Avec la série Apple Cider Vinegar, Netflix nous plonge dans l’univers trouble de la désinformation et des influenceur·ses peu scrupuleux·ses. Inspirée de l’histoire vraie de Belle Gibson, une jeune femme australienne qui a prétendu guérir d’un cancer grâce à des méthodes de soins alternatives, la série met en lumière les dangers d’une communication bien léchée basée sur des mensonges et son impact dévastateur, surtout lorsqu’elle touche à la santé.
Dans le contexte actuel où les fake news prolifèrent (et vont s’intensifier), notamment avec la décision de Meta et X d’arrêter la vérification des informations publiées, cette série pose une question essentielle : comment distinguer la vérité sur Internet et les réseaux sociaux ?
Un récit glaçant sur la face cachée du bien-être
Apple Cider Vinegar nous plonge dans l’histoire folle de Belle Gibson, une influenceuse australienne en pleine ascension, qui a bâti un empire commercial autour de son soi-disant combat contre un cancer du cerveau. Applications mobiles, livres de recettes “miracles”, conférences… toute son entreprise est en réalité basée sur un mensonge. Mais plus sa notoriété et son succès croissent, plus la façade se craquelle : finalement, Belle n’a jamais fourni aucune preuve de sa maladie, ses méthodes ne sont basées sur aucun fondement scientifique, et ses mensonges ont des conséquences désastreuses sur de nombreuses personnes qui la suivent et qui décident d’arrêter leur traitement pour suivre ses recommandations mettant leur vie en péril.
Le scénario, inspiré librement d’une histoire vraie, déconstruit progressivement l’illusion qu’elle a créée. Le réalisateur capture l’ascension fulgurante de Belle avant de dévoiler la face sombre de son succès. L’esthétique minimaliste de la série, souvent baignée de lumières douces copiant les photos d’univers bien-être sur Instagram, contraste violemment avec la noirceur du personnage et de son mensonge qui se révèlent au fil des épisodes.
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L’essor des fake news et l’influence des réseaux sociaux
Dans un monde où l’information circule à la vitesse de l’éclair, amplifiée par une indifférence croissante envers la multiplication des fakes news, Apple Cider Vinegar fait l’effet d’une claque et nous invite à questionner notre crédulité envers les personnes que l’on suit sur les réseaux sociaux. La série démontre comment les réseaux sociaux propulsent des discours sensationnalistes, favorisant les contenus viraux au détriment de la véracité. Comment une influenceuse a-t-elle pu tromper des millions de personnes – dont des journalistes et des investisseurs – sans que personne ne prenne la peine de vérifier ses dires ? Il faudra attendre plusieurs années pour que la presse révèle son arnaque.
Le cas de Belle Gibson n’est pas isolé et n’est que la pointe de l’iceberg. D’autres influenceurs ont été épinglés pour désinformation, publicité mensongère et arnaque, ces dernières années, surtout dans les domaines de la nutrition, du développement personnel ou des soi-disant “remèdes naturels”. Le manque de régulation stricte et la confiance aveugle accordée à certaines figures publiques nourrissent ces dérives.
La suppression récente du fact checking sur Facebook – même si elle a suscité une vive polémique – soulève de nouvelles questions sur le rôle des plateformes dans la propagation des fake news. Une autoroute pour les complotistes, les extrêmes et toute personne mal intentionnée … qui auront désormais accès plus facilement à un public souvent très jeune et naïf.
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Les dangers des médecines alternatives non réglementées
L’un des points les plus marquants de la série est sa critique acerbe des médecines alternatives pratiquées aveuglement et sans encadrement suffisant. Si certaines pratiques complémentaires comme l’acupuncture ou la phytothérapie sont reconnues pour leurs bienfaits, d’autres, comme l’absorption en grande quantité de vinaigre de cidre, l’alimentation 100% liquide ou la pratique de l’Ayahuasca (une substance psychotique) sont à considérer avec précaution, surtout lorsqu’elles prétendent guérir des maladies graves voire incurables. Elles peuvent se révéler non seulement inefficaces, mais aussi dangereuses, voire mortelles si le ou la patient·e se détourne de la médecine traditionnelle. Belle Gibson n’a pas simplement menti sur sa maladie : elle a aussi convaincu des milliers de personnes de suivre des traitements inutiles, les détournant parfois de soins médicaux essentiels, jusqu’à provoquer leur mort anticipée.
Mais il serait faux de croire que ce problème touche seulement la sphère des influenceur·euses. Des professionnel·les de santé sans éthique profitent également de l’absence de cadre, du désespoir des malades et de leur crédulité pour vendre des “cures détox”, des traitements miracles ou des produits sans aucune efficacité prouvée. L’absence de preuves scientifiques et le manque de contrôle renforcent ces dérives, surtout sur les réseaux sociaux où n’importe qui peut dire à peu prêt n’importe quoi.
Face à cette menace, des initiatives voient le jour. Certains pays durcissent leur législation en imposant des vérifications rigoureuses sur les discours liés à la santé en ligne. Des collectifs de scientifiques et de journalistes se battent pour rectifier ces fausses informations, à l’image de ce qui se passe dans la série. Mais le combat reste titanesque face à l’ampleur du phénomène.
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Une série nécessaire dans un contexte inquiétant
Apple Cider Vinegar ne se contente pas de relater une histoire choquante : elle sert de véritable signal d’alarme, en résonance avec l’actualité. Dans un monde où la médecine est souvent questionnée par des croyances complotistes portées par des fous aux airs de gourous, et où les réseaux sociaux font de messages trompeurs des informations virales, la série rappelle l’importance de vérifier ses sources, de rester critique face aux discours trop beaux pour être vrais et de faire confiance à la science.
Elle s’inscrit dans la lignée de productions qui remettent en question l’impact des réseaux sociaux sur notre société, à l’instar de Derrière nos écrans de fumée ou Don’t Look Up.
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Notre avis
Apple Cider Vinegar capte notre attention dès les premières secondes avec Toxic de Britney Spears en fond, le ton est donné. Les actrices Alycia Debnam-Carey (vue dans The 100) et Kaitlyn Dever (l’une des futures stars de la saison 2 de The Last of Us) sont incroyables. Elles réussissent à transmettre toute la complexité de leurs personnages, entre charisme et manipulation, tristesse et dégoût, et c’est un vrai régal de les voir à l’écran. Niveau musique, on est carrément servis avec du Doja Cat, Katy Perry et bien d’autres hits qui viennent parfaitement accompagner l’atmosphère de la série.
Mais ce n’est pas tout : Apple Cider Vinegar déconstruit tout un mythe petit à petit, avec une narration qui tient en haleine. Ce n’est pas juste une série à regarder, c’est un véritable avertissement qui nous rappelle d’utiliser notre cerveau même quand on scroll compulsivement.
Les 6 épisodes sont à dévorées de toute urgence sur Netflix.