Pour le Professeur Corinne Hubinont, obstétricienne aux Cliniques Universitaires Saint-Luc, mettre toutes les chances de son côté pour concevoir un bébé, ça commence dans l’assiette. Rencontre.
De plus en plus de femmes éprouvent des difficultés pour tomber enceinte. Sommes-nous moins fertiles qu’avant?
Oui, on estime qu’actuellement un couple sur cinq doit être assisté médicalement pour mettre une grossesse en route. Une fois sur deux, c’est l’homme qui est à l’origine du problème, en raison de la diminution de la qualité des spermatozoïdes. La stérilité féminine est également en augmentation.
Quels sont les principaux ennemis de la fertilité ?
Ils sont nombreux et principalement environnementaux. La présence de toxiques, comme les polluants atmosphériques, les dérivés plastiques et certains médicaments entraînent des effets « féminisants », dus aux œstrogènes, sur l’appareil reproducteur masculin. Le stress, la sédentarité, l’obésité, le tabagisme et l’alcool détériorent eux aussi la qualité du sperme. Mais le principal facteur d’infertilité reste lié à l’âge de la maternité. Les femmes sont enceintes de plus en plus tard. Or, à 35 ans, la femme a déjà perdu un tiers de sa fertilité…
La prise régulière de la pilule peut-elle aussi expliquer ce phénomène ?
C’est une légende ! Aucune étude n’a pu prouver une telle chose. Certaines femmes sont d’ailleurs enceintes directement après l’arrêt de la pilule.
Á partir de quand faut-il se poser des questions ?
En principe, après une année de tentatives infructueuses. Il est important d’examiner simultanément l’homme et la femme, car dans la plupart des cas, il s’agit d’un problème mixte. Quand ce bilan est fait, il faut adapter le traitement: il suffit parfois de stimuler un peu l’ovulation avec des médicaments ou en injectant des produits comme la FSH (l’hormone folliculo-stimulante, sécrétée par l’hypophyse). Parfois une insémination intra-utérine réglera le problème sans qu’il soit nécessaire de recourir à des traitements plus lourds. On a pratiquement des solutions à tous les problèmes.
En pratique, on fait quoi ?
On adopte un mode de vie sain (bannir la cigarette, l’alcool, faire du sport) et une alimentation moins trafiquée. On prend des multivitamines (fer, zinc, magnésium, vitamine D, acide folique). On privilégie les bouteilles d’eau en verre pour éviter d’ingérer les bisphénols présents dans les plastiques. On préfère les cuissons douces (tajine, wok, cuiseur vapeur) qui préservent les qualités nutritionnelles des aliments. On varie les sources de lipides : poissons gras, huile d’olive pour la cuisson et huile de colza pour l’assaisonnement. On abuse des aromates (curcuma, gingembre, clou de girofle) qui fournissent une protection antioxydante supplémentaire. On utilise les graines germées (en saupoudrant ses aliments de germes de blé ou de graines de lin) pour potentialiser les apports nutritionnels des repas. Ces règles diététiques sont essentielles aussi bien pour les hommes que pour les femmes.
EN BREF, 5 RÈGLES À SUIVRE
1. Privilégier les aliments à indice glycémique bas (fruits secs, céréales complètes, fruits rouges en saison) : une bonne fertilité passe par une amélioration de l’insulino-sensibilité.
2. Miser sur les graisses polyinsaturées et améliorer le rapport oméga-3 et oméga-6 en consommant de l’huile de colza, des poissons gras et des oléagineux (noix, amandes, graines de lin).
3. Faire la part belle aux protéines végétales et notamment aux légumineuses (lentilles, pois et fèves).
4. Manger des fruits de mer (coquillages, mollusques, crustacés) pour leur richesse en oméga-3, antioxydants et vitamine B12 mais aussi en oligo-éléments (fer, iode, zinc, sélénium).
5. Augmenter sa consommation de légumes verts à feuilles (brocolis, artichaut, épinards cuits) pour leur apport en vitamine B9 et antioxydants, mais aussi leur action détox.
À lire : Corinne Hubinont, Françoise De Keuleneer et Héloïse Coppée, « Nutrition gourmande autour de la naissance » (Françoise Blouard).