Parmi les différentes branches de l’industrie du luxe, la joaillerie tient une place à part. Mélangeant créativité, technicité, artisanat et matières très précieuses, elle doit répondre à un paradoxe : comment surprendre tout en restant intemporelle ? Nous avons posé la question à Vincenzo Castaldo, directeur créatif de Pomellato.
Pomellato fêtait les 20 ans de sa bague iconique Nudo, l’année dernière. Elle a révolutionné la joaillerie en étant la première bague conçue pour être accumulée. Pensez-vous que l’audace est une qualité essentielle dans votre travail ?
Oui ! L’idée de la Nudo imaginée par mon prédécesseur Sergio Silvestris était très innovante, car elle transformait le solitaire en une bague passe-partout, déplaçant l’attention, à cette époque, du diamant vers les pierres de couleur. L’empilabilité était en fait une conséquence de son design minimaliste. L’audace est donc une qualité fondamentale dans le travail d’un designer. Prendre position et défendre son design est si important : il faut avoir confiance en sa vision et en son travail quotidien. Dans mon cas, sans trahir l’identité de Pomellato, je dois concilier mes idées avec l’ADN de la marque, en trouvant quelque chose qui puisse exprimer ma vision de l’évolution de la marque. Ce n’est pas toujours très facile.
Avez-vous des exemples de cet équilibre entre héritage et audace ?
Dans la collection Nudo, je peux parler de Clessidra qui est une nouvelle évolution, car la forme de la Nudo n’a pas été modifiée depuis 2001 ! Pendant les 15 premières années de la collection, nous avons juste joué avec les tailles et les couleurs. Puis, en 2016, nous avons introduit la taille Clessidra, rendant la gemme encore plus nue et reflétant les faces sur une double coupe, reflétant la lumière. Cela a ouvert une nouvelle perspective et nous avons pu concevoir une nouvelle typologie pour la Nudo avec de nouveaux types de bijoux, à commencer par le sautoir ou même le nouveau pendentif qui amplifie la préciosité de cette collection. Cette nouvelle coupe est un bon exemple pour rester connecté au passé et le traduire dans un nouveau design.
Comment avez-vous trouvé l’inspiration pour la coupe Clessidra ?
L’inspiration vient de nombreuses sources différentes, il n’y a pas de chemin régulier que l’on peut suivre. Le processus créatif est imprévisible et change avec le temps, c’est pourquoi il faut garder les yeux ouverts et saisir les petits détails qui peuvent aider dans le processus créatif. La nature est toujours une grande source d’inspiration ! La forme d’une fleur, d’une feuille peut être ensuite traduite dans mon travail. Cela peut aussi être utile pour trouver de nouvelles
solutions. L’inspiration n’est pas quelque chose que l’on peut exprimer par une simple formule, c’est beaucoup plus compliqué.
La couleur vous donne-t-elle de l’inspiration pour concevoir un nouveau bijou ?
Oui, bien sûr. Lorsque vous travaillez sur une collection qui présente des pierres précieuses incroyables, cela devient le moteur du processus créatif. L’année dernière, pour La Gioia, notre collection de haute joaillerie, nous avons trouvé une magnifique parure d’aigues-marines avec une coupe très particulière et nous voulions l’amplifier et la rendre encore plus précieuse, nous avons donc créé des designs qui pouvaient mettre en scène la beauté de ces pierres. De toute façon, les couleurs sont une de nos sources d’inspiration et un élément essentiel pour Pomellato. Même le sertissage de couleur est important. On ne peut pas créer un beau bijou coloré sans penser au sertissage, comme nous l’avons fait pour la gourmette Caméléon arc-en-ciel, où l’on peut découvrir 27 gemmes colorées
différentes. Les couleurs sont notre passion !
Quelle est votre formation ?
J’ai commencé ma carrière dans la mode, pendant presque 15 ans (chez D&G, NDLR). C’était ma première vie (rires) ! C’était vraiment intéressant, car la mode vous donne un état d’esprit très ouvert : vous êtes flexible, agile dans votre processus de créativité. Dans le monde de la création, il est préférable d’être toujours prêt à changer de perspective à chaque fois. C’est probablement la mode qui m’a donné ce genre d’attitude. À l’époque, chaque saison, tout changeait et aujourd’hui, c’est encore plus rapide. Lorsque j’ai commencé chez Pomellato il y a 20 ans, l’une des premières choses que j’ai apprises, c’est que les bijoux sont éternels. Ils ont une durée de vie plus longue que les vêtements ou les accessoires. Chaque fois que nous créons quelque chose, nous devons être conscients que ces bijoux resteront longtemps et doivent trouver une connexion avec les autres collections que nous avons déjà dans la boutique. D’une certaine manière, c’est le nouveau chapitre d’un livre. Il faut garder une cohérence, une évolution, c’est complètement différent de la mode.
L’Italie et Milan jouent-elles un rôle dans la création ?
Oui, complètement. Pomellato est capable de traduire en un bijou l’élégance discrète qui est la véritable essence de Milan. La marque a été fondée en 1967 par Pino Rabolini
et l’intention était de créer une nouvelle façon de porter des bijoux, plus contemporaine, moins conservatrice.
Aujourd’hui, elle représente cette attitude milanaise. Vous ne pouvez la trouver nulle part ailleurs.
Comment décrivez-vous cet esprit milanais ?
L’esprit milanais est vibrant ! Célébré dans le monde entier comme un synonyme de classe et d’élégance, mais aussi de grâce et d’ironie, il véhicule les valeurs clés de l’artisanat, de la créativité et du design italiens. Milan fait partie de l’ADN de Pomellato. Pour Pomellato, « Made in Italy » signifie « Made in Milan ». Le style milanais, chic et affirmé, son élégance discrète avec une touche d’extravagance et l’incomparable
design milanais sont tous infusés dans nos bijoux.
Avez-vous une grande équipe ?
Une partie de mon équipe est composée de designers avec lesquels nous travaillons sur des moodboards lorsque nous essayons d’imaginer de nouvelles combinaisons, de nouvelles formes. Mais l’autre partie de l’étage créatif, très fondamentale, c’est l’atelier. Il est important de vérifier en trois dimensions ce que nous avons dessiné. Sur le papier, une idée peut fonctionner, mais vous pouvez être déçu par le résultat dans la réalité. Et parfois, c’est l’inverse. Ce n’est pas comme dans la mode où vous avez un total look, plus facile à gérer. Dans le monde des bijoux, on travaille littéralement en millimètres. J’ai donc la chance d’avoir dans mon équipe une partie de créatifs connectée à l’esprit et l’autre partie, connectée aux mains.
Pensez-vous que le fait d’avoir votre atelier à domicile libère votre créativité ?
Sans aucun doute. Je ne peux pas imaginer notre étage créatif sans un atelier interne qui rend possible ce que nous avons en tête. Année après année, nous créons un langage commun, à ce stade nous nous comprenons même sans croquis.
Comment vous réinventez-vous ?
La clé, c’est de ne pas prendre les choses pour acquises et questionner tout ce que l’on fait en remettant en question nos certitudes. Avoir la possibilité de changer mes idées, ne pas être statique, être dynamique et comprendre quand c’est le bon moment pour un design, c’est vraiment important.
Comment Pomellato va-t-il continuer à nous surprendre ?
C’est mon travail (rires) ! En explorant de nouveaux territoires. Cela peut paraître très banal, mais en connectant notre identité et notre audace. D’autant plus que maintenant nous élargissons notre public à une nouvelle génération, nous devons créer un nouveau bijou toujours lié au passé qui doit être attrayant pour un nouveau public. L’équilibre parfait entre
le passé, le présent et le futur : il faut être aligné afin de faire évoluer notre vision et la notoriété de notre marque. Personne n’a la «ricetta» (recette) magique. Nous y travaillons (rires) !
Boutique Pomellato, Boulevard de Waterloo 34, 1000 Bruxelles.
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