Oui, ça demande de la volonté, mais ce n’est pas si compliqué. La preuve avec Elozi Lomponda, fondatrice de l’asbl « Des livres sur les pirogues », qui lutte pour le droit à l’éducation des enfants riverains du fleuve Congo. 

Souvent, on aimerait se bouger. Pour les autres, la planète ou les animaux. Et puis on est rattrapé par le quotidien, on se dit qu’on n’a pas vraiment le temps, et on ne fait rien… Elozi Lomponda, elle, fait partie de ceux qui initient le mouvement. A côté d’un job déjà prenant (elle travaille comme collaboratrice au sein du Cabinet du Ministre des Affaires étrangères), la jeune femme ultra motivée a monté une association de A à Z. Son nom poétique, « Des livres sur les pirogues » fait malheureusement référence à une situation dramatique : en RDC, des enfants risquent chaque jour leur vie pour traverser le fleuve Congo et se rendre à l’école. On espère que le témoignage d’Elozi vous inspirera à soutenir son projet et, qui sait, à vous lancer vous aussi…

L’origine du projet ? « L’association est née il y a deux ans et demi. Je suis née à Bruxelles mais j’ai des racines congolaises, et j’ai toujours voulu d’une certaine façon redonner un peu de ce que j’avais reçu. Depuis longtemps, j’avais envie de m’impliquer au sein d’une structure philanthropique pour contribuer à un monde plus juste mais je n’avais jamais sauté le pas. Le déclic m’est venu lors du naufrage d’une pirogue qui se rendait à l’école dans le village de Mankanza, dans le nord de la République Démocratique du Congo. Je m’en souviens, c’était un mercredi, le 25 février 2015. Ce jour-là, 13 enfants ont embarqué dans une pirogue pour aller sur l’île où se trouve leur école. 9 ont perdu la vie, dont deux de mes petits cousins.

Ce drame m’a profondément touchée et révoltée. Tous les jours, les enfants risquent leur vie pour étudier. Entre 2006 et 2011, 1570 écoliers sont décédés. Il n’y a pas d’école sur leur île, ils doivent donc se déplacer sur une pirogue de fortune pour rejoindre leur classe mais les parents ne peuvent pas se permettre de les accompagner. Ce sont des pêcheurs et ils doivent travailler pour nourrir leur famille. Le problème, c’est que 70% des enfants là-bas ne savent pas nager, ils sont aussi en danger à cause des animaux aquatiques et font des malaises sur le chemin du retour à cause de la chaleur. »

Et après ? « A Bruxelles, j’ai commencé à réfléchir à des pistes de solution et je me suis demandée comment je pouvais réellement m’impliquer. C’est là que j’ai eu l’idée de l’association ‘Des livres sur les pirogues’. A la base, j’étais toute seule. J’en ai parlé à des amis et des connaissances, certains ont eu un coup de cœur pour le projet et on a décidé d’aller sur le terrain pour se rendre compte de la réalité. On est partis à trois avec notre sac à dos pour un mois et demi. On a pris deux avions et navigué huit heures sur le fleuve pour arriver à notre destination, ce sont des zones extrêmement difficiles d’accès. Sur place, on a discuté avec les enfants, leurs parents, les profs, les autorités locales pour voir où étaient réellement les besoins. »

La construction de l’association ? « C’est beaucoup d’administratif, il faut s’inscrire au Moniteur belge mais aussi nouer des contacts, rencontrer des personnes de différents horizons qui pourraient être intéressées par le projet. Pour nous, c’est important d’impliquer les communautés locales. On a constitué une équipe sur place, ce sont des gens qui connaissent bien le terrain et les mentalités. Ils sont une vingtaine de bénévoles. On fait énormément de séances de brainstorming avec eux et ce sont eux qui implémentent tout ce qu’on décide ensemble. Heureusement que Skype existe ! (rires). Notre job à Bruxelles, c’est de sensibiliser les publics et d’organiser des récoltes de fond. On pitche notre projet à des fondations, des ONG, des donateurs privés, on organise des événements et on discute avec des partenaires plus expérimentés ».

Les différents projets de l’association ? « On en a trois. Le premier c’est l’implantation d’écoles sur pilotis pour éviter qu’elles ne soient inondées. Deux fois par an, la région est sous l’eau et les pluies balaient tout. En attendant que tout soit reconstruit, les enfants vont travailler avec les parents et certains ne reviennent plus. Le deuxième, c’est la création d’une embarcation scolaire. Un peu comme aux USA, un bus viendra chercher les enfants pour les amener à l’école, sauf qu’ici, il sera flottant ! Il pourra transporter 50 enfants avec des gilets de sauvetage à partir de septembre, ira d’île en île et quatre accompagnateurs seront présents. Les écoliers ne se plaignent jamais, leur seul souci, c’est d’arriver à l’heure à l’école. Et enfin, le troisième projet c’est de sensibiliser les populations locales. Des équipes se rendent dans les villages pour parler aux enfants, aux parents et professuers qui ont parfois tendance à sous-estimer les dangers du fleuve. Ils leur montrent les gestes à réaliser en cas de noyade et des formateurs devraient aussi leur apprendre à nager. »

Ton ressenti sur l’asbl ? « L’association est devenue ma passion. Quand je rentre chez moi, je suis parfois crevée du boulot, je commence ma deuxième journée à 22 heures mais je ne considère pas ça comme du travail. Des livres sur les pirogues me donne un but dans la vie, c’est incroyablement gratifiant de voir qu’on aide ces enfants. Les résultats sont vraiment tangibles. »

Une façon d’aider ? « Les gens peuvent toujours faire des dons (BE25 0018 0828 2282) mais on est aussi très ouverts à l’arrivée de nouvelles personnes. Si quelqu’un a envie de mettre ses compétences ou son expertise au service de l’association, il sera toujours le bienvenu. On est preneurs de toutes les idées pour avancer. »

Plus d’infos sur le site de l’association ou sur leur page Facebook.