En pleine crise sanitaire, les drag queens du Cabaret Mademoiselle s’organisent pour continuer de se produire — et pour survivre.
Des danseurs qui virevoltent dans leur salon, des musiciennes qui grattent leur guitare au balcon, des auteurs qui lisent pour un public invisible : le confinement aura vu bien des artistes tenter de trouver un nouveau chemin vers leur audience pour la danse, la musique ou encore la littérature. Le secteur culturel est le deuxième plus touché, après l’Horeca, par la crise sanitaire. Et les drag queens, dans tout ça ? Sans perruque ni make up, sans leurs sœurs ni leur mère, sans scène surtout, les performers du genre sont privés de sortie depuis la mi-mars, une situation qui menace leur survie dans une certaine indifférence.
Le 13 mars dernier, quelques heures avant la fermeture des bars, restaurants et salles de spectacle de la capitale, Mademoiselle Boop a refusé de participer à la dernière « fête de l’apocalypse » qui battait son plein partout ailleurs dans la capitale. « Ça ne servait à rien de s’entasser à 150 dans le cabaret », explique le propriétaire des lieux derrière le personnage plantureux. Et puisque les portes du Cabaret Mademoiselle resteraient closes, lui et son gang allaient s’initier au streaming live pour un show certes tâtonnant — c’était une première, après tout —, mais avec la ferme envie de rester en contact avec son public.
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Les drag queens du jour d’après
Plus de deux mois plus tard, Mademoiselle Boop revient sur les difficiles semaines qui viennent de s’écouler. « Du jour au lendemain, on nous a enlevé notre gagne-pain et notre raison de vivre », explique la drag queen qui a fondé l’une des nouvelles institutions de la scène en Belgique. Sa troupe compte une vingtaine d’artistes, de l’effeuilleuse à la femme à barbe, dont une partie est privée de revenus depuis le début du confinement. « Le problème, c’est que notre cabaret a un statut un peu bâtard, entre la culture et l’Horeca, et que nous ne sommes pas subsidiés. Grâce aux aides allouées au bar, j’ai pu mettre mes trois employés en chômage temporaire, mais on a des artistes et des étudiants dans nos rangs qui ne sont pas soutenus », explique la liane aux cheveux noirs. En attendant d’être reconnu comme acteur culturel à part entière, le cabaret a mis en place une cagnotte en ligne pour soutenir les artistes et les travailleurs du lieu.
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Mais parce que l’organisation ne sait pas recevoir sans donner, elle propose pour dix euros l’entrée à un spectacle en ligne inédit qui se déroulera le 7 juin : une soirée de numéros comme Bruxelles n’en a encore jamais vus — du moins derrière un écran. « On applaudit les initiatives gratuites, mais elles ne font manger personne. En même temps, on était frustré de ne plus pouvoir performer. Dès qu’on a su qu’on pouvait se retrouver en nombre réduit, on s’est dit qu’on allait tenter un cabaret virtuel. On veut proposer quelque chose de qualitatif, de professionnel », décrypte Mademoiselle Boop, avant d’ajouter : « C’est maintenant qu’il faut réveiller notre créativité ». Car le cabaret en est bien conscient : dans l’incertitude de l’ouverture prochaine des bars, sans les touristes qui forment une partie de sa clientèle et dans l’impossibilité de se réunir à plus de 50 pour assister à un spectacle, il faut revoir son modèle économique. « C’est la bonne période pour tester de nouvelles choses », lance la patronne des lieux, bien décidée désormais à prendre le taureau par les cornes, et ce dès le 7 juin prochain.
Mademoiselle Night Live, le 7 juin à 21 heures (en ligne). 10 euros.
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