Blondes ou brunes, blanches ou spéciales, fruitées ou gueuzes, le Belge les aime toutes. Et il faut bien l’avouer, la Belgique est reconnue dans le monde entier pour l’excellence de ses breuvages houblonnés. Rencontre avec quatre brasseries artisanales et micro-brasseries belges qui ont de quoi faire mousser.
1. Brasserie VBDCK, l’atypique
Lors de notre entretien avec Charlotte De Cock, cofondatrice de la brasserie, elle revenait des États-Unis où elle avait participé à la Belgian Beer Week, événement organisé sur la côte Est, entre Orlando et Washington, pour mettre en valeur le patrimoine brassicole belge. "Notre bière nationale est de plus en plus appréciée aux États-Unis. La Belgique y est toujours considérée comme le pays de référence en la matière". Fondée en 1867, la brasserie Verbeeck-Back cesse ses activités en 1966. En 2015, cinquante ans plus tard, Charlotte relance l’affaire avec son frère et ils y ajoutent leur nom, d’où VBDCK. "Initialement, nous avions l’intention de changer l’affectation de l’ancien bâtiment de la brasserie, mais lors de la visite nous en sommes tombés amoureux. C’était comme si le temps s’y était arrêté. Il n’y avait aucun doute, c’est là que nous voulions nous installer. Encore fallait-il pouvoir faire revivre la brasserie vu que la bâtisse se trouve au milieu du village de Tielrode. Heureusement, nous avons reçu l’accord de la commune et l’ancienne famille de brasseurs a approuvé nos projets avec enthousiasme."
Par miracle, l’une des vieilles bouteilles de bière laissées sur place contenait encore une levure vivante, ce qui a permis de retrouver la recette originale de la bière. Mais la brasserie actuelle n’a rien de traditionnel, seul le nom d’origine de la bière, Kerel, a été conservé. Cette bière fait exception dans le paysage brassicole en raison de ses techniques de fabrication très novatrices, ses nombreuses versions et saveurs uniques imaginées par Charlotte et Joseph, son frère brasseur. « Nous voulions produire quelque chose de complètement différent. D’où notre slogan ‘Untouched by monks’. Nous proposons des styles de bière traditionnels comme la Saison ou la bière de garde, mais nous préférons élaborer des bières aux goûts plus contemporains comme la Kaishaku, une bière blonde avec une touche japonaise, une IPA avec du pamplemousse ou une Paradise Ale avec des notes de yuzu et de figue de Barbarie", explique Charlotte. La bière Kerel peut être consommée en de nombreuses occasions : avec des tapas, lors d’un pique-nique estival ou d’un barbecue, comme apéritif ou mélangée à un cocktail branché. Charlotte a actuellement un faible pour la Paradise Ale, une bière exotique, mais sa préférée reste sans aucun doute la Saison, très désaltérante avec 5,5 % d’alcool. Une véritable prouesse qui a valu à la brasserie d’être récompensée !
2. Brasserie Surréaliste, l’audacieuse
Tout commence en 2018, dans le garage de deux frères trentenaires. Édouard et Charles Grison décident de brasser artisanalement leur propre bière. Leurs premiers brassins confectionnés, l’envie de se développer en créant un repaire autour de la bière dans leur ville de prédilection, Bruxelles, se fait rapidement ressentir. C’est en automne 2022, dans un imposant bâtiment industriel Art déco datant de 1932, situé dans le quartier animé de Dansaert, que la brasserie ouvre ses portes. Dès l’entrée, ce lieu insolite surprend par ses volumes grandioses et sa décoration décalée. On s’imagine en Italie, dans le patio d’un hôtel de Venise, où miroirs anciens, lustres majestueux et canapés en velours rose donnent le ton. Une fois les imposantes portes vitrées franchies, on pénètre dans un espace extraordinaire où l’architecture industrielle se mêle à des éléments néogothiques. Un univers inspiré des églises et des lofts new-yorkais, des grands volumes et de l’artisanat, et construit autour d’objets chinés par Charles. Difficile d’imaginer qu’une brasserie dote d’une installation de 10 hl se trouve au sous-sol, juste sous nos pieds ! "Surréaliste", un nom pas si farfelu en définitive...
Aujourd’hui, on s’y rend pour traîner au gigantesque bar et profiter du son d’un "music band", déguster un menu "food sharing" ou une cuisine "Belgian fusion" autour de tables en bois à n’en pas voir le bout et, surtout, savourer leur collection de bières artisanales houblonnées ou barriquées. En vedette ? "Hands of Desire", leur première gamme de "bières vieillies en fût", dans des fûts de vin en chêne et des fûts de mezcal. "Hand" fait référence au travail artisanal du brasseur. En effet, contrairement à une bière classique fermentée dans une cuve en inox pendant quatre semaines, celles-ci sont élaborées à partir d’associations complexes puis vieillies en fûts pendant plusieurs mois (de 6 à 18 mois). Un long procédé qui confère une aromatique particulière insufflée par la barrique. Quant au mot "Desire", il évoque les liquides précieux et désirables que constituent ces bières affinées en fût. La recette du chef à reproduire ? Un burger de porc effiloché mariné à la bière Surréaliste... à se damner ! Une expérience multi-sensorielle où l’on explore la bière autant que la nourriture, l’art et la musique, dans un environnement surréaliste.
Place du Nouveau Marché aux Grains 23, 1000 Bruxelles.
brasseriesurrealiste.com
3. Brasserie La Source, l’expérimentatrice
Derrière chaque micro-brasserie se cache sans aucun doute un fervent passionné de bière. C'est le cas de La Source, un espace hybride, entre bar et brasserie, imaginé par Nina Carleer et son époux, Mathieu Huygens, grand amateur de ces boissons houblonnées. Pendant quatre ans, tel un chimiste, Mathieu s’est amusé chez lui à développer ses compétences dans le brassage de dizaines de bières en testant des recettes et des associations de goût. Un loisir qui a rapidement dépassé le seuil de sa maison pour s’élever à plus grande échelle au cœur de Bruxelles. L’envie ? Créer un espace où il est possible de déguster des bières à la source, produites sur place et servies depuis les "tanks". Un "brewpub" autrement dit. Pari réussi pour le duo qui a su créer cet endroit convivial qu’est La Source, une adresse où savourer de délicieuses pintes, brassées au sein même des locaux, à leur niveau maximal de fraîcheur. Une expérience optimale du houblon à ne pas manquer !
Graphistes de formation, Nina et Mathieu se devaient d'imaginer un lieu attractif et vivant, à travers des éléments visuels ludiques. Et leurs boissons originales et chatoyantes n’ont pas non plus échappé à leur talent ! Des cannettes aux murs, les illustrations sont réalisées par Nina en linogravure. Un travail titanesque qui apporte une personnalité unique à cette micro-brasserie. Novatrice, La Source aime sortir des sentiers battus afin de bouleverser les conceptions existantes autour de la bière. De nouveaux produits font souvent leur apparition, en plus de la production régulière, dans le but de surprendre le public et de lui faire découvrir de nouvelles saveurs. Des boissons houblonnées et troubles faisant la part belle à des aromatiques fruitées et tropicales ainsi que des breuvages acidulés et créatifs, de quoi renforcer notre amour pour la bière et même convaincre les plus réfractaires. Les immanquables ? "La Meute", une IPA trouble caractérisée par une aromatique intense de fruits tropicaux et de subtiles notes herbacées et résineuses, ou encore, la "Taupe" à savourer avec des huîtres. Un accord fan-tas-tique !
Rue Dieudonné Lefèvre 4, 1020 Bruxelles.
lasourcebeer.be
4. Force Majeure, la sans alcool
C'est en 2019, juste avant la pandémie, que commence l'histoire de Force Majeure, la toute première brasserie de bières spéciales sans alcool en Belgique. Stijn Panis, ancien consultant financier passionné de sports d’endurance en a eu l’idée lors de sa préparation au triathlon Ironman de Nice en 2017. "Au fur et à mesure que j’augmentais mon nombre de kilomètes à l’entraînement, je me suis de plus en plus inquiété de l’impact de mon alimentation sur mes résultats. Et force a été de constater que mon péché mignon - déguster régulièrement une bonne bière - m’empêchait de progresser". Mais en Belgique, il n’était pas facile de trouver de la bière sans alcool, contrairement aux Pays-Bas voisins où il vivait à cette époque. "Je trouvais cela tellement étrange pour un pays brassicole comme la Belgique. Début 2019, j’ai abandonné mon travail et j'ai décidé de me consacrer entièrement à la création de Force Majeur", explique ce passionné de bière.
La brasserie a été la première à se consacrer exclusivement à la production de bières spéciales sans alcool en Belgique. "C'est précisément cette orientation qui nous permet de préserver ce qui fait la spécificité des bières spéciales belges : une saveur intense et un caractère distinct". Ses productions belges classiques promettent une expérience gustative à laquelle un amateur de bière belge est habitué, mais avec une teneur en alcool de 0,5 % maximum. "Comme notre bière subit une fermentation, elle produit toujours un peu d’alcool, un pourcentage qui est également présent dans certains fruits tels qu’une banane mûre ou un jus d’orange fraîchement pressé. Par ailleurs, nous nous en tenons au processus de brassage traditionnel qui confère à notre bière beaucoup de corps et de saveur. Force Majeure évite la désalcoolisation et l’ajout d’arômes", explique Stijn. Aujourd’hui, la gamme comprend cinq bières spéciales sans alcool : des bières blondes et brunes, une triple, une triple houblonnée et une kriek. L’accord de bière préféré de Stijn ? "La bière se marie avec de nombreux plats, mais si je dois choisir, je préfère boire une triple lors d’un barbecue en été, en profitant du beau temps."
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