Shang Xia, Beijing

Shang Xia, Beijing

Lancée en 2010 en Chine par Hermès, la marque Shang Xia débarque à Paris le 12 septembre avec l’ouverture d’un premier magasin hors de Chine censé permettre de tester son potentiel auprès de la clientèle en Europe.

La marque aux ambitions internationales ne compte pour l’instant que deux boutiques en Chine, ouvertes à Shanghai fin 2010 puis Pékin fin 2012.

Paris, capitale du luxe, accueillera la troisième sur 70 m2, près d’un magasin Hermès de Saint-Germain des Prés. “C’est très symbolique et cela servira de test auprès des clients qui ne sont pas chinois“, explique Patrick Thomas, le gérant de Hermès.

Shang Xia, qui signifie “le haut et le bas” ou encore “le passé et l’avenir”, se veut une union de l’est et de l’ouest, selon Hermès. La marque propose mobilier, objets pour la maison, vêtements, bijoux et accessoires inspirés des savoir-faire chinois, usant du bambou, du cachemire de Mongolie, du jade…

Son chiffre d’affaires n’est encore que de quelques millions d’euros et Shang Xia n’est pas rentable. Mais “elle le sera dans deux ou trois ans“, assure M. Thomas, qui cite son célèbre prédécesseur chez Hermès: “Jean-Louis Dumas disait toujours: Ne vous occupez pas de la rentabilité. Faites de belles choses, les bénéfices suivront. C’est exactement ce que nous faisons avec Shang Xia“.

Santé financière éclatante

Pour Jonathan Siboni, président du cabinet de conseil Luxurynsight et professeur à Sciences Po, “Hermès peut se permettre ce luxe“. Sa santé financière est éclatante. “Mais il faut surtout regarder Shang Xia sous un autre angle que financier: dans l’optique de l’art, c’est un projet magnifique, et dans l’optique de la communication, s’intéresser à la culture chinoise est le plus beau coup de pub pour Hermès“.

Les clients chinois sont le réservoir du luxe et la cible phare des géants du secteur. Mais Hermès vise plus large: “Nous avons voulu lancer un beau projet, une marque discrètement asiatique qui attire les gens au-delà de la clientèle chinoise“, explique Patrick Thomas.

Qu’une grande maison française du luxe comme Hermès, née en 1837, lance une marque d’inspiration chinoise a étonné.

Car il est encore très difficile de vendre du luxe “made in China” à des Chinois qui rêvent au contraire de marques occidentales comme Louis Vuitton, Gucci, Hermès, Prada, Bottega Veneta, sans parler des montres suisses.

En outre, “la marque manque d’incarnation, de personnification. La directrice (générale et artistique) Jiang Qiong Er n’est pas encore un Christian Dior ou un Marc Jacobs“, relève Jonathan Siboni.

Pour l’instant les riches Chinois visés ne s’intéressent pas vraiment à Shang Xia, même si en qualité c’est le summum de ce que peuvent faire les artisans chinois. Mais il est possible que la marque ait plus de succès en France, en touchant des consommateurs occidentaux qui apprécient les beaux objets et la culture chinoise“, dit-il.

Hermès dit avoir voulu “transférer” sa philosophie en Chine et veut y croire. “Shang Xia c’est un peu mon bébé“, dit à l’AFP Patrick Thomas qui, à 66 ans, abandonnera fin janvier les commandes de Hermès mais en continuant de veiller sur ce bébé.

D’autres géants du luxe ont investi dans des marques chinoises. Le joaillier Qeelin est entré en décembre dans le giron de Kering (ex-PPR), tandis que le suisse Richemont a racheté dès 1998 Shanghai Tang (prêt-à-porter et maroquinerie).

Shang Xia veut proposer deux collections par an, comme Hermès. Elle compte aujourd’hui 400 à 500 références produits, contre 50.000 pour sa maison mère. Après Paris, un navire amiral de 400 m2 doit ouvrir l’an prochain à Shanghai. Les implantations se font au compte-gouttes. “Nous ne cherchons pas à faire gros, mais à bien faire“, dit M. Thomas.

(AFP)