Lorsqu’elle a fait sa première apparition officielle dans un superbe deux-pièces Schiaparelli métallique pour attirer tous les regards. Mine radieuse, crinière brillante parfaitement coiffée, elle s’est ensuite baladée dans une minirobe Gucci et des lunettes de soleil en œil-de-chat. Et à la première du film qu’elle était venue promouvoir, « Armageddon Time », tel un ange dans une robe blanche scintillante en satin Armani Privé prolongée d’une traîne en cascade, la toile s’est enflammée : on assistait à la renaissance d’Anne Hathaway.

Près de dix ans se sont écoulés depuis l’âge d’or des « Hathahaters », celles et ceux qui attaquaient Hathaway pour… quelle raison déjà ? Trop sérieuse ? Trop enthousiaste ? Trop transparente sur son envie de réussir ? Pour celles et ceux qui se sont échiné·e·s à faire les choses bien – mais ont inexplicablement essuyé des critiques acerbes – l’adoration dont a fait l’objet l’actrice à Cannes était à la fois excitante et tardive. L’équivalent dans la vie réelle de cette scène du film « Le diable s’habille en Prada » où elle se pavane au bureau avec ses bottes Chanel à talons hauts.

©Sharif Hamza

« Dans la vie, on plante des graines, puis on en récolte les fruits à certains moments – Cannes fait partie de ce genre de moments », confie-t-elle autour d’un petit déjeuner dans l’Upper East Side de Manhattan. « Au début de ma carrière, j’avais tellement peur de me planter que j’ai raté beaucoup d’opportunités. J’en suis à un stade de ma vie où je sais qu’une première fois aussi incroyable ne se présente pas tous les jours. Et le fait d’être parvenue à en profiter pleinement constitue une évolution positive. » Elle n’évoque pas frontalement tout ce qu’elle a traversé il y a dix ans, y faisant indirectement allusion (« quand ce qui est arrivé est arrivé »), étant parvenue aujourd’hui à trouver la sérénité. « J’ai travaillé dur pour avoir plus d’indulgence envers moi-même, je refuse de léguer ma paix intérieure à celles et ceux qui ne l’ont pas encore trouvée », explique Anne Hathaway. « Je fais donc de mon mieux pour ne pas craindre le qu’en-dira-t-on et profiter au maximum de la vie. »

Outre « Armageddon Time », Anne Hathaway est à l’affiche de quatre longs-métrages en 2023, dont « Mothers’ Instinct » avec sa copine Jessica Chastain. Elle a par ailleurs été acclamée pour son interprétation de Rebekah Neumann dans « WeCrashed ». « Ça se passe vraiment bien en termes de boulot pour l’instant, j’en suis très reconnaissante », confie-t-elle. Dans ces moments où elle a l’impression d’atteindre de nouveaux sommets – comme lorsqu’elle se tenait sur le tapis rouge cannois –, Anne Hathaway raconte qu’elle prend son jeune moi dans les bras et lui dit : « Regarde ce qu’on a accompli, c’est aussi grâce à toi. » « Je la rassure en lui disant : “Tout va bien se passer.” »

À propos du rôle qui a tout changé

« “Princesse malgré elle”, évidemment. Mais en fait, le rôle qui a vraiment modifié la donne, c’est “Rachel se marie”. C’était la première fois que j’interprétais un personnage compliqué : je devais mettre toute ma compréhension et ma compassion à contribution pour jouer quelqu’un de vraiment complexe. J’ai découvert que c’est ce genre de rôle que je préfère jouer : une sorte de laissée-pour-compte, que je dois aimer et incarner. J’avais été une actrice douce et mignonne. J’avais été une actrice à la mode. D’un coup, j’étais devenue une actrice à part entière. »

©Sharif Hamza

À propos de « Ocean’s 8 » et de son casting 100% féminin

« On a commencé à tourner le lendemain de l’élection de 2016. Nous nous sommes toutes coiffées et maquillées le matin, puis nous avons regardé le discours de défaite d’Hillary. Ensuite, nous avons pleuré, avant de repasser à la coiffure et au make-up. On a enchaîné 20 heures de travail. Parce que les femmes sont vraiment tenaces. J’ai regardé autour de moi en me demandant : “Pourquoi ça a pris autant de temps dans ma carrière pour qu’il y ait autant de femmes sur un plateau ?” Je me souviens précisément de ce que j’ai éprouvé : “Voilà donc ce que ça fait d’être un homme à Hollywood. Où qu’ils aillent, ils sont en meute, c’est tellement facile.” Et j’ai eu envie de ressentir ça plus souvent. Je me suis dit que je devais en faire un objectif : travailler avec d’autres femmes et créer des opportunités pour qu’autant de femmes puissent bosser ensemble. »

À propos des tournages avec des amies

« La dernière personne que j’ai appelée lorsque je me suis sentie mal, c’est ma chère Jessica Chastain. On a travaillé ensemble sur deux films sans jamais se croiser, puis dans “Mothers’ Instinct” on a rattrapé le temps perdu. Le tournage a été très rapide. Un film qui se tourne normalement en 40 jours, on l’a fait en 25 jours. J’ai regardé Jessica et je me suis dit : “Dieu merci, tu es là.” Parce que je savais qu’elle me soutenait, aussi bien comme amie que comme actrice. Quand on a le nez dans le guidon, c’est génial d’avoir quelqu’un vers qui se tourner pour dire : “Est-ce que mon jeu tient la route ?” »

©Sharif Hamza

À propos de l’ambition

« Je suis ambitieuse, et je pense que c’est une bonne chose. Lorsqu’on rêve d’une autre vie, mieux vaut être ambitieux. Je n’ai aucun problème avec ça. J’aime travailler dur et faire preuve de professionnalisme. J’aime fixer la barre haut. Ça me dérange que les hommes soient généralement définis par leur travail, leur talent et leur succès. Si un homme qui réussit semble quelque peu antipathique, on lui laisse le bénéfice du doute. J’ai l’impression qu’il existe un chantage à la sympathie quand on est une femme, sinon on risque d’être incomprise et méprisée. Et je pense que les femmes sont punies plus sévèrement pour les transgressions qu’on leur prête. L’ambition féminine est plus souvent perçue comme transgressive.

À propos de son objectif de carrière

« La longévité. Ça fait 23 ans que je suis actrice professionnelle à Hollywood. J’espère jouer et donner du sens à ce métier aussi longtemps que je le pourrai. J’aimerais explorer ce qui se trouve au-delà des limites que les autres ont fixées pour moi. Ce que j’ai appris, c’est que l’inconnu regorge de merveilleuses promesses. Si je me retrouve en proie à la peur et à la panique parce que je suis un être humain, je me dis : “Tu ne sais pas, alors attends de voir ce qui va se passer.” »

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