C’est désormais devenu une tradition. Chaque année, alors que les guides touristiques dégainent leur classement des meilleures destinations à faire en 2023, Fodor’s décide de prendre le pli parfaitement inverse en dévoilant son anti-guide des destinations à éviter. Au programme ? Une « No-List » des endroits qu’il faudra penser à reconsidérer cette année.
Rien à voir avec des no man’s land inesthétiques où il fait froid et où ça sent mauvais. Au contraire, toutes les destinations citées dans la liste font même rêver. Et c’est bien ça le problème. Victimes de leur succès, elles tentent aujourd’hui par tous les moyens d’endiguer le tourisme de masse et ses conséquences sur l’environnement et les populations locales. « Malgré tout le bien qu’il peut faire (...), le tourisme contribue de manière significative au changement climatique. Les voyages représentent à l’heure actuelle environ 8 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre et devraient augmenter d’ici à 2030 », explique le célèbre guide. Loin d’user d’un ton moralisateur, Fodor’s propose donc un « appel aux voyageurs et voyageuses à bien réfléchir » aux choix qu’ils font. Dans la liste, on retrouve trois types de destinations : les spots naturels qui ont besoin de repos, les spots culturels victimes de surtourisme et les destinations qui souffrent d’une crise de l’eau.
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Les falaises et calanques françaises
Cette année, exit les jolies calanques françaises et les promenades en bord de falaises normandes. La France est actuellement confrontée à une érosion spectaculaire de son littoral, qui a plus à voir avec une tempête de touristes qu’avec le climat. Chaque année, c’est plus d’un million de visiteurs et visiteuses qui piétinent les falaises d’Étretat en Normandie. Au point que la station balnéaire envisage des jauges. C’est ce qu’a déjà fait le parc national des Calanques de Marseille, pour lequel il faut désormais réserver pour visiter les plages, avec un plafond de 400 personnes par jour.
Le lac Tahoe en Californie
Aux États-Unis, l’augmentation de la circulation le long du lac Tahoe – avec des embouteillages pouvant s’étendre jusqu’à Sacramento – et l’encombrement des sentiers de plage ont provoqué d’importants problèmes de pollution, au point de voir les émissions des pots d’échappement troubler la couleur de ses eaux bleu cobalt.
L’Antarctique
Même problème en Antarctique où, bien que le nombre de touristes reste faible (100.000 environ par an) grâce à divers traités qui la protègent, les transports en avion et en navire favorisent la fonte des glaces. Les touristes se concentrent le plus souvent dans la péninsule antarctique. Résultat, celle-ci a connu le réchauffement des températures le plus rapide et le déclin de la faune le plus marqué de l’histoire.
Les grand must-see d’Italie
Sans surprise, on retrouve Venise dans la liste. Lorsque la Sérénissime a rouvert ses portes après la pandémie, ce sont plus de 80.000 touristes qui se sont vus débarquer chaque jour en été. Elle a aujourd’hui imposé certaines mesures pour éviter l’élévation du niveau de la mer et donc permettre sa survie en tant que ville sur l’eau. Résultat : les bateaux de croisière sont interdits et il faut désormais payer un droit d’entrée pour visiter la ville. Même chaos du côté de la côte amalfitaine durant l’été 2022. Les hordes de touristes venu·e·s admirer les villes côtières pittoresques dignes de tableaux impressionnistes ont provoqué des embouteillages tellement cauchemardesques qu’un système de plaques d’immatriculation alternatif a dû être mis en place.
Amsterdam
Le chiffre fait peur, mais le nombre annuel de touristes à Amsterdam équivaudrait à celui de l’ensemble de la population néerlandaise (17 millions de personnes). Au point que les autorités ont dû prendre des mesures symboliques : retirer le panneau rouge et blanc « IAmsterdam » à Museumplein (un aimant à selfie), bannir les vélos à bière dans le centre, interdire les touristes amateurs et amatrices de cannabis qui se comportent mal dans les coffee shops…
La Thaïlande
S’il y a bien une destination qui souhaiterait se départir de son image hyper touristique, c’est la Thaïlande. Maya Bay, rendue célèbre par le film « La plage » avec Leonardo DiCaprio, a dû fermer en 2018 en raison des graves dommages écologiques causés par les quelques 3.000 visiteurs·euses quotidien·ne·s et leurs bateaux. Désormais, les 155 parcs naturels du pays ferment un mois par an pour permettre à la nature de se régénérer.
Maui à Hawaii
L’accès à l’eau douce est souvent difficile pour les îles. Or, le tourisme consomme la majorité de l’approvisionnement (piscines, pelouses, terrains de golf…). Sur l’île de Maui, la disparité dans la distribution d’eau entraîne d’ailleurs de graves conflits. Les Hawaïen·ne·s autochtones paient en outre l’augmentation du coût de la vie causée par la croissance de l’industrie touristique, avec un accroissement du nombre de sans-abri.
Les Cornouailles en Angleterre
La patrie des cornish pasties, connue aussi pour ses vagues de surf épiques, ne supporte plus non plus le nombre grandissant de touristes. La vie des locaux·ales est non seulement devenue impossible en haute saison, mais les locations de vacances à court terme ont fait grimper le coût de la vie, provoquant une véritable crise du logement. La société de location de logements britannique Sawday’s a juré de plafonner le nombre de propriétés disponibles dans le comté.
Le sud de l’Europe
L’été 2022 a connu la pire sécheresse de l’hémisphère Nord, qui a asséché des rivières, provoqué des incendies de forêt, endommagé les économies agricoles et menacé des espèces aquatiques et les moyens de subsistance de milliers de personnes. Celle-ci a touché 65 % de l’Europe. Les faibles niveaux d’eau du Rhin et du Danube ont perturbé le secteur des croisières fluviales. Les réservoirs d’eau espagnols étaient à 40 % de leur capacité à la fin du mois de juillet. Certaines provinces du nord de l’Italie n’ont presque plus d’eau pour cultiver. Même chose du côté des îles idylliques de Grèce.
L’Ouest américain
Outre-Atlantique, près de 23 années de sécheresse ont entraîné une réduction drastique des réservoirs des lacs Powell et Mead sur le fleuve Colorado. Cette situation a eu de graves répercussions sur 40 millions de personnes dans plusieurs États du sud-ouest qui dépendent de l’eau pour la consommation, l’agriculture, les loisirs et le tourisme. Ces deux lacs risquent d’ailleurs d’être considérés comme des « bassins morts » si la situation persiste.