Toute la vérité sur le cuir, premier acte de recyclage de l’histoire de l’humanité. Pour faire la peau aux malentendus.
Le cuir revient en force, de plus en plus sophistiqué, modulable et contrôlé. Fashion fixette et matière noble, le Salon Première Vision* nous décrypte les clichés les plus dur à cuir.
« La production de cuir, c’est polluant »
On n’est plus au temps des tanneurs qui utilisaient l’eau « potable » des villes, époque pré-industrielle. REACH est un règlement de l’Union européenne qui protège la santé humaine et l’environnement contre les risques liés aux substances chimiques. En Europe mais aussi au Brésil notamment, les normes écologiques réglementant l’industrie du cuir sont hyper strictes, et le retraitement des eaux extrêmement surveillé. Ensuite, chaque marque, chaque groupe s’impose ses propres labels.
« Le tannage, c’est toxique »
Pas vraiment, c’est une question de procédés. Il existe trois types de tannages :
– au chrome (à base de minéraux, celui qui est souvent pointé du doigt), qui représente 85 % du marché. Il est plus rapide, moins cher, mieux maîtrisé et produit des cuirs plus résistants.
– végétal (au tanin) : le cuir obtenu est plus dur, plus cassant. On l’utilise pour des sacs auxquels on veut donner un effet « vieilli », et pour les semelles des chaussures.
(Le malentendu : Attention, confond souvent ce dernier avec un « cuir végétal », ce qui est un contresens : le cuir est toujours issue d’une peau animale. Sinon, ce n’est pas du cuir.)
– synthétique : c’est un tannage sans chrome, éco-responsable, mais encore rare.
Les subtilités du cuir, et les faux-amis
« La fleur de cuir, c’est un cuir végétal ? »
Non, puisqu’on vient de le dire, ça n’existe pas. « La fleur », c’est la partie du dessus, celle où il y avait le poil de l’animal.
« La croûte de cuir, c’est la meilleure partie, comme pour le pain ? »
Non, c’est l’envers du cuir. D’ailleurs parfois, une même peau est divisée en deux dans l’épaisseur : on vend la fleur d’un côté, et la croûte, moins noble, de l’autre.
« Le nubuck, c’est une bestiole ? »
Non, c’est une peau qui a été poncée côté « fleur ».
« Le velours de cuir, c’est un mélange textile ? »
Non, c’est une peau qui a été poncée côté croûte.
« Le daim, c’est du cerf ? »
Non, c’est du velours de cuir, tout simplement. Il n’existe que trois-quatre tanneries au monde qui travaillent la peau de cerf, qui est ultra résistante.
« Le parchemin, c’est du cuir de papier ? »
Non. Mais on peut y lire des histoires.
« La peau de chamois, c’est du chamois ? »
Non, c’est juste une peau super souple.
« Le cuir vient toujours de viande de consommation alimentaire »
Majoritairement, mais pas uniquement. A 65 %, ce sont des bovins. A 15 %, des porcs. A 11 %, des ovins. Encore 9 % de chèvres, et le reste, c’est plus exotique…
« Le reste, c’est quoi ? »
Des cuirs issus d’animaux qu’à priori, on ne mange pas, ou pas souvent : le kangourou, quasi exclusivement utilisé pour des combinaisons de moto haut de gamme, en raison de son extrême solidité, car il est presque impossible à déchirer mais au toucher, on dirait de l’agneau.
– Le galuchat, c’est de la raie.
– On fait même du cuir avec de la peau de crapaud et de poisson.
Attention aux opportunismes commerciaux (arnaques, pour faire simple) :
Le cuir « vegan », c’est antinomique, et l’appellation est interdite par la loi car elle induit le consommateur en erreur. Parce que c’est devenu une niche, on étiquette « vegan » tout ce qui n’est pas issu d’un animal. Autrement dit, n’importe quel polyuréthane chimiquement douteux est « vegan ». Il y a quelques années, on appelait ça du « simili cuir », mais c’est du synthétique, sans plus. Question écologie, ça devient une question de conscience individuelle.
Les tendances cuir à venir : dans quoi investir ? (Ou que ressortir?)
– Des « velours » légers, imprimés plumes d’oiseaux, reptiles matifiés, buffles ridés.
– Des couleurs denses, du rouge cru, du rouge écrasé, du brun profond, du blanc solarisé, du noir
médiumnique, de l’or chamanique. Et aussi du rose tapageur, du vert batailleur, du bleu dans tous ses états. Des tons acidulés en général, artificiels et assonants.
– Des peaux ajourées, perforées, dentelées.
– Du cuir laqué, brillant comme une carrosserie.
– Des reliefs et embossements 3D, pour des effets visuels hyper créatifs.
– Des peaux à mémoire de forme.
– Des effets satinés.
* la plus importante rencontre de producteurs de tissus et ennoblissements au monde.
En images et en preview, ce qui nous attend en matière d’innovation cuir dans les saisons à venir :