Parler sexualité, corps et intimité avec ses enfants demeure souvent un grand moment de solitude pour les parents. Comment répondre sans gêne à la question fatidique « Comment on fait des bébés ? », gérer la découverte du corps, aborder la prévention des agressions sans inquiéter ? Tessy Vanderhaeghe, autrice de “100 petites conversations à avoir avec son enfant”, nous aide à y voir plus clair.

1. “Comment on fait des bébés ?”

La question qui fait transpirer même les parents les plus détendus. Pourtant, elle est bien plus existentielle que sexuelle pour un enfant. Il veut simplement comprendre d’où il vient, pas décoder les secrets de la reproduction humaine en détail.

La règle d’or ? Toujours répondre, peu importe l’âge, en adaptant son discours. « Un bébé grandit dans une poche spéciale à l’intérieur du ventre, et il sort par un canal appelé le vagin ». Précisons que ce n’est pas l’estomac (histoire d’éviter les visions cauchemardesques de bébés digérés dans le ventre). Puis, en fonction de l’âge, on peut introduire la notion d’ovule et de spermatozoïde, deux petites graines microscopiques nécessaires à la création d’un bébé. Si l’enfant en veut plus, on peut expliquer que ces cellules se rencontrent parce que le pénis entre dans le vagin. Le maître-mot ? Utiliser le bon vocabulaire, sans euphémismes.

2. Le moment du bain

Jusqu’à quel âge peut-on prendre le bain avec son enfant ? Réponse : pas de règle fixe. L’enfant développe une conscience de son intimé entre 3 et 5 ans. Le signal d’alarme ? Les fameux « beurk » ou les regards fuyants. Idem pour les fratries : si un enfant montre une gêne ou refuse de partager son bain, on respecte son besoin de distance.

Autre sujet d’inquiétude : la curiosité des enfants envers les parties intimes de l’autre. Rien d’anormal à ce qu’ils observent, comparent ou posent des questions. C’est le moment idéal pour rappeler qu’on ne touche pas les parties intimes des autres, dans la famille comme ailleurs.

3. L’autostimulation : normal ou pas ?

Question récurrente : « Mon enfant touche son sexe, dois-je m’inquiéter ? » Réponse : non, c’est tout à fait normal ! Les bébés avec un pénis découvrent cette zone vers 9-10 mois, ceux avec une vulve un peu plus tard, vers 11-12 mois. Vers 15 mois, ils commencent à se frotter pour le confort et la relaxation, et non par recherche de plaisir comme les adultes.

Comment réagir ? Pas d’engueulade, pas de honte. On redirige l’attention vers un autre jeu sans culpabiliser. Vers 3 ans, on peut verbaliser : « Je comprends que c’est agréable, mais c’est une chose que l’on fait dans des endroits privés comme la chambre ou la salle de bain. »

Le seul signal d’alarme, c’est quand l’enfant ne fait plus que ça, au point de se couper du reste. Si la masturbation devient une activité compulsive, qu’il ne veut pas arrêter même en privé, mieux vaut consulter un professionnel pour éviter tout trouble sous-jacent.

4. Et si on est surpris dans un moment intime ?

L’angoisse absolue. Un enfant entre sans toquer, surprend ses parents et pose THE question. Pas de panique. On ne fait pas comme si de rien n’était. L’enfant sait qu’il a vu ou entendu quelque chose d’inhabituel.

On met des mots : « Parfois, les adultes partagent des moments intimes parce qu’ils s’aiment. Ce sont des choses privées qui se font entre adultes consentants. Ce n’est pas pour les enfants. Est-ce que tu as des questions ? » L’important, c’est de rassurer l’enfant : « On ne s’est pas fait mal, on fera plus attention ». Et bien sûr, on instaure la règle du respect de l’intimité : « Quand on entre dans une chambre, on toque. Comme je le fais pour toi. »

Ce qu’il ne faut surtout pas faire ? Se fâcher, crier, faire honte à l’enfant ou le culpabiliser. Cela risque de lui faire associer la sexualité à quelque chose de sale et tabou.

5. Comment parler de prévention sans inquiéter ?

Impossible aujourd’hui de faire l’impasse sur la prévention des agressions. Mais comment en parler sans terroriser son enfant ? La clé, c’est d’adopter la même approche que la sécurité routière : on ne lui dit pas qu’il risque de se faire écraser à chaque passage piéton, mais on lui apprend à regarder des deux côtés avant de traverser.

L’éducation à la sexualité, c’est avant tout donner à l’enfant les outils pour comprendre son corps et le protéger. « Ton corps est à toi. Personne n’a le droit de toucher tes parties intimes, sauf dans des cas très précis (médecin, parents pour l’hygiène, etc.). Personne ne peut les regarder ou les prendre en photo. Si ça arrive, viens m’en parler, je te croirai toujours. »

 

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