Le cas Barbie
Pour ce qui est de la carrière et de l’explosion du plafond de verre, on peut désormais compter sur cette figure pop inattendue.
Depuis 1959, on l’a connue housewife, gymnaste ou instit’. Elle devient enfin chef de sa propre boîte, soutenue par des ambassadrices de choix : de vraies femmes, fondatrices de sociétés américaines (dont Reshma Saujani, CEO de Girls Who Code, une initiative pour développer la place des femmes dans le secteur des nouvelles technologies). « Barbie a toujours voulu encourager les petites filles à accomplir leurs rêves. Or cette année, les femmes les plus influentes du monde ont fait la couverture du Times, prouvant qu’elles sont capables de changer le monde », déclare Mattel. Dans le package : tailleur rose sexy, stilettos, it-bag, smartphone, tablette, profil LinkedIn.
L’entrepreunariat au féminin, c’est vraiment ça ? Aux States, les observateurs s’insurgent et rappellent que le tailleur moulant et le lipstick fuchsia ne sont pas indispensables pour obtenir des financements auprès d’éventuels investisseurs. La réponse de Michelle Chidoni, porte-parole du fabriquant : « Nous essayons toujours d’inscrire Barbie dans l’époque. Les femmes entrepreneurs sont plus nombreuses aujourd’hui. C’est une bonne manière d’encourager les filles à s’intéresser à ce métier. » Ricanements dans la salle. Sauf que depuis 2010, la marque fait vraiment de gros efforts, à travers sa ligne « I Can Be » (Barbie présidente, Barbie astronaute…) pour lutter contre les clichés qu’elle a elle-même contribué à pérenniser.
Puisqu’il n’est pas imaginable d’interdire à tous les enfants de jouer avec ces poupées, autant se réjouir d’une évolution, même un chouïa déguisée, de l’image qu’elles véhiculent.
Entre l’image éculée de la frustrée poilue qui hait les hommes et la figure de la nympho qui préfère la nudité au débat, il reste à signer l’armistice. Le féminisme en carton n’a pas tout bon, le féminisme radical et excluant non plus. Et si on composait un bon juste milieu plein de lucidité ?
L’avis de la pro
Joëlle Lockman, chargée de mission pour Decider’s, cabinet de conseil stratégique en entreprise, très engagé dans l’entrepreneuriat au féminin
(www.deciders.eu).
« C’est dès le plus jeune âge que les stéréotypes se forment et créent des obstacles. Une Barbie chef d’entreprise, c’est un bon début pour faire entrer les possibles dans l’imaginaire des petites filles. Lancer sa boîte, gérer une entreprise, peu de femmes le font, même si elles en ont la capacité. Les freins sont aussi psychologiques, il faut oser se faire confiance ! Alors, en rêver dès le plus jeune âge, c’est un excellent début ! Le tailleur rose ? J’adore l’idée. Même si ça ne donne rien de chic en vrai. »
Le féminisme 4.0
Outre-Atlantique, on les appelle les « Next Wave Feminists » ou « Digifeminist ». Des filles nées avec un clavier entre les mains, ultra-informées sur les questions de genre, très engagées virtuellement, artistiquement, et disposant d’un esprit critique acéré. Des filles capables de tenir tête, sur les forums internet comme dans la vie, à tous les rétrogrades, arguments massues à l’appui. Des filles souvent très à l’aise dans leur corps et dans leur nudité, qui combattent pour les droits des femmes, et rejettent d’un même cri la transphobie et l’homophobie. Comme Arvida Byström, photographe suédoise en vogue, qui résume ce courant : « Être féministe aujourd’hui ne veut pas dire se caler sur les notions de 1968, mais détecter les nouveaux tabous et zones d’exclusion. »
L’avenir, c’est ça !
À voir, le Tumblr arvidabystrom.tumblr.com