Des initiatives émergent pour soutenir l'entrepreneuriat féminin, mais l'accès au financement reste un obstacle clé, affecté par des préjugés et un manque de connaissances financières, de réseau et de visibilité. Des efforts supplémentaires sont nécessaires.
Les femmes s'affirment de plus en plus dans le monde des affaires, lançant des entreprises, prenant des initiatives, et développant des projets innovants. Cependant, il subsiste encore un écart significatif entre les hommes et les femmes en ce qui concerne leur accès au financement et leur capacité à constituer un patrimoine financier solide. Dans cet article, nous explorons le concept du "Gender Investing Gap" et du "Gender Funding Gap" avec Loubna Azghoud, Serial Impact Entrepreneur et engagée pour plus d'égalité de genre dans l'économie, pour comprendre leurs origines, leurs impacts, et les initiatives visant à les réduire.
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Comprendre ces écarts
Le Gender Investing Gap révèle l'écart entre les hommes et les femmes en matière d'investissement financier. Selon une étude de JP Morgan, 78 % des femmes épargnent de manière assidue, mais seulement 18 % investissent régulièrement. Une autre étude menée par le BCG montre que les femmes ne prennent pas moins de risques que les hommes, mais elles sont plus enclines à évaluer minutieusement les risques avant de s'engager. De plus, elles diversifient davantage leur portefeuille, ce qui peut entraîner un rendement financier plus élevé. Les femmes investissent également plus facilement dans des initiatives durables. "Malgré ces pratiques financières judicieuses, elles restent en sous-effectif dans le domaine de l'investissement. Les raisons sont multiples et incluent la précarité financière accrue des femmes, l'écart salarial persistant, et d'autres facteurs sociaux," explique Loubna.
Le Gender Funding Gap quant à lui désigne l'écart entre les hommes et les femmes entrepreneurs en ce qui concerne leur capacité à lever des fonds pour leurs entreprises. En 2021, en Europe, sur 100 milliards de dollars levés en capital-risque, seulement 1,1 % étaient destinés aux fondatrices. En 2022, ce chiffre a chuté à 0,9 %. "Les causes de cet écart sont nombreuses, notamment la prédominance masculine dans le secteur financier, les préjugés et les biais inconscients concernant les compétences des femmes entrepreneuses, ainsi que les préoccupations liées à la maternité et à la vie familiale. Le manque de réseau et de visibilité est également un facteur entravant l'accès au financement pour les entrepreneuses," précise Loubna. Il convient également de noter que les choix sectoriels des entrepreneuses peuvent influencer l'accès au financement, car les investisseurs sont parfois plus réticents à soutenir certains secteurs.
Secteurs impactés et initiatives positives
Ces écarts de genre affectent tous les secteurs d'activité, car ils sont davantage liés au genre des entrepreneurs qu'à la nature de leur entreprise. Toutefois, certains secteurs peuvent sembler moins attrayants pour les investisseurs, et cette tendance se reflète également dans l'accès au crédit bancaire, où les femmes entrepreneuses sont plus souvent confrontées à des refus que leurs homologues masculins.
Au fil des années, de nombreuses initiatives ont vu le jour pour soutenir l'entrepreneuriat féminin, en particulier pour accompagner les femmes entrepreneuses dans leurs premiers pas. Cependant, les efforts pour combler les écarts en matière de financement sont encore relativement embryonnaires. En Europe, certaines femmes entrepreneuses se sont mobilisées pour créer leurs propres solutions, comme le Fonds Sista en France.
Le frein de l’accès au financement
L'accès au financement est un obstacle majeur pour l'entrepreneuriat féminin. "Les préjugés, la discrimination, le manque d'information, de connaissance financière, de réseau et de visibilité rendent les projets portés par des femmes moins attractifs pour les investisseurs. De plus, le jargon financier et les codes spécifiques au secteur peuvent représenter un obstacle supplémentaire, notamment pour les entrepreneures en début d'activité," ajoute Loubna.
Pour surmonter ces défis, Loubna recommande aux femmes entrepreneuses de croire en leur projet, de se préparer en fonction de leur interlocuteur (banquier, investisseur, etc.), de s'informer sur les différentes possibilités de financement, et surtout de ne pas rester seules. Son premiers conseil ? Femmes entrepreneures : préparez votre pitch, développez un réseau de relations et faites-vous accompagner par des professionnels !
S'entourer d'autres entrepreneures et d'organisations de soutien peut faire toute la différence.
High Her comme solution
Loubna est à la tête de High Her, une organisation dont la mission est de réduire le Gender Funding Gap et d'accompagner les femmes entrepreneures dans leur recherche de financement, en particulier pour les premières étapes de développement. High Her propose la Money Academy, un programme de 10 semaines visant à renforcer les compétences en finance, en leadership personnel et en entrepreneuriat. L'organisation a également mis en place un réseau de solutions de financement, rassemblant des fonds d'investissement, des business angels et des organismes de prêt préférentiel, pour répondre aux besoins des entrepreneures en fonction de leur secteur d'activité. Enfin, High Her envisage de mener des études et de plaider en faveur de changements auprès des institutions pour réduire les inégalités de financement.
"Grâce à ces efforts et d'autres initiatives similaires, nous pouvons espérer un avenir plus équilibré et inclusif pour toutes les entrepreneuses. Il est temps d'oser parler "cash" et de construire son indépendance financière, quel que soit son genre," conclut Loubna.
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