Entre confinement et vacances entre soi, on les a bien goûtés, les liens du sang. Puisqu’on ne sait pas encore à quelle sauce la Covid-19 (qui entre dans sa saison 20-21) accommodera notre vie sociale au cours des prochains mois, cultivons encore un peu la proximité, des fois qu’on y retrouve des affinités.

Pour aborder votre famille comme alliée de sérénité à une époque où vous ne rêvez que de grands espaces solitaires et d’une société solidaire, il va falloir y mettre un peu de créativité. Edwige Antier, pédiatre chevronnée au bon sens salvateur, signe un livre de mémoires intitulé « Maman de tous les enfants du monde » (tout un programme, quand on se rappelle nos journées à bâtir des théâtres en rouleaux de PQ et à méditer au-dessus de bols de bananes écrasées). Auteure d’ouvrages d’éducation éclairés et ancienne députée – que des compétences indispensables pour nous aider à construire une cabane refuge dans notre arbre généalogique –, elle s’est penchée pour nous sur la diplomatie domestique.

“Maman de tous les enfants du monde” de Edwige Antier

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Laissez les tout-petits traînasser sans leur coller une horloge dans la couche

Edwige Antier souligne la valeur du temps qu’on prend : « Le confinement a été une période expérimentale qui a prouvé les effets incroyablement positifs de l’éducation que j’appelle “proximale” dans mon livre, fondée sur mon vécu particulier depuis mon enfance et ma jeunesse dans d’autres cultures. On s’est calmé, on n’a plus dit “vite ! vite !” dès le réveil, on n’a pas bousculé les petits pour s’habiller, se préparer, les enfants du primaire pour faire leur sac sans rien oublier, les collégiens pour se lever enfin… » Le résultat pour les petits ? « De grands progrès de langage.

Ils ont eu des parents plus disponibles pour répondre à leurs questions, ont gravé des mots dans leur lexique, et se sont mis à parler incroyablement mieux. » Ainsi, quand vos bambins seront bientôt capables d’argumenter avec vous, vous saurez ce qu’il vous reste à faire : vous lancer dans de vraies conversations… ou rallumer la télé, quand vous serez à sec de réparties philosophiques. Outre leur expression littéraire, les enfants se sont mis à faire en un temps record et de façon autonome ce qui leur prenait des heures avant, quand ils se sentaient bousculés. Désormais, aidés et sans pression, ils sont devenus les rois des lacets, les kings de la table débarrassée. La pédiatre analyse : « Ils n’avaient plus besoin de traîner pour essayer de garder leurs parents plus longtemps. » C’est l’autonomie de la sécurité affective, qu’il va falloir cultiver. « L’autonomie se gagne par l’imitation, et non par l’injonction. » Ça va en faire, des écoliers rédigeant leurs devoirs sans qu’on ait eu besoin de le leur demander, mais sur Zoom, en pull jacquard bien repassé en haut, et pyjama imprimé chats sous le champ de la caméra. Comme papa.

Apaisez vos relations avec votre fille ado

Vous êtes persuadée qu’en cas de catastrophe naturelle, la chair de votre chair sauverait d’abord son portable avant de vous aider à vous exfiltrer, puis vous enverrait un texto pour savoir si depuis la cuisine sous les décombres, vous pourriez lui rapporter un Coca et son chargeur. C’est sans doute la vérité.

Ne vous surbookez plus le système nerveux

Pendant ces mois singuliers, beaucoup de parents se sont plaints d’être débordés : « Papa et maman en télétravail, deux enfants en pleine forme, besoin d’être en conférence sur écrans partagés. Les profs qui bombardaient les écoliers de devoirs, mais c’était aux parents de les corriger… Selon que les parents étaient investis ou au contraire peu scolaires, on a vu l’aggravation de la fracture scolaire, et pas seulement pour une question de matériel. » Certains parents se sont redécouverts l’un l’autre du point de vue des divisions décimales, d’autres se sont remis au latin. Ne pas tout comprendre, ni le sens ni l’usage pratique d’un discours, mais s’appliquer à s’y intéresser, et respirer. Maths et langues désuètes à l’ère du tout au codage, autant de disciplines requérant patience et abnégation, qui seront évidemment utiles tout le reste d’une vie de couple.

Up-gradez votre relation avec votre mère

Si ça se trouve, depuis les six derniers mois, vous ne l’avez vue que dix fois. Soit autant qu’en une seule journée normale, avant la pandémie. Vous ne l’avez presque pas critiquée, vous vous êtes même inquiétée. En vain : votre daronne en a vécu d’autres, des
moins médiatisées, des plus pimentées. Quand on a été jeune pendant les années 60, ce n’est pas un éternuement qui va vous perturber, estime-t-elle. Mais contre toute attente, elle vous a manqué, et pas seulement pour vous soulager en matière de logistique. Maintenant que les règles sanitaires et les strings se détendent, vous allez bientôt pouvoir découvrir son Mai 68 autour d’une soupe au potiron, selon sa recette, et assaisonnée de vos diverses exigences orthorexiques. Un bon potage, un
nouveau partage. Une « transmission transgénérationnelle », sans sel. Bien sûr, elle vous gonflera avant le dessert. Mais au fond, ça vous convient : soupirer du fond des poumons, c’est bon pour améliorer sa respiration. Ce qui peut toujours servir, à l’avenir.

Voyez le bon côté des masques

On ne voit plus les gens faire la gueule. Ils n’ont plus d’haleine. Les ados et votre belle-sœur en ont fait un accessoire de mode avantageux (vous n’allez pas les contredire). Soudain, un jogging élimé (pardon, du « loungewear vintage ») devient chic à tomber, porté avec un masque un peu ouvragé. Plus de soupirs réprimés, fini les grimaces spontanées. Vous n’êtes plus obligée d’imposer à votre enfant d’embrasser les vieilles cousines qu’il ne connaît pas. Vous allez retrouver des sujets de conversations supportables pour l’entourage. Vous avez été bouclée avec votre bébé et rien ne vous a plus captivée que son évolution exponentielle ? Il trouve tout seul sa bouche avec son pied ? Partagez votre expérience, vous ne verrez plus vos amis bailler. Même dans une vie qui a retrouvé une partie de sa normalité, ce temps de qualité vous a contaminée, et la pression des autres, lentement quittée. L’automne arrive avec ses feuilles et ses souvenirs qui se ramassent à la pelle. Triez, traînez. Même quand on sourit sous un masque, les yeux rient.

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