On l’a testé, et ça marche !
La pilule du désir, on en parle depuis des années. Elle devrait arriver bientôt en pharmacie. Entre-temps, des médecins belges proposent déjà des moyens efficaces pour réveiller le désir féminin.
Bien sûr, on n’est pas obligées. Mais quand on a « envie d’avoir envie » et que le désir ne suit pas, avouons qu’une petite pilule viendrait bien à point. Un Viagra au féminin. Le Lybrido, un produit mis au point par une société hollandaise, pourrait être le premier à sortir des laboratoires de recherche. À moins que le Flibarinserin, produits allemand qui tente sa chance aux Etats-Unis, ne lui dame le pion.
L’aventure du « Viagra rose » remonte à plus d’une décennie. À l’origine, il y a l’immense succès commercial du Viagra. Découvert par hasard alors qu’il était voué à soigner les angines de poitrine, il est commercialisé par Pfizer en 1999 pour soigner les troubles de l’érection chez l’homme. Déclic immédiat auprès de l’industrie pharmaceutique : la libido féminine et ses périodes creuses représentent un formidable marché. Malheureusement, les tests cliniques du Viagra démentent vite son efficacité sur les femmes. La recette n’est pas compatible avec nos besoins, ou en tous cas, pas tout à fait.
« Le Viagra est un médicament qui favorise le maintien de l’érection en augmentant l’influx de sang dans la verge. Il a donc un effet purement physique ou mécanique », explique Iv Psalti, docteur en sciences biomédicales, sexologue et formateur. Chez l’homme, érection et désir sexuel vont généralement de pair, comme les deux facettes d’un même phénomène. Chez la femme, ça peut aussi être le cas, mais pas à tous les coups, et pas chez toutes. L’activité cérébrale correspondant au désir n’est pas toujours accompagnée de manifestations corporelles, et vice versa. Une femme peut avoir la vulve humide sans que cela ne se traduise en plaisir au niveau du cerveau. « Chez une femme, le seul composant du Viagra ne suffit pas. Si le médicament agit en stimulant le vagin et le clitoris, il ne va pas enclencher de désir en amont ! » complète le Dr Psalti, auteur de plusieurs ouvrages à ce sujet. Pour qu’un médicament intervienne efficacement dans les mécanismes sexuels d’une femme, il doit donc agir sur le corps et sur l’esprit.
Ce que le Flibarinserin, du laboratoire Boeringher Ingelheim, fera peut-être. Ayant raté sa carrière d’antidépresseur, ce médicament a l’ambition de réveiller le désir assoupi. Moyennant une prise quotidienne, et sans hormones. Ce qui, d’après les médecins, semble peu efficace.
Car, aussi étonnant que cela paraisse, ce qui nous fait vraiment de l’effet, c’est l’hormone mâle, la testostérone. L’action de cette hormone sur notre cerveau déclencherait les échanges neuronaux indispensables au réveil de l’appétit sexuel. La solution serait donc de prescrire aux femmes de la testostérone. Pour autant, la prise de cette hormone n’est pas exempte d’effets secondaires malvenus, comme l’hirsutisme ou l’acné. Le casse-tête paraît insoluble. Et pourtant, Aadrien Tuiten, un séxagénaire hollandais, pourrait bien avoir trouvé une solution à cette équation. Après avoir mal vécu une déception sentimentale, ce docteur en psychopharmacie a passé une grande partie de sa vie à étudier les interactions entre afflux hormonaux et désir chez les femmes, afin de mettre au point un remède pour lutter contre les symptômes du désir sexuel hypoactif. Le Lybrido et le Lybridos sont composés de deux ingrédients principaux : un agent proche du Viagra, et de la testostérone.
« Ce sont des médicaments d’un nouveau genre, qui combinent deux principes actifs complémentaires, ciblant à la fois la tête et le corps », confirme Elisa Brune. Le Lybridos contient également un agent désinhibant et s’adresse spécifiquement aux femmes qui éprouvent un blocage psychologique (issu d’un traumatisme, d’un biais liés aux conceptions religieuses ou familiales, par exemple). Le médicament est prévu pour fonctionner de manière ponctuelle, sans prise continue. Une seule pilule quelques heures avant d’aller au lit suffirait. Le dosage de chaque composant, leur action conjointe et leur effet limité dans le temps parviennent à de bons résultats lors des premières phases d’essais cliniques en 2013.
Toutefois, les deux Lybrido doivent encore survivre à la troisième phase d’essais cliniques, prévue pour fin 2015, et surtout au verdict de la Food and Drug Administration (Agence américaine des produits alimentaires et médicamenteux), réputée très critique à l’égard des tentatives de commercialisation d’un médicament lié à la sexualité de la femme. On parle d’une sortie en pharmacie en 2017.
En Belgique, on n’a pas attendu le « Viagra rose » pour donner un coup de pouce au désir défaillant. >>>