On vous reproche souvent d'”en faire trop” ou de “tout vouloir contrôler” à la maison ? On vous a aussi répété maintes et maintes fois “je vais m’en occuper” pour finalement devoir vous en charger vous-mêmes et entendre ensuite un “fallait pas, j’allais le faire”. Peut-être que ce n’est pas simplement vous le problème, mais que vous vivez avec un “slacker”, et il y a un moyen très simple d’en avoir le coeur net.

Un slacker, c’est quoi ?

On parle depuis longtemps de la charge mentale liée aux tâches organisationnelles et ménagères qui incombe aux femmes. Mais le terme “slacker” a récemment connu un fameux boost de médiatisation grâce à la publication de la bande dessinée “Ca se met où ?” d’Emma Clit (disponible en ligne sur son blog). Mais c’est quoi un “slacker” ? Tout simplement quelqu’un qui se débrouille constamment pour échapper aux corvées, consciemment ou inconsciemment d’ailleurs. Dans cette petite BD qui parlera à beaucoup de femmes, la dessinatrice part d’un postulat développé dans le livre “Libérées !” de la journaliste et romancière Titiou Lecoq.

Selon celui-ci, les femmes en couple hétéro auraient tendance à faire du “préventif” et les hommes du “curatif”. C’est-à-dire que les femmes préfèrent ranger et nettoyer avant que la saleté et le bordel ne s’installent, tandis que les hommes décident de faire le ménage quand la saleté est visible ou quand ils ne trouvent plus ce qu’ils cherchent. En agissant de façon préventive, les femmes contribuent à ce que le foyer économise du temps et de l’argent, et prémunis toute la famille d’éventuelles galères. Comme le problème a été devancé, il ne se voit pas, “tout va bien” et le slacker peut se reposer sur ses lauriers, en se plaignant de trouver sa moitié “un peu trop control freak” par moment.

 

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80 % des femmes font la cuisine ou le ménage au moins une heure chaque jour, contre 36 % des hommes

Le but n’est pas de caricaturer. Il existe bien sûr des hommes aussi investis, et parfois même davantage, que leurs femmes. Mais, majoritairement, la réalité est inverse. L’Observatoire des Inégalités a ainsi constaté qu’entre 2003 et 2016, le partage des tâches domestiques et familiales n’avait pas progressé d’un poil. 80 % des femmes font la cuisine ou le ménage au moins une heure chaque jour, contre 36 % des hommes.

Souvent, la répartition inégale des tâches au sein du foyer est incombée aux femmes. Puisqu’elles veulent tout contrôler et estiment qu’elles le font mieux elles-mêmes, certains hommes préfèrent partir du principe que les tâches ménagères réalisées par leurs conjointes sont un acquis, et n’assument pas leur part du travail. Bien sûr, exprimer cette idée tout haut n’est plus considéré comme acceptable dans notre société, aujourd’hui. La résistance se fait donc de façon plus insidieuse grâce à des “stratégies indirectes” selon la chercheuse américaine Francine Deutsch qui s’était déjà intéressée au sujet en 1999 dans son ouvrage “Halving It All”.

Ces stratégies indirectes se traduisent de différentes façons :

  1. La résistance passive. C’est le fameux “fallait pas, j’allais le faire !”. On laisse le linge traîner jusqu’à ce qu’il s’accumule, et quand elle se décide enfin à ranger elle-même car plus personne n’a plus rien à se mettre, il prétend qu’il comptait justement s’en occuper.
  2. La mauvaise humeur. On accepte de faire une tâche, mais on rechigne tellement à la réaliser, en prétextant par exemple qu’un appareil fonctionne mal ou en cognant bien fort l’aspirateur contre chaque meuble pour montrer l’effort fourni, que l’autre finit par se sentir mal à l’aise et le fera lui-même la prochaine fois.
  3. Le zèle excessif. C’est accepter de faire une tâche, mais de la réaliser tellement lentement et avec tellement d’application que l’autre a eu le temps de faire tout le reste.
  4. L’incompétence. Bâcler une tâche pour être sûr de ne pas devoir s’en occuper la prochaine fois. Si on ramène les courses, on ramène les mauvais produits. Si on ramène le linge, on le plie n’importe comment.
  5. L’autonomie niveau zéro. On accomplit une tâche, mais on sollicite l’autre tellement souvent et avec tellement d’insistance qu’il préférera s’en charger lui-même la première fois. C’est par exemple tendre quelque chose à l’autre quand il passe ou lui demander de vérifier la cuisson pour être sûr que c’est correct.

 

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Le recours à ces stratégies n’est pas toujours conscient, précise Emma. C’est ce qu’on appelle le “renforcement négatif”. Puisque ces différentes stratégies permettent finalement de nous éviter la corvée, on s’y habitue et ces habitudes se renforcent. Le principe est simple : “Si je traîne à faire une tâche, elle se fait toute seule donc je traîne à la faire”.

L’auteure précise cependant que cette attitude a beau être inconsciente – après tout cette organisation des tâches est enracinée de longue date dans notre culture – elle n’en demeure pas moins un sacré “voilage de face”. Mais pourquoi est-ce si difficile d’en changer ? Car, aujourd’hui encore, accepter qu’une femme soit en position d’apporter son expertise à un homme est difficilement accepté. Alors que l’inverse ne choque personne. Secondement, car le capitalisme tolère que l’on néglige nos lieux de vie, alors qu’une telle attitude est inacceptable au bureau.

S’il y a une part de “gatekeeping”, soit le fait pour les femmes de vouloir protéger leurs prérogatives au sein du foyer, on ne peut plus accepter la situation inégalitaire selon laquelle les femmes sont contentes de faire à leur manière, et les hommes sont contents de ne rien faire. Car cette situation a des répercussions dans d’autres domaines. Les femmes qui font plus à la maison, ont forcément moins de temps à consacrer à leur vie professionnelle, à leurs loisirs, et même à leur santé. Pendant ce temps, les hommes ont le temps de se reposer, et de développer leur carrière et leurs hobbies.

 

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Quelles solutions ?

À condition que les deux personnes du couple soient de bonne foi, une série de pistes de solutions se dessinent cependant.

  1. Lister toutes les tâches et noter la fréquence et la durée de chacune d’entre elles.
  2. Répartir chaque tâche de manière équitable et en fonction des préférences de chacun. On les note par écrit et on les affiche de façon visible pour ne pas les oublier, on peut aussi utiliser une app avec des rappels, c’est au choix.
  3. S’engager à faire ces tâches correctement et à temps.

Il est important de rappeler que les nouvelles habitudes mettent du temps à s’installer. Les slackers s’appuient souvent sur les non-dits. Si les responsabilités sont clairement identifiées, il ne sera plus possible de faire comme si on ne savait pas. Et si votre partenaire ne prend toujours pas ses tâches au sérieux, c’est qu’il n’a jamais compté s’en occuper. Plus globalement, il faut qu’un changement radical opère au sein de la société, cela passe notamment par les médias, les séries, les livres… comme les BD !

 

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