C’est le couvercle ouvert à tous les pots de crème : documentés ou fantaisistes, distrayants ou informatifs, comme dans les tiroirs de nos salles de bains en matière de tutos beauté, on trouve de tout : du bon en petite quantité, au pas très quali mais ludique. 

1. Le dentifrice anti-acné

C’est incroyable toutes les vertus qu’on prête au dentifrice. Parmi ses applications créatives inefficaces et potentiellement dangereuses, figure cette idée encore répandue qu’il faudrait en appliquer rapidement une bonne couche en cas de brûlure. Le côté mentholé apporte une illusion de fraîcheur, renforcé par le fait que la peau blessée est isolée de l’air. Mais cet effet est non seulement illusoire, il risque en plus de provoquer des infections. Pareil pour le dentifrice sur les boutons : ça picote donc on pense que ça agit. En réalité, c’est juste irritant.

Comme les influenceurs trempeurs de burrata dans l’océan, soi-disant exhausteur de goût (grosse trend de l’été dernier, pour une bonne sauce aux microplastiques) qui donneraient des conseils médicaux. En réalité, de nombreux dentifrices contiennent du bicarbonate de soude (asséchant), et du triclosan, agent antibactérien accessoirement perturbateur endocrinien, interdit par exemple dans les produits de rasage. Donc le dentifrice, on le circonscrit aux caries, et on évite la peau qui, attention, scoop, n’a pas la même résistance que l’émail des dents.

2. L’huile d’olive pour bronzer

L’idée n’est pas neuve, déjà dans les années 80-90, on se tartinait de « graisse à traire » pour accélérer le bronzage. Notons au passage que les cancers de la peau ont explosé depuis cet âge d’or de valorisation du soleil plein pot. Le Centre Léon Bérard qui fait partie de la Fédération française des centres de lutte contre le cancer explique sur son site que « le mélanome  cutané est le premier des cancers en termes d’augmentation de fréquence ». Entre 1990 et 2018, le nombre de mélanomes a été multiplié par 5 chez les hommes, par 3 chez les femmes. « 80% des cancers de la peau sont liés à des expositions excessives aux rayonnements ultraviolets (UV) du soleil. »

Prenons maintenant un conseil tout simple, très partagé sur les réseaux sociaux cet été, pour bronzer plus vite et à moindres frais : mélanger du jus de citron (photosensibilisant) à de l’huile d’olive (qui augmenterait la pénétration des UV). Comme illustration, des influenceuses affichant, sans filtre (c’est le cas de le dire) des coups de soleil de compétition. Pourtant, c’est de la chimie culinaire de base : chair + huile + chaleur = cuisson. Notre conseil d’utilisation d’un mélange vraiment utile et efficace d’huile d’olive et de citron ? Faites-en de la vinaigrette. 

3. Prendre soin de son contour de l’œil

Pourquoi s’intéresser à la peau ultrafine – 4 fois plus que celle du reste du visage, elle est quasiment posée sur l’os – du contour de l’œil ? Déjà, parce que la lecture des 2 premiers paragraphes a dû vous faire plisser les paupières et que maintenant, il faut les délasser. Les pattes d’oie et la peau relâchée (« straight the ptose », ne chantera jamais Madonna) peuvent être évitées – un temps seulement, mais c’est déjà ça – en évitant pour commencer de se frotter les yeux vigoureusement pour se démaquiller. « Il faudrait savoir, pensez-vous : on nous dit de nous démaquiller même en rentrant de boîte à 5 du mat’, et maintenant que c’est risqué. »

Ce que les dermatologues disent, c’est que le contact avec cette zone particulièrement fragile doit être très délicat. Si un fard crème waterproof et son corolaire le mascara qui tient 24 heures résistent, il faut être plus intelligent·e que les cires fixatrices, en appliquant du démaquillant en compresses quelques minutes, le temps que ça fonde. Puis on essuie, doucement. On l’a compris, en matière de beauté et de bien-être c’est comme en chirurgie : il est plus prudent de consulter les gens dont c’est le métier.

Camila Cohelo par exemple, make-up artist, 10 millions de followers. Pour se nettoyer le visage, elle conseille sur son site (camilacoelho.com) d’utiliser un lait ou un savon neutre, de n’utiliser que le bout de ses doigts (pas de frictions nerveuses au coton pour aller plus vite), et de sécher en tamponnant doucement avec une serviette pour le visage. Elle rappelle : « N’utilisez pas d’exfoliants, de lingettes démaquillantes et/ou d’autres produits abrasifs dans cette zone. Cela risque de causer des lésions sur la peau, en plus d’augmenter la sensibilité, de provoquer des desquamations, des rougeurs, et de possibles allergies. » Même le doigt a son importance : l’annulaire est recommandé comme ustensile de beauté. Des précautions au quotidien qui devraient, sur le long terme, nous éviter de nous en mordre les neuf autres. 

4. Le bronzage du périnée

Comme son nom l’indique en français (dans la langue de Shakespeare, on dit « perineum sunning », ou plus prosaïquement « butthole sunning », on vous laisse chercher sur Google Trad), cette pratique promeut le fait de se mettre l’entrejambe au soleil. Les tutos dispensés en ligne et les nombreuses photos sur Instagram ne précisent pas s’il doit être fait à l’huile d’olive et au citron.

Évidemment, la première question qui nous vient à l’esprit n’est pas « comment », mais « pourquoi ? ». Selon ces croyances, exposer son périnée quelques minutes aux UV boosterait la production de mélatonine, améliorerait la qualité du sommeil et l’acuité visuelle (pour ceux qui n’ont pas les yeux dans leur poche, ou alors celle de leur pantalon), en plus d’embellir l’apparence de la peau. On gagnerait en vitamine D, on verrait notre cycle hormonal régulé, et la libido réchauffée. De fait.

Ajoutons à la satisfaction se faire bronzer une zone qui, objectivement, voit peu la lumière, des bénéfices antidépresseurs. Méthode 100 % naturelle (tout le monde adore cette idée), elle viendrait de Chine, quelque part vers le VIe siècle avant notre ère. La technique : se placer face au soleil, les quatre fers en l’air. Rappelons que, outre le côté acrobatique et le risque d’amende pour exhibitionnisme, les muqueuses s’accommodent mal des coups de soleil. Ça ne facilite pas la pratique du vélo, et le mélanome s’y repère moins facilement. Tant qu’à étaler de la crème solaire sur une raie, préférons celle des cheveux (on l’oublie tout le temps, celle-là).

5. Beauty tech et conseils personnalisés

En Corée du Sud, culture à l’avant-garde de l’innovation en matière de cosmétiques – c’est là qu’a été inventée la BB Cream – la société Lululab a développé un « Smart Mirror » qui analyse en profondeur les spécificités de la peau du visage, par le biais de centaines de critères passés au crible d’algorithmes ciblés. Une fois le bilan établi, le logiciel propose des produits et traitements pour régler chaque problème identifié.

Si le premier objectif de cette technologie est de détecter les problèmes de peau, elle permettrait aussi de poser des diagnostics précoces des maladies d’Alzheimer et de Parkinson, le programme décomposant l’image du visage en milliers de données pour détecter les pathologies à un stade précoce, décelables à un niveau sous-cutané (plis dans les expressions, infimes relâchements de la peau à des zones précises comme le lobe de l’oreille), corrélation démontrée par des études médicales internationales et de grande ampleur. Le procédé, mis au point en collaboration avec un hôpital de pointe en Corée, détecte aussi pour une utilisation plus cosmétique que médicale l’inflammation sous la peau, analyse le type de boutons qui apparaissent. Sur le même principe, en boutique, Lancôme dispose d’un Skin Screen, et Kiehl’s d’une app Derma-Reader à télécharger sur son téléphone.

En matière de bien-être, l’intelligence artificielle nous prodigue sa science, mais n’oublions pas, face à nos écrans, d’utiliser notre intelligence humaine. 

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