La réalisatrice Ovidie sort « Tu enfanteras dans la douleur », un documentaire choc sur les violences obstétricales. À voir absolument.

« Elle a fait la garagiste ». Comme une voiture à laquelle il faut changer une pièce, la gynécologue la manipule, use d’outils pour l’ouvrir, l’inspecter, la triturer, et extraire finalement le fragment incriminé : un bébé. Un enfant qui devrait lui apporter tant de joie, en un cri de vie, qu’il lui fera tout oublier. Sauf qu’elle n’oublie pas. Ni ses supplications, ni la péridurale qu’on lui refuse, ni les « coups de rasoir » de l’épisiotomie non-consentie, ni la suture à vif. Ce qui lui est arrivé à elle, ou à d’autres : son accouchement est et restera un cauchemar. Mais dans « Tu accoucheras dans la douleur », la souffrance justement, l’humiliation aussi, ne sont plus passés sous silence. Le dernier documentaire d’Ovidie — la réalisatrice de « Là où les putains n’existent pas », et avant ça de porno féministe et de films d’éducation sexuelle — fait toute la lumière sur les violences obstétricales, en particulier en salle d’accouchement. Et le coup de projecteur est particulièrement violent. Pénible, il faut le dire, tant les témoignages vous glacent le sang, mais nécessaire.

Parce qu’on voit, plus encore que quand on la lit, la détresse des mères. Et parce qu’en entendant les interviews des soignants, notamment du président du Collège National des Gynécologues et obstétriciens Français Israël Nisand, on comprend le déni toujours féroce de l’institution médicale. On saisit le mal-être qui l’anime aussi, entre introduction de pratiques plus progressives et manque de moyens.

La guerre des utérus

Mais on devine aussi que le changement est en marche. Ou en tout cas que l’on marche pour le changement. À travers l’intervention de la Secrétaire d’État française Marlène Schiappa par exemple, dont on apprend que l’accouchement a également été violent. « J’ai vécu des choses de l’ordre de la boucherie », confie-t-elle face à la caméra d’Ovidie, dans « Tu enfanteras dans la douleur ». Mais aussi grâce au travail de militantes des droits des femmes. Celui des activistes italiennes par exemple, touchantes, mais qui annoncent ce chiffre terrible : 21% des femmes, en Italie, ont été victimes de violences obstétricales.

On retrouve aussi Marie-Hélène Lahaye, juriste belge et lanceuse d’alerte, qui écrit le blog « Marie accouche là » — et qui s’est récemment engagée en politique chez Ecolo, avec qui elle siège désormais au Conseil communal de Saint-Gilles. Elle est notamment l’autrice du livre « Accouchement : Les femmes méritent mieux ». Sur son blog, on peut d’ailleurs lire qu’Ovidie et sa dérusheuse ont été particulièrement touchées par les témoignages, au point de s’en rendre malades physiquement. « Ce qui m’a frappé, c’est que les femmes racontaient leur accouchement en continu, parfois pendant plus d’une heure, sans que je doive les relancer avec des questions. Elles racontaient le déroulement des événements avec une grande précision, alors même que ce qu’elles avaient vécu remontait parfois à plusieurs années. Pour nous, c’était insoutenable à entendre, au point que mon cadreur a même fait un malaise ». Et pourtant, ce documentaire est à mettre entre toutes les mains, et sous tous les yeux. Pour que le sujet sorte des maternités et soit enfin, réellement, sur le radar des politiques.

Infos pratiques : « Tu enfanteras dans la douleur » d’Ovidie est disponible jusqu’au 9 juillet sur Arte Replay et sera diffusé sur la chaine le 16 juillet.

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