Ces entrepreneur·e·s ont déjà tranché : fort·e·s de leur amitié, de leur relation amoureuse ou du lien familial qui les unit, tou·te·s se donnent à fond pour bosser ensemble et réaliser un rêve commun.

Studio Collect : des amies précieuses

Studio Collect, c’est l’histoire de quatre amies, fascinées par la magie qui opère lorsque quatre paires de mains animées par la même passion donnent forme à une idée. Le parcours des sœurs d’âme Hermien Cassiers, Saskia Govaerts, Magaly Hermans et Hannah van Lith s’apparente à un conte de fées. Elles se sont rencontrées à l’Académie des Beaux-Arts d’Anvers et ne se sont plus quittées après leurs études de bijouterie. Saskia : « Notre idée de départ était de partager un atelier pour réduire les coûts, mais nous avons rapidement commencé à réaliser des pièces ensemble, et c’est ce que nous continuons à faire. » Studio Collect a vu le jour en 2013 et quatre ans plus tard, le premier point de vente physique a ouvert dans le fief des jeunes filles, à Anvers. Il y a peu, un deuxième shop a été établi à Gand. On y croise toujours l’une ou l’autre Studio Collector, car ce sont elles qui gèrent les boutiques. « On se relaie », précise Hannah. « C’est donc très pratique d’être quatre. On se charge également toutes ensemble de la conception des pièces, mais pour le reste, les tâches sont clairement réparties. Magaly assure le suivi des commandes et des matières premières dans l’atelier. Saskia s’occupe de la communication et je me charge de l’aspect financier avec Hermien. » Chacune reste à sa place, sauf si l’une d’entre elles part en congé de maternité. Magaly : « Au cours des dix dernières années, nous avons évolué dans nos rôles respectifs. De manière organique, à l’image de Studio Collect. Nous ne nous sommes pas réunies un jour autour d’un business plan ou guidées par des ambitions démesurées. Le studio a évolué en toute simplicité sans qu’on doive trop y réfléchir. »

Cela dit, le quatuor ne laisse rien au hasard. Ses bijoux architecturaux se singularisent par des touches de modernisme, brutalisme et Art déco. La disposition de chaque pierre est mûrement réfléchie. Depuis le début, elles prennent au sérieux leur collaboration, tant comme associées que comme amies. « On essaie d’anticiper les éventuels problèmes », souligne Hermien. « Les départs en vacances, par exemple, ou le lancement d’un nouveau magasin. Avant même qu’un problème se pose, on en discute. Ça permet d’éviter les quiproquos. » Si une divergence d’opinions survient, elles en parlent immédiatement, car il en va de leur amitié. Saskia : « Et on arrive à régler les problèmes à chaque fois. Peut-être est-il plus facile de parvenir à un compromis avec quatre chefs d’entreprise ? Si deux d’entre nous sont en profond désaccord, il y a toujours deux médiatrices pour nuancer la discussion (rires).» «On a conscience de tout ce qu’on pourrait perdre, en plus de l’entreprise », ajoute Hannah. « Notre amitié a trop de valeur pour prendre le risque de la sacrifier. C’est pourquoi on se voit régulièrement en dehors des heures de travail. Le temps qu’on passe entre amies est précieux. »

Comment cette magie opère-t-elle ? Quel est le secret de ce succès collectif ?

Saskia : « Il est important de continuer à voir la valeur ajoutée d’un partenariat. Lorsqu’on crée une entreprise avec un·e ami·e, c’est avant tout parce qu’on croit en cette personne, en sa force et en son talent. Après dix ans, on se voue toujours une grande admiration mutuelle. » Hermien : « Studio Collect, c’est nous quatre. Avec une personne en moins ou en plus, ça ne marcherait plus. » Saskia : « Qu’aucune de nous n’arrête alors (rires) ! » Magaly : « On s’est trouvées sans se chercher. »

Rond Carré Studio : façonner des rêves collectifs

Leurs amis·e· les trouvent dingues de travailler en couple. Mais pour les Bruxellois Jade Vijt et O’nonto Zaman, l’amour qui soude leur couple est indissociable de celui qu’ils vouent à leur métier. Début 2020, juste avant qu’éclate la crise du coronavirus, le duo a fondé sa propre agence de design, Rond Carré Studio. Jade : « On s’admirait l’un l’autre depuis plusieurs années. O’nonto travaillait en tant que directeur artistique et graphiste indépendant, moi comme architecte d’intérieur. La création d’un studio ensemble constituait logiquement l’étape suivante. » Depuis lors, Bellerose, Odyskin, Edji Gallery et Panda Gin figurent parmi leurs clients. Le duo signe également la décoration intérieure de la nouvelle boutique Orta, qui a ouvert ses portes en décembre dernier. « Nous lançons chaque projet à deux », explique O’nonto. « On établit la direction artistique et on crée des mood boards… Mais nous n’exécutons pas tout de A à Z ensemble. On a chacun·e notre spécialité et on s’octroie mutuelle- ment la liberté de faire nos propres trucs. »

Le fonctionnement de Rond Carré Studio fait écho à la répartition des tâches à la maison. O’nonto répond aux e-mails et gère le budget, Jade s’occupe du planning. Après trois ans, la collaboration est fluide, et chacun·e est épanoui, à la ville comme à la maison. Leur plus grande force ? O’nonto : « Je bénéficie chaque jour du feed-back d’un autre esprit créatif qui ne fait pas exactement ce que je fais, mais qui sait de quoi il retourne. Jade me challenge et me pose les questions auxquelles je ne pense peut-être plus. Et vice versa. » Et le plus grand danger ? Jade : « On se blâme parfois pour nos erreurs. Si l’un d’entre nous propose une idée qui échoue, l’autre lui lance “un tu vois, je te l’avais dit (rires) !” »

O’nonto et Jade se sont rencontrés à l’école secondaire. Après s’être perdus de vue, ils ont repris contact au début de la vingtaine par l’entremise d’un ami commun. Ils viennent de célébrer leurs 14 ans de vie commune. Leur relation s’est renforcée et surtout intensifiée depuis le lancement de Rond Carré Studio. « Ça fonctionne dans les deux sens », poursuit Jade. « Le stress au travail se ressent à la maison. Pour tous les deux. Dans ces cas-là, on ne peut pas se tourner vers l’autre pour se distraire. A contrario, la réussite d’un projet procure un sentiment de fierté qui compte double. »

Il n’existe pas beaucoup de marge de manœuvre entre la maison et le studio. Le couple a créé une distance physique en louant un espace de travail extérieur, certes, mais dans leur esprit, les deux mondes fusionnent constamment. « Et c’est tout à fait OK », précise O’nonto. « Nous avons déjà essayé à plusieurs reprises de scinder travail et privé. Sans succès. Quand on va au restaurant, on analyse automatiquement chaque détail : la couleur du plafond, le design du menu… Même en matière de voyages, on choisit toujours des destinations dont on sait qu’elles nous inspireront pour de futures missions. C’est instinctif. »

À quoi rêvent-ils encore en tant que duo (artistique) pour l’avenir ? O’nonto: « Se développer davantage dans ce que nous faisons. Et la scénographie d’une exposition au MoMA… ce serait fantastique. » Jade : « Mais à Bozar, ce serait déjà super ! » Outre Rond Carré Studio, un deuxième enfant ? En choeur : « Une chance sur deux (rires). »

Bernadette Antwerp : telle mère, telle fille

C’est lors d’un stage chez Simone Rocha à Londres que Charlotte de Geyter a eu une illumination : pourquoi ne pas lancer une marque de mode avec sa maman Bernadette ? Elles se manquaient mutuellement et s’appelaient tous les jours. « Le moment était venu de saisir notre chance », raconte Bernadette, créatrice de sa propre marque de mailles, Made by Bernadette, qui avait jusque-là fait ses armes en tant qu’acheteuse, notamment chez Ralph Lauren. Aussitôt dit, aussitôt fait. Fin 2018, mère et fille s’asseyaient à la table des négociations chez Net-a-Porter, prêtes à conquérir le monde avec leurs robes en soie fleuries et colorées. Charlotte : « Nos imprimés constituent la base de notre marque,  ils définissent l’esthétique de chaque collection. Je tiens de ma mère mon amour de la nature. Pendant que je dessine, elle m’en- voie souvent des images de plantes et de fleurs. » Le duo partage d’autres sources d’inspiration, comme l’art, les vieux films et les femmes iconiques, toutes générations confondues. D’ailleurs leur différence d’âge – elles ont près de 30 ans d’écart – représente à leurs yeux leur principal atout. « On se sent aussi bien l’une que l’autre dans les vêtements qu’on crée, et on veut transmettre ce sentiment à nos clientes », affirme Charlotte.

Au cours des cinq dernières années, mère et fille ont construit leur propre monde merveilleux. Outre des vêtements et des accessoires, elles ont lancé une vaste gamme d’objets pour la maison, agrémentée de superbes céramiques, serviettes brodées, coussins et nappes. Pourtant, selon Bernadette, l’évolution la plus précieuse s’est jouée sur le plan personnel. « Nous partagions déjà beaucoup de choses, comme notre humour et notre éternel optimisme, mais depuis que nous travaillons ensemble, notre lien est plus fort que jamais. Je remarque immédiatement quand Charlotte est stressée, alors j’essaie de la rassurer. Elle est perfectionniste, mais dans la mode, il faut par- fois relativiser, sinon on ne fait pas long feu. » Charlotte : « Au début, j’ai eu du mal à trouver le bon équilibre. Mère et fille, meilleures amies, et du jour au lendemain associées, on a dû apprendre à transcender notre lien familial. On travaille ensemble, mais on ne veut pas perdre le lien premier qui nous lie. » Y a-t-il encore des moments où elles sont simplement mère et fille ? « De plus en plus », se réjouit Charlotte. « Par exemple, nous venons de rentrer d’un voyage d’affaires en Suisse. Maintenant, on peut se détendre un peu en échangeant sur des sujets divers et variés. »

Outre les points de vente en Suisse et dans le reste de l’Europe, au Royaume-Uni, en Irlande, au Canada, aux États-Unis, au Mexique et même au Japon et en Australie, on peut également trouver Bernadette Antwerp sur tous les e-shops de luxe, tels que Matchesfashion, Shopbop et, bien sûr, Net-a-Porter, là où tout a commencé. Mais, quelles que soient l’ampleur et la popularité internationale de la marque anversoise – Sandra Bullock, Dakota Johnson et Chrissy Teigen ont déjà été aperçues dans un peignoir Bernadette –, le duo garde les pieds sur terre : « Nous sommes une entre- prise en pleine croissance, mais nous souhaitons avant tout rester une petite famille soudée. »

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