborations verront certainement le jour bientôt. Une retentissante réussite pour tous.
Pour tous ? Un bémol. Lors de la remise des prix, le jury présidé par Carol Lim et Humberto Leon, le duo à la tête de la création de Kenzo, a remis le Grand Prix du Jury Première Vision à Kenta Matsushige, jeune créateur japonais, qui avait présenté une collection très épurée, touet en blanc et en ciment, de mini robes chemises sur micro-shorts, recouverts de paletots de laine bouillie. Délicat et abouti, mais pas révolutionnaire, du tout.
Le Prix Chloé a été scindé en 2 awards, l'un attribué à Roshi Porkar (Autriche), qui avait imaginé une ligne en contrastes de volumes, robes aux accents XIXème en fausse fourrure, bimatières et bicolores, très "femme animale", Peau d'Ane moderne, mais très classique. L'autre prix Chloé a été décerné à Liselore Frowijn (Pays-Bas). Pour sa collection, elle a conçu des silhouettes très colorées, bariolées même, jouant du clash de catsuits esprit "Oompa Loompa" sous d'amples capes translucides. Psychédélique, fun et réjouissant.
Probablement en raison d'un interminable ballotage au moment d'élire le Grand Prix, le jury a créé une distinction spéciale "Opening ceremony" (multimarques créateurs haut de gamme présent en ligne et en boutiques, dont l'une des acheteuses faisait partie des jurés). Ce prix a échu à Yulia Yefimtchuk (Ukraine), en passant notre coup de coeur (si l'on excepte les deux candidats de La Cambre, l'appel du coeur, évidam'). Yulia, 28 ans, qui n'est plus une débutante, puisqu'elle a déjà participé à 3 fashion weeks à Kiev, a proposé une collection forte, mix de coupes militaires et de vêtements de travail, aux lignes rigoureuses, et barrés de messages brodés en cyrillique : "Tous les jours je suis heureuse de vivre", "paix dans le monde" (il y a un contexte avec l'Ukraine...) Des formes droites rappelant le constructivisme du 19ème et du 20ème siècle, les couleurs traditionnelles du pays (noir-blanc-rouge) pour des coupes autoritaires quoique super féminines. Certains modèles frisaient le folklore (mais de loin), l'ensemble sonnait étonnamment... belge. Yulia sera distribuée dans le réseau Opening Ceremony, ce en quoi, à la limite, elle sera la plus aidée des lauréats.
Enfin, le Prix du Public de la Ville d'Hyères est allé à Coralie Marabelle (France), pour une collection très "madame parisienne".
Louis-Gabriel Nouchi et Pablo Henrard, qui représentaient la Belgique au nom de La Cambre, sont repartis bredouilles de prix, mais riches de visibilité et de contacts.
Les commentaires des journalistes, stylistes, acheteurs et autres professionnels lors du cocktail qui a suivi la remise des prix allaient tous dans le même sens : un palmarès prudent, qui aurait pu être plus musclé. En tout cas, une perspective instructive d'un point de vue sur la mode de demain : rationnel.