Ç a y est, le grand moment est arrivé! On vous annonce enfin le nom des entreprises nominées pour remporter le Elle Start-Up Award 2022 dans le cadre de la collaboration We Are Founders x Elle Active Forum. Au travers de cette série d’articles, ELLE met en avant les différentes start-ups sélectionnées et les girl bosses à l’origine de leur création. On a rencontré Ohana Nkulufa, fondatrice de LenArt.
Ohana Nkulufa est le genre de femme qui incarne parfaitement l’expression “I was born this way” (comprenez: “Je suis née comme ça”). Diplômée en histoire de l’art et désormais à la tête de LenArt, une société de leasing spécialisée dans l’achat d’oeuvres d’art, Ohana beigne dans l’univers artistique depuis sa naissance. Avec une tante qu’elle qualifie de collectionneuse hors pair et qui dirige une des meilleures galeries d’art à Kinshasa, un oncle qui s’avère être l’un des plus grands marchands d’art africain au monde, sans parler de cette passion familiale pour les collection de mobilier, de peintures et de sculptures, l’art ne constitue pas seulement une passion pour Ohana mais un réel héritage.
S’il était naturel pour la femme d’affaires de faire carrière dans ce domaine, sa question a longtemps été de savoir comment elle y parviendrait. Aujourd’hui et depuis maintenant plus de deux ans, au travers de sa société, elle permet aux collectionneurs privés comme professionnels de se procurer les oeuvres d’art qu’ils convoitent tant, sans trop devoir se ruiner. Selon Ohana Nkulufa, “LenArt se base sur la manière dont la collectivité consomme de nos jours; une consommation plus lente, sous forme de crédit.”
Comment l’idée vous est-elle venue de fonder LenArt?
Ohana Nkulufa : L’art est un domaine qui intéresse beaucoup de gens mais que peu de gens connaissent. Mon envie était de casser cet élitisme. Par exemple, certaines personnes vont entrer dans une galerie d’art, voir que les prix ne sont pas affichés et ne vont pas oser les demander. Et c’est sur base de ce genre de comportements, un screening naturel, que le monde de l’art opère. LenArt permet aux collectionneurs, peut-être un peu moins fortunés, de commencer la collection d’art dont ils ont toujours rêvé sans devoir attendre plus longtemps.
Quels sont les messages que vous souhaitez véhiculer au travers de cette initiative?
Ohana Nkulufa : L’art fait du bien à l’âme. Je trouve que lorsqu’on peut observer une pièce qu’on apprécie, qu’on a trouvé belle et qui nous a touché, on se sent bien. Je le sais parce que j’ai des pièces à la maison que je ne m’ennuie jamais de voir. Je suis même contente de les voir quand je rentre à la maison. Acquérir une oeuvre d’art est un moment très personnel, bien qu’en définitive, il se partage car là où on la place, les autres pourront certainement en profiter aussi. Mais, en fait, c’est comme la musique. Ça crée une émotion, ça se lie avec d’autres moments clés de notre vie et ça laisse une trace. Et cette émotion est propre à chacun. La manière dont je vais percevoir une pièce sera différente de la manière dont une autre personne le fera alors que l’on contemple exactement la même chose.
Et puis, je pense aussi que l’art, c’est une manière de capturer un moment dans le temps, avec un grand ” T “. Ceux qui ont eu la chance d’acquérir un Basquiat quand il vendait ses oeuvres à $500 dans la rue sont parvenus à capturer un moment dans le temps auquel on ne pourra plus jamais revenir mais qui restera dans l’histoire. Je trouve que c’est aussi à ça que sert l’art, à comprendre le temps et la période dans lesquelles nous nous trouvons depuis un autre point de vue.
Quelle est la plus grosse difficulté que vous avez rencontrée (et que vous rencontrez peut-être toujours) en fondant LenArt? Comment la surmontez-vous?
Ohana Nkulufa : Je crois que la plus grosse difficulté que j’ai rencontrée est surtout que LenArt, finalement, a certes ce côté artistique, mais ça a surtout ce côté financier. Or, je n’ai aucun background en finance et j’ai dû tout apprendre seule. J’ai dû me débrouiller et prétendre que c’était un point que je maîtrisais jusqu’à ce que ce soit vraiment le cas. Vous savez, j’allais frapper aux portes et je pense que ça se voyait tout de suite que la finance n’était pas mon truc. Donc, il a fallu que je me fasse violence et que je me lance dans ce monde auquel je n’appartenais pas du tout. Je pense que c’est le challenge de beaucoup d’entrepreneurs. On part avec une idée qui nous parait très bien jusqu’à ce qu’il faille mettre les mains dans le plat et faire les choses seuls parce qu’on a pas forcément les moyens financiers d’engager des bras pour nous aider.
Une deuxième difficulté est qu’entreprendre en tant que femme, c’est compliqué. Entreprendre en tant que femme noire l’est encore plus. Surtout dans le domaine de l’art qui est un monde dominé par les hommes, et par les hommes blancs. Pour courronner le tout, lorsque je démarchais les banques, j’étais enceinte de six mois et demi. Je suis sans arrêt contrainte de devoir prouver ma valeur, mon expertise et mon expérience. Si j’avais le même âge en étant un homme blanc, je ne pense pas que je devrais me vendre comme je le fais encore aujourd’hui. Je trouve que mes accomplissements devraient être une preuve en soi. Ma condition de femme, de maman et de femme racisée sont des obstacles continuels dans mon boulot et dans la création de LenArt.
Malheureusement, je ne pense pas que ça s’arrêtera là. La seule chose qui change, c’est moi qui prend de plus en plus confiance en moi. Mais, ça reste un exercice compliqué. J’ai de la chance d’avoir un papa exceptionnel qui m’a toujours donné extrêmement confiance en moi et qui m’a toujours affirmé que je pouvais tout faire dans la vie. Que mon seul obstacle, c’est moi-même. Il est très présent dans la boite et dans ma vie personnelle pour me donner les peptalks dont j’ai besoin pour me motiver.
Sous un autre angle, qu’est-ce qui vous plaît dans le fait d’être une femme entrepreneure?
Ohana Nkulufa : Ca dépend des jours (rires). Je pense surtout qu’être entrepreneure me permet d’être fière de moi et de ce que j’accomplis. Et de créer le job de mes rêves. Je n’y suis pas encore arrivée à 100%, mais je suis sur la bonne voie. Ce qui me plait aussi, c’est de me surpasser, d’aller toujours un peu plus loin et de prendre toujours un peu plus de risques. Si on a peur du risque, on ne peut pas être entrepreneure. Moi, j’aime l’adrénaline que les risques et les obstacles à surmonter me procurent. Bien sûr, ça vient avec son lot de problèmes mais le désir d’adrénaline reste toujours plus fort que tout. Sinon, on abandonne.
Parfois, il arrive que les choses bloquent au niveau de ma clientèle. Mais quand je reçois une photo de la part d’un client qui souhaite me montrer sa récente acquisition exposée sur les murs de sa maison, ça efface tous les coups durs. Ca me fait énormément de bien, au risque de paraître égocentrique, de savoir que c’est grâce à moi que cette personne a pu s’offrir cette oeuvre et que cette pièce a pu trouver sa place.
Si vous aviez un conseil à donner à nos lectrices, ainsi qu’aux autres femmes entrepreneures, lequel serait-il?
Ohana Nkulufa : Je pense que mon conseil serait de bien s’entourer et ne pas avoir peur de demander de l’aide. C’est un conseil que je donnerais car c’est un conseil que je ne suis pas forcément. J’ai beaucoup de mal à demander de l’aide. On pense toujours qu’on peut tout faire tout seul mais c’est faux. Il faut pouvoir demander de l’aide et il faut pouvoir aller chercher cette aide.
Un autre conseil serait de ne pas négliger sa vie personnelle. Lorsque l’on est entrepreneure et qu’on crée quelque chose, ce projet devient un peu notre ” bébé “. Et donc, on voudrait pouvoir tout lui donner, parfois au détriment des amis et de la famille qui nous entourent. C’est important de parvenir à faire la part des choses. Evidemment, ce sont des conseils qui ne sont pas faciles à appliquer, je le sais car j’essaie encore moi-même de bien le faire. Mais prendre soin de soi sans culpabiliser est important pour la santé mentale, surtout en tant que femmes.
lenart.be
A propos de We Are Founders
We are Founders, c’est un programme de 9 mois intensifs qui permet aux entrepreneurs de développer leur projet, au départ d’une idée jusqu’à sa finalisation. Grâce aux nombreux partenaires et contacts business, le programme offre la possibilité aux participants.es recevoir des conseils et lever des fonds. Le but de cette formation est de stimuler l’entrepreneuriat, notamment auprès des femmes.
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